Inflation : les restaurateurs font le dos rond

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En ce début d’année 2023, les professionnels du secteur de l’hôtellerie-restauration subissent de plein fouet l’inflation des prix des matières premières alimentaires et doivent absorber la flambée des coûts de l’énergie. Des solutions existent toutefois pour limiter l’impact de cet effet de tenaille.

Les restaurateurs face à l'inflation. Crédit : Unsplash
Les restaurateurs face à l'inflation. Crédit : Unsplash

L’addition commence à être salée pour les exploitants du fait de l’inflation. Depuis plusieurs mois, le prix du poisson, de la viande, du canard, des légumes, du lait ou encore des fruits ne cesse de flamber sur fond de guerre en Ukraine. Pour certaines denrées, l’explosion des coûts est spectaculaire : + 400% pour l’huile de friture, 300% pour l’huile d’olive, la mayonnaise et la moutarde, + 200% pour les olives et le vinaigre, 150% pour les viennoiseries ou encore 100% pour le beurre.

Or, d’après une étude de KPMG France, le coût des matières premières représente 34,2% du chiffre d’affaires hors taxes des restaurateurs. Pour ne rien arranger, comme le précise Laurent Fréchet, président de la branche restauration au GNI et propriétaire notamment de Baltard au Louvre (Paris 1er), « à cela s’ajoutent d’autres difficultés financières », comme la revalorisation des grilles des salaires dans l’hôtellerie-restauration depuis le 1er avril dernier, le renchérissement des factures de gaz et d’électricité et les craintes liées à la renégociation des contrats énergétiques de 2023.

Augmenter les prix des cartes

Face à cette situation, bon nombre de restaurateurs n’ont pas trouvé d’autres solutions que d’augmenter leurs tarifs ; une décision approuvée par Hubert Jan, le président de la branche restauration de l’Umih, afin d’éviter que « certains établissements doivent faire face à de grandes difficultés financières dans les mois à venir, surtout en termes de trésorerie ». D’ailleurs, selon la dernière étude Lyf réalisée par OpinionWay, l’an dernier, près de six restaurateurs sur dix (58%) ont revu à la hausse leurs prix. Et 46% envisagent de le faire en 2023, à l’image d’Albert Aidan, à la tête de la brasserie L’Ami Georges (Paris 2e), dans le quartier de l’Opéra.
Du reste, le dernier baromètre GNI-Food Service Vision notait l’an dernier une hausse du prix des cartes de 8,3% dans les restaurants indépendants et de 9% dans les restaurants chaînés. Pourtant, relever ses tarifs peut se révéler être un choix risqué, avec in fine un possible manque à gagner en matière de chiffre d’affaires. En effet, la plupart des clients vivent également des jours difficiles, ce qui les conduit, eux aussi, à freiner leurs dépenses de restauration.

En conséquence, en Île-de-France, d’après l’étude Lyf/OpinionWay, 40% des restaurants franciliens estiment que la fréquentation de leur établissement a baissé l’an dernier et 43% d’entre eux observent une baisse du montant des additions à la caisse.

Être inventifs face à l’inflation

Pour autant, d’autres solutions existent pour faire face à la hausse du coût des matières premières : l’adaptation de la composition des plats, à condition de ne pas sacrifier la qualité des assiettes. Finalement, remplacer certains ingrédients par d’autres en faisant de nouvelles propositions de plats moins coûteux à confectionner. En l’occurrence, on peut ainsi proposer « des poissons plus accessibles aux budgets des clients que le bar ou la dorade mais tout aussi bons, à l’image du maquereau, du lieu ou encore des poissons de lac comme l’omble chevalier », précise Laurent Fréchet.
Cependant, pour le président de la branche restauration du GNI, « il est important de faire preuve de transparence sur ce point et de ne pas hésiter à en parler avec les clients afin de savoir ce qu’ils en pensent en ayant une discussion franche et sincère avec eux ». Du reste, certains plats traditionnels et bien ancrés dans l’esprit des Français, comme la blanquette de veau, le steak tartare ou encore les filets de dorade, peuvent être difficilement retirés de la carte ainsi que le rappelle Albert Aidan, car tout l’enjeu consiste à ne surtout pas heurter, voire faire fuir la clientèle.

Parmi les autres pistes envisagées, certains restaurateurs misent également sur une meilleure
rationalisation de leurs achats en jouant sur les quantités, en ayant recours à des achats groupés. D’autres tentent de limiter au maximum le gaspillage alimentaire, en proposant des recettes inventives. Ainsi, les épluchures de légumes et les carcasses de viande peuvent être utilisées pour des bouillons, des pestos et même des salades composées.

Dans cette même logique, il convient également de privilégier les circuits courts afin de réduire
au minimum le nombre d’intermédiaires. En limitant leur nombre, les restaurateurs diminuent les risques de pertes de denrées liées au transport, dans le cas par exemple d’une interruption de la chaîne du froid. Et cerise sur le gâteau, c’est écologique car cela permet dans le même temps de réduire l’empreinte carbone liée aux transports tout en valorisant les producteurs locaux.

Miser sur le digital

Le pilotage drastique de sa trésorerie ainsi qu’une étroite gestion des coûts deviennent des paramètres cruciaux dans le contexte actuel. Dans ce cadre, les nouvelles technologies peuvent aider les professionnels à travers des outils tels que la solution digitale Eazee link. Celle-ci offre la possibilité aux restaurateurs d’adapter le prix de leur menu en temps réel, en quelques clics. Et de ce fait, les réimpressions ou les corrections sur l’ensemble des cartes en cas de changement de tarif sont évitées.

De plus, si le choix se porte sur une solution de menu en ligne permettant la commande ou le paiement à table, l’économie se situera également sur le temps de la prise de commande ou du passage en caisse, ce qui est loin d’être négligeable. Par ailleurs, si la solution de facilité réside dans la réduction des quantités dans l’assiette, elle est toutefois fortement peu recommandée
et « même potentiellement dangereuse à long terme », selon Hubert Jan.

Un autre choix est néanmoins possible, pour l’éviter, celui de présenter à la clientèle des assiettes à partager, très tendance. Ainsi, cela laisse à chacun le soin de commander en fonction de son appétit et de son budget à l’heure où la majorité des clients tend à faire plus attention à son pouvoir d’achat.

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