La mozzarella parisienne au lait aveyronnais

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600 bufflonnes élevées au sud du massif central produisent du lait qui est transformé par Les Bufflonnes du sud, près de Toulouse (Haute-Garonne), mais aussi par un acteur parisien, Nanina. La mozzarella made in France n’a pas à rougir face à celle de la Botte adriatique.

mozzarella
Un cheptel de 600 bufflonnes est élevé dans cinq fermes du Cantal et de l’Aveyron. Crédit : Jean-Michel Déhais.

Au célèbre magasin Eataly Paris Marais, parmi les mozzarellas d’excellence, on trouve la marque Nanina, un fromage totalement français. Il est réalisé avec du lait de bufflonnes élevées dans le Cantal et l’Aveyron, mais de surcroît, il est fabriqué en région parisienne. Cette spécialité fut même transformée de 2017 à 2020 au cœur de Paris dans la boutique Nanina de la rue Basfroi (Paris 11e), avant que l’entreprise trouve un local de 300 m2, plus adapté à la fromagerie.

Rendons tout de même à César ce qui appartient à César : le créateur de Nanina, Julien Carotenuto, est d’origine italienne. Il ne retrouvait pas en France le goût ni la texture de la mozzarella qu’il mangeait dans son enfance, chez son grand-père, dans le sud de l’Italie. Il s’est alors lancé dans l’aventure après avoir fait un constat : «C’est un fromage qui voyage mal. Il ne faut pas le placer dans le frigo et le consommer dans les trois jours ». C’est ainsi qu’est né Nanina en 2017, avec deux autres Franco-Italiens. Franco, le fromager, et sa sœur, Claudia, qui veille sur le lieu.

Un lait spécifique

Mais pour mener à bien ce projet, Julien Carotenuto avait besoin de lait de bufflonne, un lait spécifique, chargé en matière grasse et dont le goût a fait la réputation de la mozzarella. «Nous en réalisons aussi avec du lait de vache, mais c’est différent, indique-t-il. En outre avec un litre de lait de bufflonne on réalise 250 g de mozzarella, alors qu’un litre de lait de vache produit seulement 125 g de ce fromage. »

Pour trouver un lait de bufflonne, Julien Carotenuto a regardé au sud du Massif central où depuis la fin des années 1990, l’homme d’affaires aveyronnais, Christian Valat, avait encouragé une filière d’élevage de bufflonnes. Cette proximité convenait, selon le patron de Nanina : «Il nous faut du lait cru, voire thermisé, qui arrive rapidement, 48 à 72h après la traite. »

Depuis près d’un an, Christian Valat a cédé la majorité du capital de l’entité Les Bufflonnes du sud à Vincent Bousquet, chirurgien et ancien propriétaire de la clinique du sport de Toulouse. Ce dernier a réinvesti dans l’outil de collecte et de transformation du lait installé à Beauzelle (Haute-Garonne). Cette structure reçoit chaque année 500 000 litres de lait issus de cinq fermes du Cantal et de l’Aveyron, qui élèvent un cheptel de près de 600 bufflonnes. Vincent Bousquet transforme près de 40 % de cette production de lait en mozzarella. Celle-ci est commercialisée à destination de la grande distribution sous la Marque bufflonne du sud. Une autre marque, Mozza d’oc, est réservée à la restauration et aux crèmeries. L’entreprise produit aussi de la burrata, de la ricotta, de la straciatella, de l’halloumi et de la scamorza.

En attendant de trouver de nouveaux débouchés commerciaux directs, Bufflonnes du sud vend le reste du lait collecté à des transformateurs, comme Nanina. La petite entreprise française transforme ainsi chaque semaine 1 500 à 2 000 litres de lait de bufflonne, et autant de lait de vache. Les deux matières sont transformées séparément. Outre la mozzarella, Nanina fabrique du pecorino avec le petit lait restant. Le fromage est commercialisé dans les deux boutiques parisiennes de la société, Nanina et la Latteria, rue du faubourg Poissonnière (Paris 9e). Ces deux entités vendent également des produits italiens et organisent des «stages mozza » à destination du grand public. La mozzarella restante est achetée par des revendeurs comme Eataly ou la maison Plisson, mais aussi des restaurants comme Sapid (Paris 10e) d’Alain Ducasse ou Passerini (Paris 12e).

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