L’effet Chauvet

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Le classement Unesco de la grotte Chauvet et la construction de sa réplique ont donné un coup d’accélérateur au tourisme dans la région de Vallon-Pont-d’Arc. Cette destination sportive se double désormais d’une destination culturelle.

Village de 3 000 habitants, Vallon-Pont-d’Arc s’affirme comme l’épicentre du tourisme ardéchois. L’office de tourisme regroupe l’offre de 20 communes de la vallée de l’Ardèche, soit 45 000 lits marchands et près de 45 % de l’offre globale du département. Deux curiosités locales attirent depuis longtemps les touristes dans ce secteur : le pont d’Arc, arche naturelle de 60 m de haut, et les gorges de l’Ardèche, espace naturel très fréquenté. Ce paysage époustouflant de falaises abruptes forme ainsi un canyon d’une trentaine de kilomètres. C’est la Mecque du canoë-kayak. Certains jours, jusqu’à 3 000 embarcations s’élancent sur cette partie de l’Ardèche pour des descentes oscillant entre 37 et 24 km. De nombreux randonneurs empruntent également le chemin qui suit le cours de la rivière. Depuis quarante ans, cette portion de l’Ardèche est classée réserve naturelle et aucune construction n’y est tolérée. Ceux qui souhaitent faire la descente en plusieurs jours sont contraints de s’arrêter dans l’un des deux bivouacs prévus à cet effet sur le trajet. Cette mesure a été prise afin de préserver l’aspect sauvage et naturel du site, notamment l’été, quand de nombreux touristes sont présents le long de la rivière.

La descente des gorges de l’Ardèche est une expérience inoubliable. Jusqu’à 3 000 canoës et kayaks peuvent emprunter quotidiennement la rivière.

La descente des gorges de l’Ardèche est une expérience inoubliable. Jusqu’à 3 000 canoës et kayaks peuvent emprunter quotidiennement la rivière. © Sébastien Gayet

L’effet collatéral

Les professionnels du tourisme se sont naturellement organisés pour gérer l’affluence estivale. En 2017, l’office du tourisme a déménagé, pour s’installer dans les locaux plus spacieux, à proximité d’un vaste parking aménagé pour canaliser les flux touristiques et accueillir la mise en place de navettes vers le pont d’Arc. « C’est un peu un effet collatéral du classement Unesco de la grotte Chauvet et de l’ouverture de la grotte Chauvet 2, en 2015, détaille Vincent Orcel, directeur de l’office. Il était nécessaire de nous structurer et nous doter d’outils à la hauteur des attentes du public Unesco. »

La grotte Chauvet 2

La grotte Chauvet 2

Découverte en 1994, cette grotte, qui recèle des dessins rupestres, se situe à proximité du pont d’Arc. Depuis lors, par mesure de protection et pour éviter les désagréments rencontrés par le passé à Lascaux, elle n’était pas ouverte au public. Il a fallu une vingtaine d’années pour construire, à proximité de Vallon-Pont-d’Arc, une forme de réplique, dans un bâtiment de 3 000 m² avec 7 ha associés. Le public peut y admirer les reproductions des œuvres préhistoriques découvertes dans la grotte originale. 50 M€ ont été investis dans cette réalisation, mais une seconde enveloppe de 50 M€ a été consacrée à l’aménagement touristique local, avec des réalisations comme la rénovation de l’aven Orgnac, le mise en valeur du site archéologique d’Alba-la-Romaine, ou encore la réalisation de l’Espace Néovinum, dédié aux vins de la région, ainsi que le développement du Musée de la lavande. Des opérations d’aménagement de parkings près du pont d’Arc ont également été menées. Enfin l’offre touristique a largement été digitalisée, afin de mieux communiquer en temps réel.

Le site du pont d’Arc, écrin de la grotte Chauvet, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco.

Le site du pont d’Arc, écrin de la grotte Chauvet, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. © Matthieu Dupont

Désormais, l’Ardèche n’apparaît plus seulement comme une destination sportive, mais aussi comme une destination culturelle. D’autres éléments locaux concourent à bâtir cette offre, comme les trois beaux villages existant dans le périmètre : Vogüé et Balazuc (Plus Beaux Villages de France) et Labeaume (Village de caractère).

Randonnée dans les gorges de l’Ardèche, entre Châmes et Gau: randonneurs et embarcations se partagent l’espace.

Randonnée dans les gorges de l’Ardèche, entre Châmes et Gau : randonneurs et embarcations se partagent l’espace. 

© Sébastien Gayet

Une marge de progression

« Dans notre région, explique Vincent Orcel, en saison, les établissements affichent le plus souvent complets et nous ne disposons pas de marge de progrès. La grotte Chauvet 2, ouverte toute l’année, échappe à cette saisonnalité et nous permet de progresser hors saison avec un profil de touristes différents. » En effet, 20 % des visiteurs de la grotte ne seraient pas venus en Ardèche en dehors de ce motif. De plus, les chiffres sont considérables. Après le rush des 600 000 visiteurs lors de la première année de fonctionnement de Chauvet 2, la fréquentation se stabilisait en 2018 autour de 350 000 visiteurs. 130 nationalités ont été recensées.

Les retombées de l’aménagement touristique global sont bien perceptibles. Selon les études locales, 27 M€ de dépenses supplémentaires ont été réalisées, dont 8 M€ pour les hébergeurs. Ces derniers ont largement joué le jeu de la montée en gamme. L’hôtellerie de plein air, localement très présente, s’oriente massivement vers les segments 4 et 5*. Deux vastes campings locaux, Le Provencal et Le Mondial, viennent d’être réunis par des investisseurs pour constituer une nouvelle entité, Rives d’Arc. L’hôtellerie classique n’est pas en reste. Une dizaine d’établissements mènent des projets de rénovation ou d’extension. L’Hôtel du Couvent de Vagnas a été créé dans la catégorie 4* et le Domaine du Colombier prépare lui aussi l’ouverture d’un hôtel 4* de 12 chambres. Comme quoi, une découverte archéologique peut donner un coup d’accélérateur appréciable au tourisme.

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