La nouvelle circulaire sur l’immigration pourrait limiter l’accès à l’emploi des travailleurs étrangers. Un enjeu de taille pour les professionnels du CHR, d’autant que la responsabilité de l’employeur reste engagée en cas d’irrégularité des titres de séjour.

En matière d’emploi, l’univers du CHR est sous tension, que ce soit en hôtellerie ou en restauration. Les recrutements sont de plus en plus difficiles. Une circulaire du ministère de l’Intérieur concernant l’immigration a été publiée fin janvier. Intitulée « Orientations générales relatives à l’admission exceptionnelle au séjour prévue aux articles L435-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile », elle a de fortes chances de durcir les embauches des personnes d’origine étrangère. Comme le soulignent, en définitive, les deux grandes organisations professionnelles, l’Umih et le GHR. Dès lors, quand une personne se présente avec des papiers en règle, comme un titre de séjour, pour un poste, difficile au restaurateur de refuser, vu les difficultés de recrutement. Mais l’employeur n’a pas de pouvoir d’investigation. Or, en cas de litige, pèsent sur lui de lourdes obligations. Par exemple, si la personne travaillant dans le restaurant n’a pas au final un titre de séjour en bonne et due forme, il est responsable.
Histoire vécue
Un chef d’entreprise à la tête d’une brasserie de quartier installée au cœur d’une de nos grandes métropoles emploie une dizaine de personnes. Son cuisinier étant parti vers d’autres horizons, il passe tout naturellement une annonce pour un poste, d’abord en CDD, puis en CDI. Un candidat se présente. Ce dernier dévoile alors un récépissé de demande de carte de séjour. Autrement dit, son dossier est en cours de traitement. Néanmoins, il est également autorisé à travailler comme le spécifie son récépissé. Dès lors, en toute confiance, le restaurateur l’embauche, sans vérifier, voire douter de quoi que ce soit.
Du reste, le nouveau salarié se révèle être un bon cuisinier ; il donne entière satisfaction. Tout se passe pour le mieux dans le meilleur des mondes… Puis, neuf mois après son arrivée, le CDD prend fin et le salarié décide de quitter l’entreprise. Quelque temps plus tard, notre restaurateur reçoit la visite, pour le moins désagréable, de l’inspection du travail. Celle-ci avait été saisie par l’ancien cuisinier.
Une procédure de contrôle est alors lancée par la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi). Elle découvre que le salarié ne possédait pas de titre de séjour. Et les conséquences vont se révéler dramatiques pour le restaurateur. Sans attendre, une procédure de fermeture administrative est engagée, laquelle aboutit : la brasserie devra baisser le rideau durant neuf jours. Ni plus ni moins. Un véritable coup dur pour l’entreprise. Entre alors dans la danse l’OFII (Office français de l’immigration et de l’intégration). Cet organisme calcule le nombre de jours exact que l’ancien cuisinier a travaillé. Après de savants calculs, la sentence tombe : le chef d’entreprise se voit notifier une amende de près de 10 000 €.
L’avis de l’expert
« L’employeur a eu le tort de ne pas se tenir au courant de l’évolution de la demande de titre de séjour de son cuisinier », souligne Philippe Meilhac, avocat spécialisé dans le CHR. Et de conclure : « Il est extrêmement important de vérifier les informations que vous recevez en cas d’embauche. Que ce soit par le chef d’entreprise lui-même ou par un homme de loi. » Cela s’applique pour ce cas précis, mais également pour n’importe quel recrutement. Le doute est parfois salutaire.