Redémarrage serein sur le lac

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Bien qu’elle accueille toute l’année des touristes, Annecy attend beaucoup de la saison estivale. Avec ce printemps marqué par l’épidémie de Covid-19, l’été démarre en douceur, mais avec de belles perspectives et une montée en puissance des préoccupations qualitatives de la clientèle.

À Annecy comme ailleurs, les touristes sont attendus de pied ferme. Dans cette ville où l’on ne compte pas moins de 50 787 lits touristiques, les vacanciers se pressent chaque année dans les rues de la Venise savoyarde et ses alentours. Car loin de se résumer à sa vieille ville, Annecy est un territoire pluriel, entre lac et montagne. « Notre tour Eiffel, c’est la promenade en bateau sur le lac », explique Yann Clavillier, directeur de l’office du tourisme d’Annecy. Outre son lac et les nombreuses activités qu’il offre, la ville peut se targuer d’une proposition gastronomique variée et complète. Cette année, la ville a d’ailleurs gagné sa neuvième étoile Michelin, grâce au chef Florian Favario et sa femme Sandrine Deley, qui ont repris en juillet 2019 l’Auberge de Montmin, située à une vingtaine de kilomètres de la ville, sur les hauteurs du lac. Le couple a repris la gestion en juillet 2019 et a remporté sa première étoile dans l’édition 2020 du Guide. « Les étoilés, c’est très important pour nous », explique le directeur de l’office du tourisme d’Annecy, ils font venir une clientèle très internationale, plus haut de gamme, qui ne viendrait pas sans eux. » La présence de ces étoilés est d’autant plus importante que du fait de leur nombre et des hébergements de luxe qu’ils proposent – à l’exception de l’Esquisse et de l’Auberge de Montmin – les voyageurs pour ces adresses gastronomiques restent sur place, quatre à cinq nuits, effectuant une véritable visite culinaire d’Annecy et ses alentours. « Ce sont des locomotives : ils contribuent à développer une autre saison touristique : on ne veut plus parler d’activité saisonnière », tranche Yann Clavillier. Il cite notamment l’exemple de Jean Sulpice, arrivé en 2016 sur les bords du lac. Après avoir débuté dans une logique saisonnière – fermeture de la mi-décembre à février – il ouvre désormais toute l’année. « Ces chefs contribuent à débloquer une autre saison touristique : l’été est important, mais nous ne voulons plus parler d’activité saisonnière : le territoire se vit toute l’année. »


Brasserie Bocuse Annecy
Située à la place du restaurant le Wyn, au bord du lac, la brasserie Bocuse Irma ouvrira courant juillet.


Un été culinaire et culturel

En passe de devenir le « sillon alpin de la gastronomie », selon la formule de Yann Clavillier, Annecy dispose désormais d’un nouvel atout de taille : la brasserie Bocuse Irma, du nom de la mère du chef lyonnais qui a vécu et grandi à Annecy. « Ce n’est pas anodin que le groupe Bocuse s’installe ici après Lyon et Paris, c’est un signal fort », analyse le directeur de l’office du tourisme d’Annecy. Le groupe Bocuse, dirigé par Jérôme, le fils de Paul, et son associé Paul-Maurice Morel, a, qui plus est, choisi un emplacement stratégique pour cette brasserie : elle est implantée à Annecy-le-Vieux, à l’emplacement du Wyn, au bord du lac et non loin de l’Impérial Palace. « Le groupe Bocuse a compris qu’il fallait s’implanter avant que d’autres n’arrivent. » L’ouverture, prévue officiellement vers le 13 juillet, aura lieu dès la fin des travaux. L’été annécien sera donc placé sous le signe de la gastronomie, et les touristes commencent d’ores et déjà à revenir. Bien que les touristes internationaux – qui représentent plus de 40 % de la clientèle l’été – soient aux abonnés absents pour l’instant, la clientèle française semble la remplacer avec efficacité. À l’Esquisse, restaurant une étoile du centre-ville, le chef Stéphane Dattrino a rouvert ses portes le 14 juin et se félicite pour l’instant du redémarrage de l’établissement : « Actuellement, on travaille mieux qu’en février ou en mars : à ce moment-là les réservations étaient plus aléatoires. » Les clients sont d’ailleurs plutôt nombreux pour un mois de juin, qui n’est pas le meilleur pour l’Esquisse du fait de son absence de terrasse. « Après ce confinement, j’ai l’impression que les gens vont mieux choisir leurs adresses et viser la qualité, mais on verra mieux ce qui se passe en juillet-août. »


Stéphane Dattrino l’Esquisse Annecy
Pendant le confinement, le chef Stéphane Dattrino du restaurant l’Esquisse* a proposé un menu à emporter à 28 €,
qui a rencontré un franc succès.


Cette envie de qualité des consommateurs français est égale
ment ressentie du côté de l’office du tourisme : « Nous avons des signes positifs du côté des hôteliers : pour les mois d’été, il y a une demande accrue des Français sur tous les types d’hébergements. » Ces touristes de l’Hexagone réservent les chambres les plus chères avec vue, habituellement occupées par les touristes. « Avec le confinement, il n’y a pas eu de week-end ni de vacances de Pâques : les Français ont les moyens et l’envie de se faire plaisir », souligne Yann Clavillier. Outre leurs estomacs, les visiteurs pourront également faire le plein de culture à Annecy, notamment grâce au festival Annecy Paysage, qui se déroulera sur l’ensemble du territoire annécien du 4 juillet au 27 septembre. Dans la ville, mais aussi sur le lac ou sur ses bords, des œuvres d’art contemporain liées à l’environnement seront exposées. Certaines, comme Fading, une installation vidéo faisant apparaître une maison sur l’île des Cygnes, ne seront visibles que la nuit. Qu’elles soient visibles ou volontairement cachées, leur recherche permettra de les découvrir en même temps que la ville. Un autre événement culturel majeur se déroulera aussi le week-end du 18 et du 19 juillet : la grande ballade. Organisée le long des chemins de randonnée tout autour de la station du Semnoz, elle rassemblera une centaine d’artistes – musiciens, circassiens, comédiens – répartis sur 4 km de la descente. Les visiteurs pourront accéder à la promenade en télécabine, en voiture, à pied ou en navette, avant de descendre le chemin au fil des artistes. « L’aspect culturel est très fort sur notre territoire : ce sont ses multiples facettes qui constituent sa richesse », conclut Yann Clavillier.

 

Le Vinistrot redémarre en fanfare

Plus 25 % de remplissage en juin par rapport à 2019 : c’est l’excellent bilan du Vinistrot, un bar restaurant de l’hyper centre d’Annecy. Il a été créé par Rodrigue Bocquillon et François Stefanaggi, deux anciens des Trésoms, complexe quatre étoiles. « Nous avons eu envie de travailler ensemble », explique Rodrigue Bocquillon. Ils ont ainsi repris une pizzeria du centre-ville pour y créer le Vinistrot, heureux mélange de bons crus et de cuisine locale. À l’origine, l’établissement proposait 50 références de vins, toutes disponibles au verre. Mais les pertes étant trop importantes, ce nombre a été réduit à 15. Pendant le confinement, les deux associés ont transformé le restaurant en marché de producteurs : « Une équipe s’occupait de la livraison dans la ville et l’autre tenait le stand devant le restaurant », souligne François Stefanaggi. Les produits de leur quinzaine de fournisseurs, essentiellement locaux, ont rapidement rencontré du succès : la mairie d’Annecy a relayé l’initiative sur son site internet, et les clients sont venus nombreux faire leurs courses. « Pendant le confinement, on a passé en volume de produits ce que l’on fait en un an ! » constate François Stefanaggi. Des ventes quasiment à prix coûtant qui ont divisé leur marge par quatre mais qui ont aussi permis de « boucher le trou dans la trésorerie ». Mais surtout, cette démarche a amené de nouveaux clients dans l’établissement qui sort ainsi gagnant du confinement. Les deux associés ont même embauché un nouveau salarié et un extra : « La clientèle est toujours très française, ce qui n’est pas habituel à cette époque de l’année, même si ça monte en puissance de week-end en week-end », constate Rodrigue Bocquillon.


Le Vinistrot Annecy
Rodrigue Bocquillon et François Stefanaggi, cofondateurs du Vinistrot.


Le Vinistrot Annecy
Tous les matins, les produits de la quinzaine de producteurs du Vinistrot
sont disponibles à la vente devant l’établissement.

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