Vinora, une étincelle pour les vins de feu

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La semaine dernière, à l’occasion de Vinora, les vins volcaniques du monde étaient conviés à Vulcania pour envisager la constitution d’une grande chaîne de vignerons qui permettrait de mettre en avant les spécificités de ces produits dont le terroir provient des entrailles de la terre.

Le salon Vinora, qui s’est tenu sur le site Vulcania, dans le Puy-de-Dôme, le 30 janvier, a permis de vérifier un postulat : la réalité d’une parenté géologique entre les vignobles volcaniques mondiaux. L’idée germait depuis des années chez Pierre Desprat. Ce négociant, qui dirige également la cave Saint-Verny, apparaît comme une locomotive des vins côtes-d’auvergne. Présent également au niveau commercial dans les vignobles de la grande Auvergne (saint-pourçain, côtes-du-forez, côtes-roannaises, ardèche), il a repéré certaines constantes aromatiques dans ces différentes AOC implantées sur des terroirs volcaniques et a ainsi imaginé que ces caractéristiques pourraient être encore plus largement partagées au niveau mondial. D’où l’initiative de fédérer à travers un salon professionnel les vignerons opérant au-dessous des volcans, qu’ils soient en activité ou éteints. Cette opération, soutenue par la région, le département et de nombreux partenaires, a notamment permis d’organiser un colloque autour de ce fil conducteur de l’influence des terres de lave dans le vin. Outre la présentation du géologue Patrick Marcel, qui a permis de dresser le tableau mondial du volcanisme, deux intervenants, John Szabo, considéré comme le spécialiste des vins volcaniques, et Philippe Faure-Brac, Meilleur sommelier du monde 1992, ont apporté leur éclairage avisé sur cette question.

 

Le géologue Patrick Marcel, Pierre Desprat, Sébastien Naissant (FR3) et Philippe Faure-Brac.

Premier constat : les terres volcaniques sont souvent propices à la culture du vin et cette constante est visible non seulement dans la vieille Europe, là où s’est développée la culture du vin, mais aussi où elle a essaimé par la suite, dans certaines zones du Chili et de la Napa Valley, en Californie. Deux raisons pourraient toutefois expliquer cette association récurrente de la vigne et du volcan : l’inclinaison forte de la pente dans ces zones appréciées pour l’exposition solaire optimisée ainsi offerte, mais aussi la nature des sols. John Szabo, qui a parcouru le monde pour découvrir ces vignobles, a posé un premier dénominateur commun : « Ce sont des vins qui ne sont pas toujours faciles, mais qui présentent des personnalités extraordinaires. » En effet, ce chercheur se refuse à parler du vin volcanique, mais préfère évoquer « des vins volcaniques », qui présentent naturellement des diversités d’influences climatiques, de techniques de culture, d’encépagements (plus de 150 variétés référencées), mais surtout dans la composition des sols, dont l’origine volcanique s’avère très différente d’une faille terrestre à l’autre, avec des teneurs en fer ou en potassium extrêmement variables. En outre, il faut tenir compte de l’état des sols. La coulée de lave, une fois solidifiée, va devoir être érodée au moins durant près d’un siècle et le plus souvent sept siècles pour pouvoir accueillir la culture de la vigne. De même, s’il faut éviter toute généralisation en la matière, « ces vins, indique John Szabo, sont plus savoureux que fruités et il faut aller chercher l’expression végétale. Il y a une salinité et de l’amertume qui constituent leur minéralité ».

John Szabo, grand spécialiste des vins volcaniques.

Philippe Faure-Brac insistait pour sa part sur le caractère fruité et fumé de ces vins de feu, mais mettait en avant les singularités de chacun d’entre eux : les vins de Lanzarote, dont les pieds de vigne poussent dans des petits cratères protégés du vent par des murets, ceux de Santorin, dont les ceps forment des paniers protégeant les grappes du vent et du soleil. Le sommelier a ainsi évoqué l’expression particulière du carmenere au Chili ou encore les tokays extrêmement botrytisés de Hongrie.

« Ce sont des vins qui ne sont pas toujours faciles, mais qui présentent des personnalités extraordinaires. »


Ces démonstrations de spécialistes étaient étayées par la présence de nombreux vignerons français et européens qui ont présenté leurs production et ainsi permis aux professionnels présents d’effectuer un constat gustatif de ces grandes spécificités. Cet événement invite le consommateur à sortir des sentiers battus et à découvrir les expressions très particulières de ces vins volcaniques, car ils expriment d’abord un terroir à une époque où cette notion revient en force. 

Thomas Moussié (Surtep), tonnelier bordelais, fabricant au Portugal, a mis au point un procédé de chauffe de bois breveté, sans brasero, mais avec de la lave portée à 250° qui permet de travailler  le bois sans lui donner un goût trop fumé.

 

Iphigenia Diamantino, représentante du Domaine de Sigalas à Santorin, en Grèce.

 

À Pézenas, les languedoc sont d’origine volcanique, comme en témoignent les vins de Jacques Bilhac, du Domaine de l’Aster.

 

Le vigneron auvergnat Pierre Deshors présentait notamment sa cuvée de pinot TerraO2.



Loïc Gibert présente la cuvée de côtes-du-forez, Coup de tête, signée Louis Tête (Agamy).



La cuvée Navigabio de la cave italienne Ayuna.

 

Tinto Vulcanico, une cuvée des Açores où les rendements n’excèdent pas 10 hl/ha.

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