Whiskey Waterford : de la terre au verre

  • Temps de lecture : 3 min

Les cuvées parcellaires sont monnaie courante depuis plusieurs années dans l’univers viticole. Aujourd’hui, la distillerie irlandaise Waterford fait le pari de transposer cette technique à l’univers des whiskeys avec ses Single Farm Origins, des cuvées provenant chacune d’une seule et unique ferme.

«Avec Waterford, j’ai vu une opportunité de faire une différence sur le marché du whiskey irlandais, pour l’instant distillé à 80 % par seulement cinq maisons. » Faire fide la norme et développer ses propres projets, tel est le credo de Mark Reynier, le P-DG de la distillerie Waterford. L’ex-négociant en vins et ancien propriétaire de la distillerie écossaise Bruichladdich, en bon touche-à-tout de l’univers des spiritueux, a développé une série de whiskies en cuvée parcellaire, chacun étant élaboré avec l’orge d’une seule ferme. Avant de se lancer dans cette aventure, l’homme d’affaires anglais a mûrement réfléchi à son projet. Avant de revendre Bruichladdich au groupe Rémy-Cointreau en 2012, il avait commencé à expérimenter le concept de terroir sur place en Écosse, convainquant plusieurs paysans locaux de faire pousser de l’orge. Mais le climat comme les moyens qu’ils possédaient n’étaient pas suffisants pour faire aboutir l’expérience comme il le souhaitait. Le choix de l’Irlande pour l’implantation de sa nouvelle distillerie s’est imposé pour plusieurs raisons. La qualité de l’orge, en premier lieu, le climat du sud-est de l’Irlande – plus doux et ensoleillé – profitant plus à la plante.

« L’orge écossais est la meilleure du monde, c’était l’idéal pour pousser nos recherches sur le terroir », affirme le fondateur de Waterford. Le rachat d’une brasserie Guinness (Diageo) abandonnée en 2014, au prix de 7,2 M€, lui a permis d’acquérir une base solide pour sa distillerie. « Le brassage et la fermentation sont déjà les deux tiers du procédé de fabrication. » Il parfait ensuite son installation avec deux alambics rachetés par ses soins. Les bases alors posées, l’expérimentation débute. Rapidement, la distillerie Waterford noue des liens avec des agriculteurs locaux. Au-delà de l’aspect financier, elle les accompagne au quotidien dans la culture de leur orge par l’intermédiaire de Grace O’Reilly, une ingénieure agronome qui les conseille sur les variétés choisies et leur culture. Les collaborations évoluent et se renforcent d’année en année : depuis 2014, c’est une petite centaine de fermiers qui a tenté l’expérience, à raison de 40 fermes par an. « Pour 2020, nous avons beaucoup de jeunes fermiers qui rejoignent l’aventure, certains ont des exploitations en bio ou en biodynamie », se réjouit Mark Reynier. Une fois récoltée, l’orge est maltée à la malterie Minch, à Kilkenny au sud-ouest de Dublin. Chaque récolte est ensuite fermentée longuement – jusqu’à une semaine – puis distillée. Durant toutes ces étapes, un traçage minutieux est effectué pour que l’orge de chaque ferme conserve ses qualités propres. La production s’élève pour l’instant à 1,1 million de litre par an. Les distillats obtenus sont étonnants : les whiskeys élaborés avec des orges provenant de fermes situées à quelques kilomètres les unes des autres présentent des profils aromatiques complètement différents. Preuve s’il en est que comme pour le vin, la terre et le microclimat de chaque parcelle ont leur importance.

PARTAGER