Café bio : un argument de poids
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Les torréfacteurs s’inscrivent dans une démarche vertueuse : commerce équitable et éthique, protection des sols jusqu’à la gestion des emballages et déchets, le café devient écoresponsable du grain à la tasse. Porter ce type de discours présente un grand intérêt pour les restaurateurs.
Les produits bio décollent en restauration : en 2019, tous secteurs confondus, ils enregistrent une progression de 22 % en France.
Sur le marché du hors domicile, 78 % des Français souhaitent que l’offre bio se généralise et 83 % d’entre eux déclarent ainsi accorder une grande importance à leur alimentation (source Gira). Ces chiffres témoignent qu’au-delà d’être une simple mode, « le bio est une tendance de fond qui s’inscrit dans un profond changement sociétal, aussi bien en GMS qu’en CHR, soulève Nicolas Peyres-blanques, directeur général de Segafredo Zanetti France. Cette dynamique touche de façon globale la filière, elle s’étend donc naturellement au café ».
La catégorie enregistre ainsi une croissance de 32,8 % en volume et 40 % en valeur pour les ventes de produits bio, ces références pesant aujourd’hui 4,7 % du segment du café torréfié et ayant généré un CA de 102 millions d’euros en 2019 (source : Nielsen P11 2019). Cette tendance démarrée en GMS s’étend aujourd’hui à la restauration : « Il y a une prise de conscience de la part des restaurateurs qui ont tout intérêt à proposer du bio et de l’équitable pour, d’une part, éviter de se lancer dans une guerre de prix inutile, car en apportant un produit qualitatif qui a du sens on sort du lot et le prix s’en trouve impacté, et d’autre part, cela répond à la demande des consommateurs », estime Jean-Pierre Blanc, directeur général des cafés Malongo.
Le bio, une histoire de consommateurs
Mais si le « bio » est plébiscité par les clients occidentaux, il ne l’est pas du tout par les producteurs de café. Tout simplement parce que cultiver en bio implique de ne plus utiliser d’intrants de synthèse pour protéger les caféiers des nombreuses maladies, comme la rouille, qui se propagent à grande vitesse avec la crise climatique. Pour les producteurs, passer à ce type d’agriculture signifie donc une perte potentielle de revenus et un risque de devoir abandonner la culture du café. D’où l’intérêt d’amener les fermes progressivement vers la culture biologique, en passant d’abord par l’adoption de pratiques agricoles durables qui les rendent plus résistantes face aux maladies notamment. C’est la démarche entreprise par les torréfacteurs leaders sur le segment du café en hors domicile. Segafredo Zanetti a, par exemple, tissé des liens privilégiés avec ses producteurs au Costa Rica et au Brésil, ainsi qu’avec des fermes labellisées et certifiées au Pérou et au Honduras.
Le groupe détient aussi sa propre exploitation sur le site de Kauai, à Hawaï. Les cafés certifiés représentent aujourd’hui 25 % de son offre. Cafés Richard est également très engagé « dans le respect des hommes du grain à la tasse », relève Aude Vrana, directrice marketing. « Dans notre collection de grand cru, nous avons des cafés certifiés bio et bio équitable. Nous sommes leaders depuis 15 ans sur ce volet équitable en hors domicile, c’est inscrit dans nos gènes. Nous sommes engagés dans la démarche Act & Respect de la société Lobodis qui encourage une agriculture responsable et maîtrisée. Il s’agit d’accompagner en direct les petits producteurs et coopératives, d’améliorer leurs conditions de travail, leur accès à l’éducation, optimiser la culture en protégeant la nature, tout en leur assurant un prix minimum. »
Illycaffè adopte également une approche holistique dans le but d’assurer une continuité dans la production avec l’impact le plus bas possible sur l’environnement : « Elle repose sur trois piliers : garantir une constance qualitative du café pour nos clients CHR, aider les producteurs à vivre de leur travail tout en les faisant évoluer vers de nouvelles techniques avec l’aide de nos équipes d’agronomes sur le terrain et réduire l’impact de leurs actions et des techniques utilisées sur le sol », commente Frédéric Ermacora, directeur général. D’ailleurs, l’organisation du concours Ernesto Illy International Coffee Award, qui en est à sa cinquième édition cette année, est une façon de célébrer les producteurs d’Illycaffè qui s’engagent à produire un café de qualité en respectant ses trois piliers, et traduit l’engagement de la société à améliorer la vie des producteurs.
« L’écoresponsabilité n’est ni un atout ni une option, mais une condition sine qua non. »
Frédéric Ermacora, directeur général d’Illycaffè.
Pour Malongo, le commerce équitable est indispensable car « il offre une meilleure durabilité dans le temps à une coopérative », selon son directeur général Jean-Pierre Blanc. « On suit une quarantaine de coopératives depuis 1992 en Afrique, en Asie, en Birmanie et au Mexique, dont une quinzaine de façon approfondie. Nous travaillons la thématique de la biodiversité avec eux, nous disposons d’équipes sur le terrain pour améliorer leur rentabilité et leur productivité. Nous avons monté au Mexique un centre de formation à l’agriculture biologique, et au sein d’une coopérative au Laos nous produisons 1 000 tonnes par an d’engrais biologiques pour augmenter les rendements. »
Fort de son statut précurseur du café équitable en France et de son expérience de presque 20 ans, Malongo dispose aujourd’hui d’une offre d’une quinzaine de références en grains (blend) et une dizaine de doses au sein de son portefeuille. Quant à Nespresso Professionnel, la préservation des écosystèmes tout en assurant aux producteurs des conditions de vie décentes, est l’enjeu de son programme AAA pour une qualité durable. Coconçu avec l’ONG Rainforest Alliance, il rassemble aujourd’hui plus de 100 000 producteurs de café dans 13 pays. Concrètement, Nespresso forme ces fermiers aux pratiques agricoles durables avec des règles très strictes sur l’utilisation de l’eau et la limitation des intrants de synthèse sur la ferme, sur la plantation d’arbres au cœur des exploitations pour améliorer la qualité des sols, de la biodiversité et du café. Ces méthodes agricoles durables permettent aux grains de café vert récoltés d’être de meilleure qualité, et donc d’être vendus plus cher. Nespresso paie d’ailleurs le café de ses producteurs partenaires 30 à 40 % de plus que le prix du marché, récompensant ainsi la qualité et la durabilité de ce café cultivé.
« L’enjeu est d’amener les fermes progressivement vers la culture biologique, en passant d’abord par l’adoption de pratiques agricoles durables. »
Mais les torréfacteurs ne se contentent pas d’accompagner leurs producteurs dans une agriculture responsable, ils sont aussi investis dans une démarche plus globale permettant de suivre le cycle de vie du café du grain jusqu’à la tasse.
Démarche RSE globale
Segafredo Zanetti France organise une approche intégrée de la RSE : il a signé en 2016 le Pacte mondial des Nations unies (protection de l’environnement, consommation responsable, économie positive et engagement territorial), et a réaffirmé cet engagement en 2020. Cela se traduit par de multiples actions comme la réutilisation des sacs de toile de 60 kg contenant le café vert, l’abandon de l’aluminium et le lancement d’emballages en polyéthylène entièrement recyclables sur 20 à 25 % de sa gamme avec un objectif à 80 % en 2022.
« Notre démarche RSE a été reconnue par Ecovadis en nous décernant la médaille Platinium qui récompense le TOP 1 % * des entreprises les plus engagées et les plus performantes en RSE. Une récompense qui fait sens avec notre engagement », se réjouit Nicolas Peyresblanques, directeur général. Pour Cafés Richard, si la démarche vertueuse débute par la qualité des sols, il est essentiel de suivre le cycle de vie du produit et de savoir gérer les déchets.
« On a développé une gamme de capsules compatibles Nespresso sans aluminium, à partir de fibres végétales et compostables et des produits annexes tels que des gobelets eux aussi compostables. Par ailleurs, nous recyclons le marc de café pour en faire du compost, nous poussons la logique jusqu’au bout », décrypte Aude Vrana. Chez Illycaffè, les équipes sont persuadées que ce sont des petites choses qui font la différence pour atteindre l’objectif de produits sains et durables, et en ont fait un slogan « One makes the difference ». Cette initiative s’inscrit dans son plan global de durabilité « avec pour objectif ultime de devenir neutre en carbone d’ici 2033, la première étape étant l’élimination d’environ 175 tonnes de plastique par an », souligne Frédéric Ermacora, directeur général. L’avenir se prépare aujourd’hui : les torréfacteurs possèdent un atout majeur, celui d’avoir une vision à 360 °C qui part du caféier jusqu’à sa transformation dans un bar.
Note
* Base 45 000 entreprises.