Luxembourg : la reprise timide du Grand-Duché
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Comme ses pays voisins, le Luxembourg a subi et subit encore de plein fouet les conséquences de la pandémie de coronavirus. La longue absence de la clientèle business, partie intégrante de l’écosystème CHR luxembourgeois, a lourdement impacté l’activité touristique du petit pays européen.
Il ne faut pas avoir peur de dire que le Grand-Duché du Luxembourg n’est pas qu’une place financière. Le petit pays européen, d’une superficie de 2 586 km², est bien plus que cela. Il abonde d’endroits insolites à découvrir, le temps d’un week-end. La région du Mullerthal, aussi surnommée la petite Suisse luxembourgeoise, en est le symbole. Dans ce petit coin reculé, situé dans l’ouest du pays, se nichent d’impressionnantes cascades qui font le charme et la singularité du lieu. La capitale, avec ses vieilles ruelles, son quartier du Grund situé en contrebas et ses étendus de verdure n’est pas en reste non plus.
Ces lieux atypiques accueillent de nombreux touristes et font le charme de cette métropole cosmopolite. La ville de Luxembourg héberge d’ailleurs pas moins de 170 nationalités différentes. Outre ces lieux touristiques, le pays regorge également de restaurants étoilés où la gastronomie française y est sublimée. Haut-lieu culinaire, le Grand-Duché du Luxembourg peut se targuer d’avoir le plus grand nombre de restaurants étoilés au guide Michelin par habitant.
Encore assez méconnu, le Luxembourg dispose aussi d’un vignoble aux coteaux pentus le long de la Moselle. Et ce dernier n’a rien à envier à certains vignobles du pays du vin. Chaque année de nombreux touristes européens notamment néerlandais et belges se pressent pour découvrir les trésors luxembourgeois. 2,85 millions de nuitées ont été passées en structures touristiques au Luxembourg en 2019. Ce chiffre passe à 1,55 million en 2020 et chute ainsi de 50 % à cause de la pandémie de coronavirus. À la date du 30 juin 2021, le taux d’occupation des hôtels est de 38 % et de 51 % dans les campings au Luxembourg.
Des clients qui se font rares
« Nous sommes très dépendants des touristes étrangers, la reprise est donc relativement modérée », confie Sebastian Reddeker, PDG de Luxembourg for Tourism. La clientèle business fait en grande partie vivre l’écosystème CHR de la capitale luxembourgeoise. Les voyages d’affaires au Luxembourg étaient très fréquents et permettaient au secteur hôtelier de bénéficier d’une fréquentation constante en hiver. Mais la pandémie de coronavirus est arrivée, rendant quasi impossible les trajets entre les pays.
Aujourd’hui encore, les clients se font rares. « Pour les hôtels de Luxembourg qui se reposent essentiellement sur une clientèle business, la reprise est laborieuse. Le taux d’occupation de ces établissements ne dépasse pas les 35 % pour ceux qui travaillent bien. Pour les autres, il peine à atteindre les 20 %. Par rapport à 2019, c’est un recul de chiffre d’affaires de 45 % voire de 60 % », souligne François Koepp, secrétaire général de l’Horesca (Fédération Nationale des Hôteliers, Restaurateurs et Cafetiers du Grand-Duché de Luxembourg). « Nous estimons qu’⅓ des touristes business ne reviendront plus du tout. Par contre, nous sommes conscients que ceux qui voyagent vont bien choisir leur hébergement et profiter davantage de ce temps », poursuit Sebastian Reddeker.
De grandes disparités
L’absence de cette clientèle a également des conséquences directes sur l’activité des restaurants. Les professionnels du secteur confirment que le retour des clients n’a pas été aussi massif qu’espéré. Même si ce n’est pas une vérité pour tous les établissements. Il existe de grandes disparités entre les régions.« Tous les restaurants ne sont pas dotés de la même chance. Par exemple, un établissement situé dans un quartier économique où les sociétés sont nombreuses, n’a pas une activité pleine car le télétravail est encore très pratiqué. L’activité de ces entreprises tourne plutôt autour de 50 – 60 % du chiffre d’affaires habituel »,explique François Koepp.
Séverin Laface, emblématique créateur de l’immense espace culinaire aux notes italiennes – Come à la Maison peut l’attester. Son établissement fait face à d’imposants bâtiments banquiers et est devenu au fil du temps la cantine privilégiée de nombreux employés. Avec la crise sanitaire et la démocratisation du télétravail, le quartier s’est vidé de ses cols blancs et par conséquent de ses amateurs de cuisine italienne. « Au sein de Come à la maison, nous avons un espace sandwicherie très plébiscité par les personnes qui souhaitent manger rapidement le midi. En temps normal, nous servons en moyenne 350 clients par jour. Actuellement, on peine à atteindre les 80. Seulement 28 % des employés de la banque voisine sont revenus », confirme le gérant de Come à la maison.
Des hôtels s’en sortent
Certains établissements arrivent néanmoins à tirer leur épingle du jeu. C’est notamment le cas du Mondorf Parc Hôtel. Situé dans un parc de 42 hectares à Mondorf-les-Bains (seule station thermale luxembourgeoise), l’hôtel 4* est divisé en deux établissements. Le premier est composé de 108 chambres et l’autre de 21 chambres. Depuis le 15 juin et l’arrêt des restrictions, l’hôtel connaît un regain d’activité relatif. « Actuellement, nous sommes à 20 % en dessous des chiffres de 2019. Mais je pense atteindre le budget que nous avions réestimé au mois de juillet. Ce qui n’est pas trop mal. L’offre thermale nous a clairement sauvée, sinon nous serions dans la même situation que nos collègues à Luxembourg », analyse Patrick Le Meur, directeur du Mondorf Park Hôtel.
Coup de pouce du gouvernement
Pour booster le tourisme domestique et aider les hôtels à traverser la crise, le gouvernement du Grand-Duché du Luxembourg a distribué aux résidents et aux travailleurs frontaliers un bon d’achat de 50 € à utiliser pour une nuitée dans une structure hôtelière au Luxembourg. Cette remise a encouragé de nombreux résidents à sauter le pas. En 2020, les nuitées touristiques au Luxembourg ont été multipliées par six du côté des résidents. « Cette réduction à utiliser dans le secteur hôtelier a eu un effet très bénéfique sur notre activité. Nous avons découvert une nouvelle clientèle : des résidents ou des clients frontaliers qui n’avaient pas ni les besoins ni l’envie de dormir dans un hôtel à 20km de chez eux », observe le directeur du Mondorf Parc Hôtel.
La multitude des activités extérieures et la bonne connexion en TGV avec Paris a su également faire venir davantage de Français (+ 22 %) que les autres années. Mais le secteur hôtelier luxembourgeois reste très fragile. Le secrétaire général de l’Horesca, François Koepp, attend donc un nouveau coup de pouce du gouvernement, en ce qui concerne les aides étatiques. « J’ai tendance à dire que la période que nous avons traversée est la plus difficile depuis la Seconde Guerre mondiale. Mais ce n’est pas encore terminé. Les conséquences vont se faire sentir encore pendant quelques années. C’est pour cela que nous souhaitons que les aides étatiques soient maintenues jusqu’à fin 2021 » Selon lui, la survie de nombreux établissements en dépend.
La dolce vita de Séverin Laface
Après 35 ans dans le commerce, Séverin Laface décide de se tourner vers la restauration en 2014. Il transforme alors son magasin de 2 000 m², installé dans l’ancien garage Muller-Opel bien connu des Luxembourgeois, entiers-lieux culinaire aux notes italiennes. Ce dernier accueille divers espaces pensés pour faire vivre aux clients des expériences différentes. Un corner met ainsi à l’honneur les foccacia, un autre les pizzas ou encore les desserts. Come à la maison peut recevoir jusqu’à 600 clients. En plus de ce food court, Séverin Laface vient de reprendre la Rôtisserie Ardennaise avec le chef François-Xavier Ferrol aux commandes. Il a aussi ouvert très récemment une épicerie italienne nommée Mercato.