La première journée de réouverture des terrasses a tenu toutes ses promesses, avec en point d’orgue une soirée ensoleillée où les clients ont définitivement été au rendez-vous. Un soulagement pour beaucoup de professionnels.
Mercredi matin, un air de fébrilité règne rue des Pyrénées. Dans les bars qui bordent la deuxième plus longue rue de Paris, les clients et les patrons retrouvent leurs habitudes. Les cafés fument, les discussions s’engagent. « Quel plaisir de voir tous ces gens en terrasse, ça fait du bien ! » Cette phrase, presque trop banale, a été potentiellement celle prononcée le plus de fois ce mercredi 19 mai, et décrit bien le sentiment général : « enfin ».
Dans les cafés, certains patrons prennent deux minutes pour retrouver leurs clients, renouer le lien. Les autres, plus nombreux, courent, nettoient, organisent et prévoient. « Je n’ai pas le temps, désolé », sera la deuxième phrase que nous avons le plus entendue ce matin-là. Et on peut les comprendre, après des mois de fermeture, ce nouveau départ signifie bien des fois de tout reprendre à zéro. « C’est comme si on rouvrait pour la première fois », confirme le serveur d’un café-bistrot à deux pas du grand paquebot rouge du ministère de l’Intérieur (Paris 20).
Place de la Comédie, Paris.
Rue de Charonne, boulevard Voltaire, place de la Comédie… Se répètent inlassablement les mêmes scènes, « normales » avant la covid. Certains clients attablés en terrasse prennent quelques minutes supplémentaires, cigarette au bec, et recommandent un deuxième espresso, quitte à arriver en retard au travail. « On prend notre temps, de toute façon le patron doit sûrement faire la même chose que nous, et tout le reste de l’entreprise d’ailleurs », plaisante l’un deux. Un air de fête nationale plane, comme un jour rendu à moitié férié par la réouverture tant attendue des bars et cafés.
Arrive le temps des restaurants
Arrive le service du midi, et avec lui, les averses entrecoupées d’éclaircies timides. Peu importe, les clients sortent les parapluies. Les images qui tournaient en dérision une réouverture pluvieuse deviennent réalité, et pourtant les clients continuent d’affluer. « On a réservé, ça fait des mois qu’on attend ça, on ne va pas se laisser abattre par quelques gouttes », sourit Thierry, trempé, mais heureux.
Paris 10
« Nous sommes venues prendre un verre de manière très spontanée après avoir vu un rayon de soleil, lancent Julie et Suzanne, attablées au bord de l’eau, au Petit Carillon (Paris 10). C’est un grand plaisir. Nous pensions que ça allait être une catastrophe avec la pluie mais finalement de nombreux clients se sont déplacés. C’est super ! Le temps aurait malgré tout pu faire un effort pour cette réouverture. »
Le Valmy, Paris 10
À deux pas de là, Arthur, gérant du restaurant Le Valmy, sourit. « Nous sommes tous très heureux de cette réouverture. Nous avons déjà pas mal de clients en terrasse, c’est un peu le rush entre la vente à emporter et l’espace extérieur. Mais c’est un grand bonheur. » Un des clients, Anatole, enchérit : « Tant qu’il fait beau, je suis heureux. Mais le temps reste très incertain aujourd’hui. J’ai surtout hâte de pouvoir prendre un verre avec des amis à l’abri ! »
Hymne à Bacchus
On l’anticipait, cette pluie, sensée ruiner une réouverture tant espérée. Pourtant, à 17 heures, une bourasque vient chasser les nuages, et les rayons du soleil dévoilent un spectacle déchainé. La jauge des 50 % en terrasse, qui avait tenu bon jusque-là, finit par céder par endroits. Boulevard Bonne Nouvelle, jeunes et plus âgés commandent tournée sur tournée, un état d’ébriété collectif s’installe. Paris ne marche plus droit, mais Paris frétille, danse, chante dans les rues, sur les terrasses.
Boulevard Bonne Nouvelle, Paris 2
Des « Hip hip » sont lancés à tort et à travers, des verres sont cassés. Regard inquiet vers le serveur, d’ordinaire peu friand de ce type de soirée. Mais même les professionnels rient et sourient de voir ce défoulement collectif. Pas sûr que cela dure, mais le temps d’une soirée, le pari a été tenu, et la réouverture a fait oublier la Covid et autres malheurs. Pourvu que cette parenthèse enchantée ne soit pas celle qui nous fasse replonger dans quelques mois, mais en attendant, le succès est là.