Florent Piard, le résistant

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Depuis 2015, Florent Piard met en lumière l’agriculture paysanne et les virtuosités qui émanent de l’approvisionnement en circuit court. En véritable pionnier sur les thèmes liés à l’alimentation durable, ce jeune restaurateur nous montre à chacun de ses services qu’une autre restauration est possible.

Florent Piard
Florent Piard. Crédit : Nina Coriton.

«Hormis mes enfants, ma femme et mes copains, la question de l’alimentation occupe 100% de ma vie», déclare Florent Piard, restaurateur et fervent militant de l’agriculture paysanne. Fondateur des établissements Les Résistants, La Table des Résistants, auxquels sont venus se greffer avec les années Le Comptoir et une Épicerie-cave – tous installés dans le 10e arrondissement parisien – il est l’un des pionniers du circuit court et du sourcing pointu dans le secteur de la restauration.

À ses tables, les plats sont beaux, bons et surtout vertueux : ils sont exclusivement préparés avec des produits savamment sélectionnés pour leur naturalité, issue du bon sens paysan. « La plupart des restaurants utilisent uniquement des légumes hybrides dont la semence a été appauvrie génétiquement pour, par exemple, qu’une tomate tienne longtemps dans le frigo. Chez nous, tu ne trouveras aucun fruit ou légume hybride. Nous n’utilisons que des produits issus de semences paysannes. C’est un combat que l’on mène depuis près de dix ans maintenant », clame fièrement le restaurateur.

L’homme qui murmurait à l’oreille du monde agricole

D’ailleurs, Florent Piard est sans doute devenu le Parisien qui murmure le mieux à l’oreille du monde agricole. Après avoir obtenu une rupture conventionnelle dans le secteur de la finance en 2015, il décide de sillonner la France durant plus d’un an pour rencontrer celles et ceux qui font l’alimentation d’aujourd’hui… tout en pensant à celle de demain. « Lorsque j’ai commencé, peu de personnes allaient sur le terrain. Les producteurs étaient peu balisés. Tout passait par le bouche-à-oreille, c’était très chronophage. Maintenant, si tu cherches des animaux de races locales très spécifiques, tu peux très facilement trouver des organisations avec un listing entier de producteurs », assure Florent Piard. Dès lors, il passe beaucoup de temps avec les producteurs. « Ce qui est important, c’est de savoir ce que tu recherches. Il faut, je pense, être d’abord très passionné. Je passe beaucoup de temps dans les réunions syndicales, et cela me permet de toujours continuer à apprendre sur le monde agricole », déclare-t-il. Au fil des années, Florent Piard a continué d’affiner sa réflexion. « Je pense différemment aujourd’hui qu’il y a sept ou huit ans. Désormais, ce qui est central pour moi, c’est que les producteurs soient intégrés à un système qui rémunère bien », affirme le restaurateur.

"Ce qui est central, c'est que les producteurs soient intégrés à un système qui rémunère bien."
Florent Piard, Restaurateur

S’il ne vient pas du milieu de la cuisine ni de celui de l’agriculture, le monde agricole, il l’a finalement toujours eu dans la peau. Enfant, Florent Piard passe toutes ses vacances chez ses grands-parents, au cœur de la campagne normande. « Tous leurs copains étaient éleveurs et cela m’arrivait d’aller les aider. C’est quelque chose qui m’a toujours plu », confie-t-il. Les quatre lieux qu’il a créés sont intrinsèquement liés. « Je fais les choses pour apporter réellement et sincère- ment quelque chose à notre système. Ouverte depuis deux ans, l’épicerie nous permet de faire rentrer plus de maraîchers. Au restaurant, on va, par exemple, écouler 10 kg de fraises par semaine, alors que l’épicerie en écoulera 120 », explique Florent Piard. Aujourd’hui, il travaille avec plus de 150 fermes indépendantes différentes, sélectionnées sur des critères très précis. « La liste est longue mais il est évidemment indispensable que les productions des personnes avec lesquelles nous travaillons soient certifiées bio », souligne ce restaurateur engagé. Enfin, si Florent Piard n’est pas pessimiste, il tire néanmoins la sonnette d’alarme : « Il y a un vrai recul de l’agriculture biologique. Le client lambda ne perçoit que 10 % du travail que nous faisons avec Les Résistants. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons fait un podcast : il faut mettre en lumière tout ce que cela représente ».

Une véritable idéologie

Si les thèmes qu’il traite ne semblent pas les plus porteurs commercialement, « cela reste ce en quoi je crois fondamentalement. Notre agriculture devra changer et la restauration aussi. Elle a d’ailleurs déjà commencé à le faire un peu socialement. Je suis persuadé que si tu fais quelque chose de bien, cela attire les clients. Et si tu reçois bien chaque client, il n’y a pas de raison que cela ne fonctionne pas », soutient le restaurateur. Après le 10e arrondissement de Paris, Florent Piard s’est lancé dans un nouveau projet en Bretagne. Accompagné de Grégoire Desnoulez, un ami maraîcher, il œuvre sur la réhabilitation de landes secondaires. « Ce sont 6 ha dans une zone naturelle qui vont en devenir bientôt 20. Ces terres ont été entretenues depuis des millénaires par l’homme, elles nécessitent d’être appauvries. Il y aura une partie agricole, un peu d’arboriculture et un restaurant au milieu. Le restaurant valorisera tout ce qui sera produit directement ici », indique Florent Piard. Ce projet, dont l’ouverture est prévue pour mars 2025, est soutenu par Nature 2050 et la Fondation Patrimoine. Il permettra, en outre, de conserver certaines plantes endémiques de la région.

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