Dinde rouge des Ardennes, le prestige retrouvé

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La dinde rouge des Ardennes ne comptait plus, dans les années 1980, qu’une cinquantaine de représentants. Grâce au travail d’un éleveur passionné, cette race ancienne est aujourd’hui sauvée. Tant mieux, car elle a tout pour régaler les amateurs de belles volailles.

dinde rouge
Doté d’un plumage roux, la race dinde rouge des Ardennes se distingue par une croissance plus lente et de très belles qualités gustatives. Crédit : DR.

Introduite dans les Flandres par les Espagnols au XVIe siècle, la dinde rouge des Ardennes est une rescapée. Élevée pendant plusieurs siècles dans toutes les basses-cours de la région, la race a frôlé l’extinction. Après la seconde guerre mondiale, la dinde bronzée d’Amérique et le dindon blanc de Hollande, jugés plus productifs, se développent au détriment de cette race à croissance lente.

A tel point qu’il ne reste plus, en 1985, qu’une cinquantaine de dindes rouges dans les fermes ardennaises. « C’est à cette époque que Jean-Michel Devresse, aviculteur à Auge, s’y est intéressé, raconte Cyriaque Godefroy, lui-même éleveur de dindes rouges à Renneville, au nord de Reims. Il achète son premier dindon et deux dindes chez un vieil agriculteur sedanais. À force de croisements et en évitant soigneusement toute consanguinité, il a réussi à faire revivre cette race au beau plumage couleur de rouille et à la chair savoureuse. Dans mon propre élevage, toutes mes dindes et mes dindons sont des descendants de ce mâle et ces deux femelles! »

Souhaitant partager les bénéfices de cette résurrection, Jean-Michel Devresse se fait l’ambassadeur de la dinde rouge des Ardennes auprès d’autres agriculteurs qui le rejoignent pour se lancer dans l’aventure. Une association de producteurs est créée en 2006.

Des efforts récompensés

La filière reste malgré tout modeste. «Nous sommes actuellement six adhérents en Champagne-Ardennes, mais il y a d’autres éleveurs dans l’Aisne, la Somme, le Nord et en Normandie, précise Cyriaque Godefroy. Ce n’est pas le terroir qui fait la spécificité, c’est la race. C’est d’ailleurs pour cela que n’avons pas d’IGP. » La consécration arrive en mars 2016. Au Salon de l’Agriculture, l’association reçoit le premier prix national de la Fondation du Patrimoine pour l’agro-biodiversité animale, récompensant ainsi les efforts menés pour préserver les races agricoles françaises à faible effectif. À sa retraite, Jean-Michel Devresse transmet son savoir-faire à Isabelle et Cyriaque Godefroy. Le couple reprend la partie commerciale de l’exploitation, avec de la vente de dindes et de dindons prêts-à cuire, mais aussi des produits transformés et de la découpe surgelée. Volaille d’exception, la dinde rouge des Ardennes suit un mode d’élevage traditionnel.

« Nous démarrons en avril pour un abattage vers Noël. Les animaux reçoivent un aliment complet et équilibré et ont accès à des parcours en plein air. S’ensuit une période de finition de cinq semaines pendant laquelle nous les nourrissons à volonté avec des farines de céréales et du lait. Ce régime donne une fibre de viande ferme, avec de la mâche et de la graisse intramusculaire pour plus de goût et de moelleux à la cuisson. » Autrefois consommée traditionnellement à la Saint-Martin, en novembre, la dinde rouge est aujourd’hui appréciée au moment des fêtes. « En prêt-à-cuire, nous valorisons surtout la dinde, qui pèse 3,5 kg de poids carcasse contre 6 kg pour un dindon. Elle convient bien à des tablées de huit-dix personnes. » Son prix est de 18 €/kg.

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