La digitalisation, bouée de secours des restaurants

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En constante augmentation depuis le début de la crise sanitaire, la digitalisation des établissements CHR est devenue indispensable pour survivre. Le Gouvernement l’encourage vivement en promettant une aide de 500 € aux commerçants pour les aider à franchir ce cap. Des aides régionales peuvent aussi compléter le financement. Nous avons recensé un certain nombre de solutions disponibles, faciles à mettre en œuvre et efficaces.

Bruno Le Maire l’a qualifiée d’« enjeu absolument majeur ». La digitalisation des commerces français, en marche depuis plusieurs années, s’est considérablement accélérée avec la crise sanitaire. Le ministre de l’Économie a annoncé une aide de 500 € pour permettre aux commerçants d’exercer sur la toile, dont le versement est prévu pour janvier 2021. Car sans présence en ligne, impossible de pratiquer sérieusement la vente à emporter et la livraison, devenues vitales pour les commerces considérés comme non essentiels.

Lors du premier confinement, la vente à emporter a représenté jusqu’à 80 % du chiffre d’affaires des restaurateurs sur les mois d’avril et mai (*). Avec ce deuxième confinement débuté le 30 octobre, les sollicitations des consommateurs se multiplient. Sur les dix premiers jours du confinement, CentralApp, spécialiste des sites internet de restaurants, a enregistré près d’un doublement du volume de trafic sur ses sites français. Les demandes de ventes à emporter ont connu une augmentation de 315 % et celles de livraisons se sont envolées avec + 1 546 % ! Les clients sont donc au rendez-vous, et leur profil est différent du fait du reconfinement, qui a changé en profondeur le comportement des consommateurs français.

« Il y a plus de personnes qui sont restées à Paris et dans les grandes villes comme Lyon et Bordeaux, du fait de la scolarisation des enfants notamment », analyse Hugo Porcher, chef des opérations pour l’application Choco France, qui permet de centraliser les échanges entre restaurateurs et fournisseurs. Il constate également qu’un plus grand nombre de restaurants restent ouverts, comparé au printemps : « Cet automne, 50 % des clients de l’application Choco sont inactifs. C’est une perte moindre comparée au premier confinement, où ce chiffre s’élevait à plus de 80 %. »

Aide-aux-restaurateurs.fr, une plateforme pour gagner en visibilité

Pour aider les restaurateurs à gagner en visibilité sur la toile, l’application Choco et cinq acteurs de la foodtech – Tiller System, Central App, Deliveroo, Skello, Swile – ont relancé collectivement la plateforme Aide-aux-restaurateurs.fr. Gratuite, elle permet aux restaurants poursuivant leur activité en VAE ou livraison d’être recensés sur le site. Les particuliers qui le visitent peuvent y sélectionner les établissements qui les intéressent et sont ensuite redirigés vers ces derniers. Lors de son lancement au premier confinement, 1 700 restaurateurs s’étaient inscrits sur la plateforme, qui avait généré 120 000 visites et 50 000 actions (commandes ou appels lancés via le site). Pour cette reprise, près de 650 inscrits ont rejoint la plateforme dès la première semaine d’activation. Destinée à tous les profils de restaurateurs, Aide-aux-restaurateurs est aussi accessible aux établissements dépourvus de site internet. « Pour rejoindre la plateforme, les restaurateurs disposent d’un formulaire sur le site qui leur permet de rentrer toutes leurs informations sur leur profil. Il faut ensuite quelques jours pour traiter la demande en interne. Pas besoin d’avoir un site du moment que vous possédez un système de click and collect, de livraison ou de commande par téléphone », explique Hugo Porcher.


Capture d’écran du site aide-aux-restaurateurs.fr

D’autres plateformes fonctionnent sur le même principe, aussi bien à l’échelle locale que nationale. C’est le cas du site internet caresteouvert.fr, également disponible sous forme d’application mobile gratuite. Mise en ligne le 25 mars dernier, cette carte interactive fondée sur les données d’Open Street Map permet à chacun de renseigner les horaires d’ouverture et les services proposés d’un établissement durant le confinement. Les recherches permettent de sélectionner le type d’établissement souhaité, dont les restaurants. Des onglets « ventes à emporter » et « livraison » ont également été ajoutés aux critères de recherche.

Vente à emporter, livraison : des outils plus accessibles que jamais

Pour se lancer dans la vente en ligne, il n’est plus nécessaire de passer par les services d’un informaticien pour créer un site internet. De nombreuses entreprises offrent la possibilité de mettre en place la VAE et la livraison, avec ou sans création de site internet. C’est le cas de No Show, une solution digitale créée par les Lyonnais Alexane et Charlie Roux. Conçue initialement pour éviter les réservations non honorées par les clients, elle permet désormais de mettre en place la vente à emporter dans son établissement en quelques clics. Le restaurateur inscrit peut également renseigner ses créneaux de livraison, en propre ou via des courtiers : le client souhaitant se faire livrer peut ainsi voir s’il a accès au service en rentrant son adresse.

Alexane et Charlie, fondateurs de No Show

« Pour des clients qui ont des paniers moyens importants, la livraison peut être très intéressante », constate Alexane Roux, cofondatrice de No Show. Elle cite l’exemple du chef Serge Vieira, qui, outre le click and collect , propose les plats de son second restaurant, Sodade (Chaudes-Aigues, Cantal) à la livraison sur Aurillac, Saint-Flour et Neuvéglise via No Show. Pour utiliser ces services digitaux, il n’est pas besoin d’avoir un site internet : « Nous avons un mode hébergé qui permet d’accéder à un lien que l’on peut transmettre sur les réseaux sociaux. Nous le conseillons en premier lieu aux clients non équipés de sites qui souhaitent commencer au plus vite. »

No show permet aussi de créer son site internet de manière simplifiée : le restaurant mexicain Piquin (Lyon 3e) a ainsi pu se digitaliser en 48 h. « Le restaurant avait un site qui n’était pas très fonctionnel et esthétique : le nouveau rassemble à la fois la commande en ligne et le click and collect » . Les services de No show sont accessibles en formules mensuelles sans engagement ou annuelles : comptez 600 € HT par an pour le service de vente à emporter, 60 € HT par mois pour le même service au mois sans engagement. Le site ne prend aucune commission sur les ventes réalisées : « C’est une volonté de notre part, car nous sommes face à des établissements qui sont clairement démunis : ils n’ont pas besoin qu’on vienne repêcher des commissions sur le peu de ventes qu’ils arrivent à réaliser. On voulait vraiment leur donner un maximum de visibilité sur le coût de la mise en place de la vente à emporter » explique la cofondatrice de No Show.

Quelles aides pour se digitaliser à moindre coût ? 

Pour amortir le coût de la digitalisation, plusieurs aides régionales sont d’ores et déjà disponibles. L’Auvergne-Rhône-Alpes, par exemple, a mis en place le dispositif moncommerceenligne.com depuis le 13 novembre. Il est destiné aux commerces de proximité dont l’effectif est inférieur à dix salariés et le chiffre d’affaires inférieur à 1 million d’euros, il offre une prise en charge – 100 % jusqu’à 500 €, 50 % de 500 à 1 500 € – des dépenses pour la création, la refonte ou l’optimisation d’un site internet ou d’un site d’e-commerce.

Chez Tasty Cloud, autre solution de digitalisation pour les restaurateurs, un onglet du site référence les différentes aides disponibles en fonction de la localisation de votre établissement. Utilisé par près de 1 000 restaurateurs, Tasty Cloud offre un mois d’essai gratuit de sa solution de click and collect . La start-up est de plus en plus sollicitée et s’adapte en conséquence. « Au premier confinement, nous n’étions pas tout à fait prêts pour équiper en masse. Au lendemain de la réouverture des CHR, nous avons retravaillé notre parcours de création. Ces trois dernières semaines, 600 restaurateurs ont accédé à nos solutions. Parmi eux, une cinquantaine a créé une carte virtuelle, intégré le paiement en ligne et commencé les commandes, sans même s’aider de notre support client ! », constate Martin Catineau, responsable du marketing chez Tasty Cloud. Cette solution digitale est disponible au prix de 79 € par mois avec engagement sur 12 mois (99 € sans engagement) et fonctionne elle aussi sans commission. Ce prix comprend la commande et le paiement en ligne, la gestion de stock, un accompagnement et un support dédié, ainsi que le lancement d’un dispositif de communication. Les solutions et aides pour se digitaliser ne manquent pas : à vous de trouver celle qui convient le mieux à votre établissement.

(*) Étude L’Addition sur plus de 2 000 restaurateurs, clients de L’Addition, ayant une activité de vente à emporter (click & collect et click & delivery) depuis janvier 2020 ainsi qu’un service à table.

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