Les professionnels réagissent à la condamnation de Deliveroo
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Deliveroo a été condamné la semaine dernière à 375.000 euros d’amende pour travail dissimulé. Face à cette décision, les professionnels du secteur, partenaires comme concurrents, réagissent. Pour certains, elle sonne un renouveau pour le droit du travail des livreurs. D’autres réfléchissent déjà à des alternatives de livraison.
La Revue des Comptoirs vous l’annonçait il y a quelques jours, Deliveroo est condamné par le tribunal correctionnel de Paris àune amende de 375.000 euros, le maximum prévu, pour«travail dissimulé».Une décision forte, condamnant pour la première fois l’uberisation en France.
Pour certains, cette condamnation s’annonce comme une bonne nouvelle, le début d’un changement pour la reconnaissance du travail des livreurs.Durant le premier confinement, Arthur Nicollin a créé Cyclôme, une coopérative de livraison éthique à vélo. Tous les travailleurs et livreurs de sa plateforme sont des salariés. Et selon lui, cette condamnation subie par Deliveroo France«ne peut être qu’une bonne chose»car elle démontre que«le droit français se place en défenseur des livreurs». Pour ce qui est de la question de l’uberisation, Arthur Nicollin a un avis bien tranché sur la question :«L’uberisation dégrade grandement les conditions de travail, c’est alarmant. L’enjeu du salariat, c’est de fournir aux livreurs des protections sociales, des salaires décents, de l’équipement, une structure et des responsabilités. L’uberisation, elle, détruit cette responsabilisation des livreurs.»
Selon lui, les problèmes rencontrés par Just Eat dans la mise en place de la salarisation des livreurs ne sont pas représentatifs du secteur.«Ce qui est certain c’est que le modèle salarial peut fonctionner, déclare-t-il.On le voit grâce à des plateformes comme Cyclôme ou encore Naofood à Nantes et beaucoup de coopératives qui fonctionnent très bien depuis plusieurs années. Le salariat, ce n’est pas nouveau, c’est la plus grosse charge pour une entreprise et on le sait. Mais sans travailleurs, on n’avance pas.»
Besoin de visibilité
Mais certains n’ont pas d’autres choix que de travailler avec des sociétés de livraison comme Deliveroo.Eric Descargues a ouvert sa dark kitchen Popafood à Toulouse lundi 18 avril. Il raconte aujourd’hui travailler uniquement avec Uber Eats, une plateforme de livraison aux pratiques similaires à celles de Deliveroo. Il explique«être conscient des problèmes concernant le statut des livreurs»mais déclare qu’à ce jour, en plein lancement de son entreprise, il«ne peut pas se permettre de ne pas travailler avec les leaders du milieu de la livraison, Uber Eats ou Deliveroo».
Le fondateur de la dark kitchen réunissant huit restaurants poursuit en annonçant :«Chacun doit travailler sur ses problèmes en interne et respecter la chaîne de valeur, on ne peut pas porter les problèmes de tout le monde. Derrière, ce sont des restaurants indépendants qui travaillent avec nous et ils ont besoin de visibilité. Et cette visibilité, ils l’ont grâce aux leaders du secteur de la livraison.»Eric Descargues explique tout de même envisager«d’autres solutions»comme«des sociétés avec du 100% vélo»ou d’autres«qui travaillent avec des livreurs sous statut salarié». Mais d’après lui,«ce n’est pas si simple»car il faut d’abord«que nos marques et notre enseigne se démarquent avant d’étudier ces solutions du bien-être des livreurs».