Contre ventes et marées, le crémant voit ses ventes en France croître d’année en année. Produit de qualité et peu onéreux, il a su trouver sa place sur les tables françaises. Mais pas question pour autant de s’endormir sur ses lauriers. Le crémant a quatre défis, notamment une montée en gamme pour le CHR.
Petit retour en arrière. Dans les années 1970, le crémant était alors considéré comme le « champagne du pauvre ». Aujourd’hui, ce vin effervescent possède ses propres lettres de noblesse, son propre marché. En somme, il a su gagner le cœur des consommateurs au fil des années grâce à une qualité constante et un prix raisonnable. Du reste, la production de cols croît depuis 2016, passant ainsi de 77,7 millions vendus à 108 millions en 2023. Soit une progression de 40% en huit ans. Qui dit mieux ?
D’autant plus que les autres vins pétillants enregistrent une baisse de leur volume. A titre d’exemple, le champagne a connu en France un repli de ses ventes de 8,2%, à 127 millions de bouteilles écoulées (source Comité champagne).
La perception du crémant est désormais très bien installée auprès des consommateurs
« La perception du crémant est désormais très bien installée auprès des consommateurs. Ce n’est plus un pétillant de substitution. Les Français se sont appropriés le crémant », résume Dominique Furlan, nouveau président de la Fédération nationale des producteurs et élaborateurs de crémant (FNPEC), depuis avril en remplacement d’Edouard Cassanet. Il est à la tête de La cave Louis Vallon, premier producteur de crémant de Bordeaux. Et également vice-président de Bordeaux Families présenté comme le principal opérateur coopératif du vignoble bordelais.
1er défi
Pour autant, de nombreux défis existent pour le crémant. On peut en citer quatre. Le premier concerne la protection de l’appellation en Europe, voire au-delà. Par exemple, il existe des crémants marocains… Actuellement, le marché hexagonal compte huit Appellations d’origine contrôlée : Alsace, Bordeaux, Bourgogne, Die, Jura, Limoux, Loire et Savoie. A cela s’ajoutent, selon le cahier des charges européen, un crémant du Luxembourg et un autre de Wallonie.
« La protection de notre AOC est un sujet récurrent, reconnaît bien volontiers le nouveau président. Nous devons désormais nous inspirer de ce qui a été fait pour le champagne. Le renforcement juridique de notre production est une priorité.» Pour cela, la fédération fait appel désormais à un professionnel du droit européen et international vitivinicole, Louison Bosse-Platière.
2e défi
Le deuxième défi est d’adapter les différents cépages aux changements climatiques. Une urgence en regard des événements survenus ces derniers mois (grêle, mildiou, pluie abondante). Différentes recherches sont actuellement menées afin de fortifier les vignes. Le Jura est en pointe sur cette question en réalisant différents essais sur ses cépages. « Nous devons faire évoluer notre cahier des charges, aller vers plus d’harmonisation entre les régions, tout en tenant compte des nouvelles contraintes environnementales », poursuit Dominique Furlan.
Du reste, en matière d’économie circulaire, la fédération travaille actuellement sur la réutilisation des bouteilles. Cela dit, le chantier est encore loin d’être achevé. Le cahier des charges actuel impose que le crémant doit être vendu dans des bouteilles neuves… En revanche, il n’est pas question de retirer la coiffe, même si chaque producteur a la possibilité de le faire.
Nous devons renouer avec la région Alsace sans plus attendre
3e défi
Le troisième défi, et pas le moindre, est de renouer avec la région Alsace. Effectivement, celle-ci avait décidé de quitter la fédération en 2023. La raison de cette séparation serait à rechercher dans la dégradation de rapports humains ; une histoire de personnes en somme.
« Nous devons renouer avec elle sans plus attendre, annonce sans hésitation Dominique Furlan. Nous ne pouvons pas nous en passer. Le crémant représente la France ; c’est une appellation transversale. Et nous n’avons pas besoin de divisions dans un monde incertain. »
4e défi
Le quatrième défi, peut-être le plus important, consiste à monter en gamme afin de séduire l’univers du CHR, où le crémant est encore peu référencé. Avec, notamment, des vieillissements plus longs, des cuvées millésimées en monocépage, et en parcelles certifiées… le tout pour un prix qui oscillerait entre 12 et 15 euros.
« Nous voulons répondre au mieux aux souhaits du CHR et des cavistes, poursuit le président de la FNPEC. Nous n’avons pas d’objectif en volume. En revanche, il n’existe pas de notre part une volonté de surproduction. » De nouvelles terres de conquêtes apparaissent pour le crémant.
Evolution des ventes de crémant (en millions de cols)
millions en 2016
millions en 2018
millions en 2019
millions en 2020
millions en 2022
millions en 2023
Le repli de 2020 a pour origine les différents confinements. Cela dit, le nombre de cols pour 2024 devrait être en recul. La raison : l’Alsace, premier producteur de Crémant, a décidé de quitter la fédération l’année dernière. 2025 sera-t-elle l’année de sa réintégration ?