Dernière moutarderie indépendante de Bourgogne, Edmond Fallot aff irme haut et fort sa typicité et contribue à la préserver.
Indissociable de la gastronomie française, la moutarde se retrouve sur toutes les tables. Les Français, qui en consomment en moyenne 1 kg par personne et par an, en sont friands. L’histoire de ce condiment est indissociable de celle de la région Bourgogne, où la fameuse moutarde « de Dijon » est née. « C’est la région par excellence des ingrédients qui la composent », résume Caroline Riboteau, responsable tourisme pour la Moutarderie Fallot. « On y trouve de la graine de moutarde et auparavant elle se fabriquait avec du moût de raisin et du verjus, un jus de raisin vert endémique de la Bourgogne. »
La Moutarderie Fallot est ainsi fondée en 1840 dans cet environnement propice à la fabrication du condiment. Plusieurs propriétaires s’y succèdent, mais c’est Edmond Fallot, grand-père de l’actuel directeur Marc Désarménien, qui impulse son succès. Aujourd’hui, trois autres grands industriels de la moutarde sont toujours présents en Bourgogne : Amora-Maille, Européenne des condiments et Reine de Dijon.
La maison Fallot, restée indépendante, produit environ 5 % de la moutarde française, à raison de 25 000 pots chaque jour. « Chez Amora-Maille cela doit être l’équivalent de 30 minutes ou une heure de production », affirme Caroline Riboteau. Il faut dire qu’elle a choisi de cultiver la tradition dans la fabrication de ses produits. Elle a notamment largement contribué à la reprise de la culture de la moutarde en Bourgogne, qui avait presque disparu. « Depuis 20 ans, en travaillant avec les industriels, l’association Moutarde en Bourgogne et la Région, nous avons replanté plus de 6 000 ha de moutarde. » Cette action a permis à la maison de réintégrer des graines locales jusqu’à réaliser l’intégralité de sa production 2019 avec des graines bourguignonnes. La récolte 2020 étant mauvaise, Fallot a dû incorporer des graines canadiennes, mais la moutarde contient tout de même 80 % de graines régionales.
MÉTHODES ANCIENNES, MAISON MODERNE
La moutarderie Fallot s’attache à préserver une production proche de l’artisanat. Les matières premières composant la moutarde graines, vinaigre, vin blanc, eau et sel – sont pesées, nettoyées, triées et mises à tremper 24 h, avant d’être broyées ensemble à la meule de pierre. « C’est notre marque de fabrique : le broyage à la meule de pierre est un gage de qualité car la pâte de moutarde n’est pas chauff ée et garde ainsi son piquant et sa saveur », explique Caroline Riboteau.
Durant ce procédé, les graines libèrent la poudre oléagineuse qui donne son goût et sa force au condiment. À ce stade, on obtient de la moutarde à l’ancienne, qui est tamisée si on veut obtenir une moutarde lisse et fine de type « Dijon ». « C’est une recette, un procédé de fabrication : on peut produire de la “Dijon” partout dans le monde. » Pour valoriser la vraie moutarde bourguignonne, une IGP a été créée en 2009. Cette moutarde, plus salée et crémeuse qu’une moutarde de Dijon classique, doit être fabriquée en Bourgogne avec des graines locales et du vin blanc aligoté de Bourgogne. Fallot propose également de nombreuses moutardes aromatisées, du cassis dijonnais au safran iranien. Impactée par la crise sanitaire, Fallot a vu ses ventes baisser sur certains circuits, notamment les CHR, qui représentent 10 % de ses ventes.
Malgré une saison touristique amoindrie – 18 000 visiteurs à la fin 2020 contre 45 000 à la fin 2019 -, la moutarderie a su se maintenir grâce aux grandes et moyennes surfaces (GMS). De nouveaux projets touristiques, en cours de développement, verront le jour lorsque le contexte sanitaire sera apaisé. www.fallot.com