Une recette 100 % française

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La moutarde d’Orléans se distingue par sa production 100 % française. L’entreprise Martin Pouret, dernière rescapée de la tradition vinaigrière des quais de Loire, fait perdurer ce savoir-faire depuis 1797.

Bien moins connue que sa voisine de Dijon, la moutarde d’Orléans n’en reste pas moins remarquable et tout aussi ancienne. Une tradition ancrée dans la ville et pourtant presque oubliée, maintenue par la dernière entreprise, Martin Pouret, installée sur les quais qui voyaient débarquer les tonneaux de vins destinés à tourner au vinaigre. « Le roi Charles III avait fait passer un décret royal en 1580 pour faire d’Orléans la ville du vinaigre et de la moutarde. Les vins qui étaient destinés à la cour remontaient de Bourgogne par la Loire, et Orléans était le dernier port fluvial avant la destination finale royale. Les fûts qui avaient tourné étaient déchargés et finissaient en vinaigre ici. À l’époque, 80 % de la production du vinaigre en France provenaient d’Orléans, qui comptait entre 300 et 400 vinaigriers », raconte Paul-Olivier Claudepierre, codirigeant de Martin Pouret.

David Matheron et Paul-Olivier Claudepierre copropriétaires de la vinaigrerie.

Le rapport avec la moutarde ? Le vinaigre est l’ingrédient phare pour fabriquer de la moutarde. « Qui sait faire du bon vinaigre, sait faire de la bonne moutarde », résume le directeur de la vinaigrerie Martin Pouret, reconnue entreprise du patrimoine vivant, qui a su garder précieusement la tradition de fabrication de cette précieuse moutarde, et ce depuis 1797. Les graines sont trempées dans le vinaigre pendant six à huit heures, puis broyées à la meule de pierre qui garde encore aujourd’hui son utilité : « Grâce à ce procédé, les graines chauffent moins et on évite ainsi le goût de brûlé qui peut être désagréable. » Le tout est ensuite assaisonné de sel et de différents ingrédients qui marqueront la signature gustative recherchée. « Nous continuons à produire de manière artisanale et à respecter le mode de production ancestral. Rien n’a vraiment changé depuis le XVIIIe siècle. Le vinaigre est l’essence de tout, et nous privilégions une fermentation lente et naturelle en fût de chêne qui dure trois semaines. Puis le vinaigre est élevé en foudres pendant un an. » Laisser le temps au temps pour garder toutes les lettres de noblesse de cette moutarde.

Autre point important : les graines de moutarde ne proviennent pas du Canada, comme 98 % de la production mondiale, mais bel et bien de France. « Nous nous sommes associés à un agriculteur installé à Pithiviers pour relancer la culture de la moutarde du Val de Loire. 100 % de notre production provient de là. Maîtriser notre sourcing et notre impact carbone fait partie de nos priorités. » Résultat : un produit 100 % made in France et une moutarde « très équilibrée, qui ne vient pas piquer le nez. Le principe reste de pouvoir accompagner un bel ingrédient comme une pièce de viande. On ne veut surtout pas masquer le goût avec trop de puissance ».

Dite à l’ancienne, elle garde les cosses des graines pour garantir du caractère, « c’est la tradition orléanaise », résume Paul-Olivier Claudepierre. Déclinée au piment d’Espelette, aux cornichons (eux aussi cultivés en France et fabriqués par la maison), aux graines de pavot, et bientôt à l’ail des ours, elle trouve sa place sur les tables gastronomiques et bistronomiques qui cherchent à offrir un condiment français de qualité. La moutarde d’Orléans s’est d’ores et déjà installée dans de belles adresses comme L’Arpège, chez Troisgros ou l’Atelier de Joël Robuchon. De quoi voir la moutarde sous un autre angle avec la certitude d’un approvisionnement 100 % français.

www.martin-pouret.com

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