La Bourgogne ouvre sa Cité de la gastronomie et du vin

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Dijon vient d’ouvrir sa Cité de la gastronomie et du vin. Grâce à un savant mélange de constructions immobilières, d’offres culturelles et de propositions de restauration, de produits et de vins, la capitale des ducs de Bourgogne met ainsi en avant une offre complémentaire des plus séduisantes.

Dijon vient d'ouvrir sa Cité de la gastronomie et du vin.
Dijon vient d'ouvrir sa Cité de la gastronomie et du vin. Crédits : Auvergnat de Paris

Le calendrier a été tenu. Le vendredi 6 mai, tous les Dijonnais étaient invités à découvrir la nouvelle Cité de la gastronomie et du vin qui vient de prendre place dans l’ancien hôpital de la ville. En préambule de cette visite, ils étaient conviés à partager un « kir républicain » ; ce qui va de soi dans une ville autrefois administrée durant 22 ans par le chanoine Kir.

François Rebsamen, actuel maire de Dijon, est particulièrement fier de cet événement, amorcé dès 2012. Il couronne ainsi en apothéose son troisième mandat de maire, durant lequel il devrait dépasser la longévité du célèbre chanoine à la tête de la cité des ducs de Bourgogne. Les habitants de la capitale bourguignonne ont la réputation de peu goûter au changement puisqu’ils n’ont élu que trois maires différents depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La réalisation de la Cité de la gastronomie et du vin vient en effet donner un sacré coup de jeune à cette ville très traditionnelle. Mais l’ensemble s’intègre bien dans ce lieu chargé d’histoire, comme l’explique Anthony Béchu, architecte de la Cité et qui a par le passé réhabilité l’Hôtel-Dieu de Marseille : « C’est un morceau de ville complet que nous créons. Dans toutes ses fonctions résidentielles, économiques, culturelles, touristiques, nourricières. Et tout cela fait écho à l’histoire hospitalière de ce site, on reste dans l’humanité, le soin de l’homme et l’humanisme. »

Un investissement de 600 M€

Le projet présente une belle envergure car il s’étend sur les vestiges de l’ancien hôpital, proche du centre-ville, sur 6 ha. Eiffage, le maître d’œuvre qui agit dans le cadre d’un partenariat public-privé, a investi 250 M€ dans le projet. La ville a pour sa part mis 15 M€ sur la table pour aménager la partie culturelle, à savoir une antenne de l’office de tourisme et surtout la mise en place dans l’enceinte du 1204 (date de la création des premiers bâtiments de l’hospice). Cet espace muséographique de 500 m2 a une vocation de « centre d’interprétation de l’architecture du patrimoine de Dijon ». Il nous entraîne dans 800 ans d’histoire de la ville. Pour la partie culturelle, il faut également mentionner l’exceptionnelle restauration de la chapelle Sainte-Croix de Jérusalem.

En marge de la gastronomie et du vin, cette réhabilitation a pu permettre l’édification d’un parking, de deux immeubles de logements (l’un pour personnes âgées et l’autre pour abriter une résidence étudiante), d’un complexe cinéma Pathé de neuf salles (1 200 fauteuils) et d’un hôtel. Porté par le groupe Naos Hôtel Groupe, il devrait ouvrir au début de l’année prochaine avec l’enseigne Curio Collection by Hilton qui verra le jour dans la Cité de la gastronomie à Dijon. L’établissement quatre étoiles comportera 125 chambres, un spa, un restaurant et un bar. Son ouverture est espérée pour le premier trimestre 2023. Lors de la présentation à la presse, François Rebsamen s’est félicité de la fin de ce chantier qui représente l’aboutissement de cinq ans de travaux et qui s’affirme comme la première des quatre cités françaises de la gastronomie commencées dans le cadre du classement à l’Unesco de la table à la française. Lyon a en effet jeté l’éponge peu après son ouverture et Tours et Rungis sont encore en gestation. Le maire de Dijon a toutefois relativisé ce succès en rappelant que Dijon avait obtenu d’exploiter le thème le plus porteur, à savoir « la vigne et le vin ».

Un musée aux dimensions internationales

La partie purement muséographique occupe 1 400 m2. Elle entraîne les visiteurs dans un parcours qui débute dans un lieu interactif présentant l’univers du bien-manger et du bien-boire. Elle se poursuit par l’espace en cuisine qui met en scène les cinq sens à travers un jeu numérique qui propose de cuisiner à l’intérieur d’un jeu vidéo. La Chapelle des climats et des terroirs permet d’appréhender la spécificité du terroir du vignoble bourguignon, très morcelé qui a d’ailleurs fait l’objet d’un classement à l’Unesco.

En outre, il faut signaler une très belle exposition temporaire sur la pâtisserie intitulée « C’est pas du gâteau », parrainée par Pierre Hermé. Cet espace, ludique, fait découvrir tous les aspects de la discipline à travers des quiz, des cuissons virtuelles. Le parcours s’achève sur le clin d’œil du gâteau effondré, réalisé par le plasticien Vincent Olinet qui nous rappelle que l’art de la pâtisserie réclame parfois beaucoup d’humilité… La partie restauration a été confiée au groupe Épicure de Julien Bernard (voir encadré). Ce dernier a investi 6 M€ sur le site pour aménager deux restaurants et un bar à vin.

Une Table des climats, qualifiée de « bistronomique » accueille les visiteurs en leur proposant des accords mets-vins. Le Comptoir de la cité s’étend sur 400 m2 dont 200 m2 de terrasse et décline une offre plus simple. Il fonctionne sur un principe très convivial éprouvé par le groupe Épicure aux halles de Sète et qui devrait bientôt voir le jour aux halles Paul-Bocuse, à Lyon. Les clients peuvent se restaurer à table ou autour du comptoir en étain de plus de 30 m de long façonné par les Étains de Lyon. Julien Bernard a choisi de s’appuyer sur les conseils culinaires d’Éric Pras, chef triplement étoilé par le Guide Michelin à la Maison Lameloise, à Chagny. Le cuisinier a délégué sur place Kévin Julien, un de ses lieutenants, comme chef exécutif.

La Cave de la cité est le plus vaste espace confié au groupe Épicure. Sur 600 m2 , les visiteurs peuvent déguster au verre et en trois formats 250 vins grâce à la présence de 20 armoires Enomatic. Le public peut ainsi découvrir des grands crus de Bourgogne. Quelques vins des autres régions françaises sont aussi représentés. Les visiteurs ont aussi accès à une cave où 40 grandes maisons de Bourgogne sont représentées. Par ailleurs, Ferrandi vient d’ouvrir son cinquième campus dans la Cité après ceux de Paris, Rennes, Bordeaux et Saint Gratien. L’école occupe le « Canon de lumière » où elle a aménagé deux espaces, l’un pour la pâtisserie, l’autre pour la cuisine. Elle organise pour l’instant des stages de reconversion de trois semaines. En septembre, sont prévues des formations plus longues (quatre mois de cours et trois mois de stages en entreprises).

Ainsi, 150 personnes y devraient être reçues et formées chaque année. La cité offre enfin huit boutiques destinées à des producteurs. L’offre est vouée à évoluer puisque les intervenants pourront choisir d’occuper ces espaces pour une durée minimale de deux mois. Il faut noter que la Librairie gourmande parisienne dispose d’un de ses emplacements. Un bar à bières, Bamagotchi, a aussi pris place dans ce quartier. Ce lieu est exploité par Nicolas Sauvage qui dirige déjà deux pubs à Dijon, The Barbarian’s et The King’s Tavern. Ce bar a été positionné à la sortie du cinéma afin d’accueillir les spectateurs avant ou après les séances. Il faut ainsi signaler le souci de synergies qui a prévalu lors de la conception de cet ensemble. Il pourrait constituer le ferment de la réussite de cette Cité de la gastronomie et du vin qui s’annonce déjà très prometteuse.

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