Le célèbre coutelier situé à Thiers ne semble pas avoir pris une ride. Déglon, qui fête cette année ses 100 ans, n’a jamais renoncé à l’innovation et certains de ses modèles iconiques figurent toujours parmi les best-sellers.
« C’est une fierté de voir l’histoire familiale se poursuivre », lance Moïse Déglon au sujet du centenaire de sa coutellerie. Non sans émotion, l’homme mesure le chemin parcouru depuis la création de Déglon en 1921. Contrairement à d’autres entreprises artisanales et centenaires ayant basculé dans l’escarcelle de fonds d’investissement, Moïse Déglon se félicite que ce joyau de la coutellerie se transmette de génération en génération en échappant à des logiques financières court-termistes. « La fierté se ressent aussi dans nos équipes, ajoute-t-il. Car la réussite de Déglon est aussi liée à nos salariés, je pense notamment à Manuela Marquès, cheffe d’atelier qui travaille pour Déglon depuis 43 ans. » Si Déglon a maintenu la croissance et la créativité, c’est aussi grâce à ses clients fidèles, à l’instar des galeries Lafayette ou de la coutellerie Rick qui commercialise bon nombre de couteaux estampillés Déglon. Moïse Déglon, fils de Thierry Déglon, a été nommé directeur général en 2018 et peut aujourd’hui compter sur 26 salariés. Si l’entreprise familiale est née à Sarraix, elle a déménagé à Thiers, en Auvergne, au bout de deux ans. La richesse des gammes proposées par le coutelier donne le tournis ; pas moins de 800 références actives sont disponibles, auxquelles s’ajoutent « des produits complémentaires ».
Déglon, qui a réalisé un chiffre d’affaires avoisinant les 4 M€ en 2019, distribue 85 % de sa production via des revendeurs. À noter que 70 % du chiffre d’affaires sont réalisés grâce aux professionnels du CHR, le reste du CA provient de la vente au grand public. Parmi les clients de Déglon, on peut citer des lycées hôteliers ou de grandes maisons (Relais Bernard Loiseau, Maison Troisgros ou Restaurant Paul Bocuse), mais aussi des figures cathodiques comme Norbert Tarayre ou Grégory Cohen. « Il y a chez nous une culture de recherche et d’innovation. Cette innovation, nous souhaitons d’ailleurs la protéger et, dès 1926, un brevet a été déposé pour le couteau bec d’oiseau, dédié au tournage des légumes, et munie d’une pointe pour ôter les yeux des pommes de terre », explique le directeur général. Des idées et des couteaux qui ont changé le quotidien, on en trouve à la pelle chez Déglon, même si toutes les nouveautés n’ont pu être protégées. Saviez-vous que le fabricant est à l’origine du crantage en forme de demi-lune ?
Thierry et Moïse Déglon
Cette innovation, qui n’avait à l’époque pas été protégée, est aujourd’hui omniprésente ; on la retrouve notamment sur les couteaux à pain. Si le marché français a toujours été dynamique, Déglon a développé l’export dès les années 1950 sous l’égide de René Déglon, le grand-père de Moïse. Un tournant majeur intervient en 1976, avec la construction d’un outil industriel moderne permettant de passer d’une conception artisanale à une production verticale de couteaux et ustensiles.
Ce nouvel outil a permis de conquérir le marché professionnel et a donné lieu « à une quête de fonctionnalité permanente et des couteaux garantis à vie ». Les faits d’armes et les succès empilés par Déglon sont nombreux : la gamme forgée « grand chef » est une référence tandis que la gamme « stop glisse » a été copiée mais jamais égalée ; elle est d’ailleurs devenue incontournable chez les traiteurs. Plus récemment, ce sont les gammes « meeting » (des blocs de couteaux qui s’encastrent), ou encore « Silex », qui ont fait parler d’elles. Moïse Déglon ne souhaite pas communiquer outre mesure sur les nouveautés prévues à l’occasion du centenaire, mais des produits seront proposés dès la rentrée prochaine. La crise sanitaire et l’évolution du marché imposent, selon le dirigeant, un rapprochement des clients et une personnalisation accrue.