Le buffet se réinvente

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Longtemps cantonné aux petits déjeuners des hôtels ou aux restaurants à gros débit, le buffet prend une nouvelle tournure depuis quelques années. Il se fait plus délicat, aussi bien dans la présentation que dans la proposition culinaire. Il offre des innovations sur un terrain qui pourtant n’est pas toujours favorable à l’exercice.

buffet
image d'illustration. Crédit : DR.

Directement hérité du service à la française, qui consiste à présenter simultanément l’ensemble des plats aux convives, mais aussi du service à l’anglaise qui a apporté la notion de portion dans la logistique de service, le buff et redevient un moment d’expérience gastronomique. Qu’on se serve soi-même ou que du personnel soit disponible pour remplir les assiettes, la logique va de plus en plus dans le sens d’une expérience client haut de gamme. Le show cooking (cuisine ouverte) et même le self cooking s’invitent dans une démarche également plus tournée vers l’antigaspillage. Depuis quelques années, des restaurants comme B.O.U.L.O.M (Paris18e), où la cuisine est pensée par le chef Julien Duboué, ou encore Polichinelle (Paris 15e), font ainsi vivre l’expérience du buffet d’une nouvelle manière. De plus, la tendance du brunch contribue à le faire entrer plus largement dans les restaurants.

Moment de convivialité

Longtemps cantonné à une prestation bas de gamme et vite consommée, ce mode de service regagne ses lettres de noblesse. Chez B.O.U.L.O.M, non seulement les produits sont scrupuleusement sourcés au sein du terroir landais, mais aussi la mise en scène encourage à prendre le temps d’en profiter. Buffet froid et chaud, plateau de fromages, sélection de desserts sont disposés sur un vaste îlot au centre de la salle en bois et laiton, qui reprend tous les codes esthétiques des grands fourneaux de chef et invite à la convivialité.

Les plats sont d’ailleurs présentés directement en cocottes, dans l’esprit des grands repas de famille à partager. Les timbres en sous-bassement facilitent le réassort en toute discrétion. Chez Polichinelle, l’ambiance est plus chic, avec un vaste linéaire en fond de salle qui propose les plats en assiettes individuelles élégamment dressées. «Aujourd’hui l’image qu’on a du buffet a beaucoup évolué : on cherche du choix, de la convivialité. Et l’esthétique du buffet est devenue un point primordial», souligne Mathieu Franck, responsable commercialisation et produit pour la France, la Belgique et le Luxembourg chez Lusini. Le fournisseur a ainsi déployé ses propres design sous sa marque Vega, misant sur des habillages en bois sobres.

La couleur et de nouvelles formes apparaissent également sur les saladiers et autres chafing dish (ou grands réchauds). Le fabricant allemand APS a notamment mis au point un chafing dish rond façon marmite dans des coloris très vifs. «Ce n’est pas évident d’innover sur ce segment où tout est guidé par la norme GN et l’utilisation de l’inox, note quant à lui Lionel Cotte, président de Stellinox, fabricant français d’équipements en inox et distributeur d’une large gamme dédiée aux buffets. Mais on voit évoluer les coloris, notamment avec l’utilisation de récipients en mélamine qui permettent d’amener de la couleur. On voit aussi une évolution sur le choix des matériaux qui ont de plus en plus leur importance, même si l’inox reste une valeur sûre de la restauration. Les différentes essences de bois mais aussi le béton sont très demandés pour présenter les denrées sèches.» Les systèmes de maintien au froid avec couvercle coulissant roll-top offrent aussi une nouvelle alternative, qui permet de mettre en valeur les contenants, jusqu’alors souvent immergés dans la glace.

Nouveaux besoins 

En gagnant de nouveaux types d’établissements, le buffet a fait émerger de nouveaux besoins en matière d’équipement. «Nous avons de plus en plus de demandes de maisons d’hôtes, de restaurants pour des brunchs en plus de la clientèle habituelle des hôteliers et des traiteurs, déclare Mathieu Franck. Leurs besoins sont parfois différents, c’est pour cela que nous avons choisi d’intégrer la modularité la plus élevée possible dans nos meubles buffets.» La marque vient de dévoiler un nouveau système complet, Valinta, qui intègre l’ensemble des éléments de buffet dans une base incluant des espaces de rangement, les parois murales, ainsi que différentes possibilités d’agencement.

Tous les caissons et accessoires s’adaptent aux formats européens Gastro Norm (GN), y compris aux formats 1/2, plus compacts, qui correspondent davantage aux établissements de plus petite capacité. «Le principe du buffet restait peu attractif pour les restaurants à petit débit, notamment pour ces questions de quantité, justifie Lionel Cotte. Pour rentabiliser un buffet servi dans des bacs GN 1/1 de 7 à 8 litres, il faut déjà un passage important. L’évolution des équipements permet de l’ouvrir à d’autres types d’établissements.» Comme en cuisine, l’induction prend par ailleurs de plus en plus d’importance sur les buffets chauds. «Cette technologie permet, par exemple, d’encastrer les plaques et de venir poser des chafings dish sans fils, explique Lionel Cotte. Ils sont plus faciles à transporter, permettent de faire le réassort beaucoup plus aisément qu’avec les versions électriques filaires.»

Les plaques à induction viennent aussi en support pour de la cuisine en live sur le buffet ou pour permettre aux convives d’effectuer eux-mêmes certaines cuissons minute (bacon, œufs, pancakes…). Lusini a notamment développé un mobilier pensé pour ce genre d’intégration. Autant d’équipements qui amènent une dimension différente à l’expérience du buffet. À l’instar de la démocratisation des formats GN1/2 et d’innovation comme le chafing dish de 4 litres du fabricant allemand APS, la tendance est à réduire la taille des contenants de manière générale. «La lutte contre le gaspillage est un thème assez central sur ce créneau», confirme Mathieu Franck de Lusini. Sur des buffets, généralement proposés à volonté, il est évident que la maîtrise des coûts matières est un défi. Néanmoins, la taille des contenants mis à disposition des convives influe notablement sur les quantités servies et apporte dans le même temps une dimension supplémentaire au service à travers les mini-saucières, les ramequins à topping ou encore les pichets en verre de 2 à 3 litres, en lieu et place des imposants distributeurs à céréales dans les hôtels. «Les établissements veulent à la fois proposer plus de variétés sur leur buffet, en plus petite quantité, et rajouter de l’expérience client en faisant naître l’impression d’un service plus haut de gamme», complète Lionel Cotte. Un nouveau mouvement favorable à l’émergence d’un modèle économique plus viable autour du buffet pour tous types d’établissements.

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