Une hôtellerie française prospère et prometteuse

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La dernière étude de KPMG sur l’industrie hôtelière française dresse un marché dynamique, portée notamment par le retour des clientèles européennes, en 2022, et internationales depuis le début de cette année. La Coupe du monde de rugby renforce l’activité de l’hôtellerie française, dont les perspectives s’annoncent prometteuses jusqu’en 2026.

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L’hôtellerie de luxe observe une hausse de 31 % de nuitées, au premier semestre 2023, par rapport à 2022. Crédit : DR.

Depuis la fin de la crise sanitaire liée à la pandémie de coronavirus, l’industrie hôtelière française est sur une pente ascendante. Les tendances favorables observées, dès le second trimestre 2022, se sont confirmées durant le reste de l’année dernière. En 2022, la situation infl ationniste a fait croître considérablement le montant des chambres des hôtels français, allant de 12 % (1-2 étoiles) à 52 % (5 étoiles supérieures) d’augmentation du prix moyen.

Un contexte qui a entraîné presque mécaniquement une hausse généralisée des revenus par chambre disponible (RevPar). Pourtant, l’an dernier, les niveaux de résultat brut d’exploitation (RBE) étaient « dans l’ensemble supérieurs en valeurs et en ratios par rapport à 2019 (+ 1 à + 5 points de chiff re d’affaires total en moyenne selon les catégories), démontrant la résilience de l’industrie hôtelière française », indique KPMG.

La société d’audit et de conseil, qui a présenté le 3 octobre dernier sa 46e étude annuelle sur l’industrie hôtelière française, ajoute que « seuls les établissements 1-2 étoiles présentent des niveaux de résultat brut d’exploitation par chambre disponible (GOPPAR) en léger recul par rapport à 2019 (- 3 % en moyenne). » Les premiers chiffres de 2023 confirment la bonne santé de l’industrie française de l’hébergement touristique.

Malgré un taux d’occupation des hôtels en France discrètement moindre cet été (- 2,2 points par rapport à l’été 2022), le RevPar s’est élevé à + 21, 9 % comparativement à l’été 2019. « Avec 57,9 milliards d’euros de recettes internationales, en progression de 2,1 % par rapport à 2019 selon Atout France, 2022 a été, malgré la faible fréquentation des marchés asiatiques, une année record pour les dépenses internationales, portées par les clientèles d’Amérique du Nord et de Grande-Bretagne », note l’étude de KPMG, précisant que « cette dynamique avait été amorcée dès le début du printemps 2022 par les clientèles européennes, belge, suisse et italienne. »

16000 nouvelles chambres d’ici 2026

Au premier trimestre 2023, la fréquentation hôtelière avait déjà bénéficié de l’afflux de la clientèle étrangère, pour afficher un résultat en hausse par rapport à 2019. Une dynamique qui s’est confirmée durant la saison estivale de 2023 : le retour des clientèles européennes et internationales s’est matérialisé par une hausse de 29 % des vols long-courriers, par rapport à l’été 2022. « Malgré l’infl ation, 2023 s’inscrit dans la continuité de l’année 2022 avec la confirmation du retour des clientèles internationales, démontrant la résilience de l’industrie du tourisme et l’attractivité de la destination française », estime Jérôme Kieffer, directeur général de KPMG en France.

En termes d’investissement, l’industrie hôtelière tricolore n’est pas timide. Elle semble même regarder positivement l’avenir. « Actuellement, les projets hôteliers sont toujours bien présents: 16000 chambres devraient ouvrir à l’horizon 2026 », avance Stéphane Botz, directeur national Hospitality chez KPMG en France. D’ici les trois prochaines années, plus de 125 projets d’établissements hôteliers sont susceptibles de voir le jour sur notre territoire. Parmi les destinations concentrant le plus de projets hôteliers, trois pôles se démarquent : la Métropole du Grand Paris, la Métropole de Nice Côte d’Azur et la Métropole d’Aix-Marseille. Entre 6 à 10 % de chambres d’hôtels supplémentaires pourraient s’établir d’ici 2026 dans ces intercommunalités, talonnées par la Métropole de Bordeaux (de 5 à 7 % de chambres en plus).

Le haut de gamme plus résilient 

Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), le premier trimestre 2023 a enregistré une croissance du nombre de nuitées hôtelières équivalente à 19,2 % de fréquentation, par rapport à 2022, passant de 35,7 millions à 42,6 millions nuitées. L’Insee précise que ces hausses de fréquentation sont portées notamment par l’hôtellerie de luxe, qui observe une augmentation de « 31 % des nuitées au premier semestre 2023 par rapport à 2022 ». L’hôtellerie haut de gamme s’avère plus résiliente que les autres catégories. La valeur des actifs hôteliers était l’an dernier d’ailleurs assez inégale. Les hôtels 3 et 4 étoiles ont maintenu leurs valeurs, par rapport à 2019, tandis que celles « des hôtels super-économiques » ont baissé, « en raison de leur plus faible élasticité tarifaire », estime KPMG. Ainsi, seuls les hôtels 5 étoiles ont vu leurs valeurs croître en 2022.

« Il y a une clientèle étrangère fortunée qui n’a aucun problème d’aller dans ce type d’établissement », confie Stéphane Botz. Pourtant, les hôtels de luxe ont largement relevé le tarif de leurs chambres. À partir de son observatoire des palaces (réunissant un échantillon d’environ 2 100 chambres), KPMG constate une augmentation de 35,9 % du prix moyen des chambres dans ces établissements. Ce prix moyen s’élevait l’an dernier à 1 464 € à Paris, et atteignait 2 848 € à Courchevel. Mais ces hausses de prix n’ont effectivement pas affecté le RBE des palaces, en augmentation de 4,9 % en 2022.

Nouveaux concepts et intelligence artificielle

L’offre hôtelière s’inscrit dans son époque en proposant des produits de plus en plus novateurs. Ils permettent de répondre aux attentes des clients en matière d’environnement ou d’adaptation aux nouveaux rythmes de vie : télétravail, appareils connectés, espace de bien-être… Ainsi, dans un marché en croissance, de nombreux professionnels de l’hôtellerie s’appuient sur une histoire particulière – un storytelling – permettant d’incarner leurs offres.

« Quel que soit le niveau de gamme, le storytelling peut toujours être utilisé, notamment pour transcrire la personnalité d’un établissement. En revanche, il doit être adapté à la réalité économique propre à chaque gamme pour pouvoir être mis en œuvre de manière opérationnelle », poursuit Ani Tatevossian, brand manager de Life Hotels (groupe ValueState Hotels). Si nous observons un recul de la gamme super-économique, les « hostels » (auberges de jeunesse de nouvelle génération) gagnent du terrain en France avec des établissements hybrides, proposant des dortoirs et des chambres, ainsi que des espaces communs et multi-usages (salle de jeux, de concert, Comedy Club).

Souvent adapté aux nouveaux enjeux sociétaux, « “l’hostel” devient le futur de l’hôtellerie économique des centres-villes », estime même Julien Routil, cofondateur du groupe RBS Hostels. Lorsque l’on évoque le futur de l’hôtellerie, il est difficile de faire l’impasse sur l’apport de l’intelligence artificielle (IA). Cette intelligence mathématique peut, en effet, aider « les hôteliers à comprendre les tendances de la demande, ajuster les tarifs en temps réel et prendre des décisions éclairées pour maximiser les revenus, explique KPMG. Elle leur permet également d’optimiser leur efficacité opérationnelle, de réduire les coûts énergétiques et de planifier les besoins en personnel ».

L’IA est ainsi « un formidable outil de découverte de notre monde et de ses connaissances, qu’elles soient techniques ou culturelles », note Stéphane Botz. Mais le directeur national Hospitality de KPMG tempère son analyse, en spécifiant qu’il ne s’agit pas d’être « pour » ou « contre » l’IA, « il s’agit de l’apprivoiser, puis de s’éduquer pour en faire un outil ou service de l’intelligence humaine ».

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