Choco veut s’imposer chez les fournisseurs

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Quelques semaines après avoir bouclé une troisième levée de fonds à 25 M €, Choco, spécialisée dans la digitalisation des commandes en CHR, expose les perspectives de l’entreprise. Entretien avec Grégoire Ambroselli, co-fondateur de la start-up franco-allemande.

Grégoire Ambroselli, co-fondateur de Choco. ©Choco

Après avoir courtisé les restaurants, la start-up Choco focalise désormais son attention sur le recrutement de fournisseurs. Plusieurs tours de table, pour un total de 308 M €, lui ont permis d’accéder au statut de licorne quatre ans après sa création et la place comme un acteur de premier plan de la digitalisation entre restaurateurs et fournisseurs. Pour autant, l’entreprise entend prendre son temps et positionne ses développements avec finesse.

Sur quels points concentrez-vous aujourd’hui vos efforts ?

« Les fournisseurs, c’est vraiment notre priorité du moment. Au départ, on était très centrés sur les restaurateurs, sur le fait de leur apporter une solution pour leurs commandes. Puis on a vu des tendances se dessiner chez les fournisseurs. Le gain était tel rien qu’avec la réception par mail que certains auraient même payé pour ça. Mais, nous y tenons, ce service-là est et restera gratuit et illimité. D’autres voulaient par contre aller au-delà et recevoir les commandes directement dans leur ERP. Ils étaient prêts à payer pour ce service. C’est pour répondre à cette demande que nous avons lancé notre offre premium il y a 9 mois. Elle permet de digitaliser l’ensemble de leurs commandes avec leurs clients, sans ressaisie et avec la possibilité de s’en servir comme un outil marketing ciblé, directement dans la poche de leurs clients. On les aide ainsi à valoriser leurs promotions, mais aussi des produits à DLC courtes. C’est aussi un moyen de maximiser les ressources humaines pour que le staff commercial soit davantage proactif. Et notre proposition de valeur implique aussi que, lorsqu’ils souscrivent ce package, ils déploient Choco chez tous leurs clients. On veut être LE canal de digitalisation du fournisseur.

Votre modèle économique repose aujourd’hui sur cette offre payante pour les fournisseurs. Peut-on imaginer un jour des options du même ordre à l’attention des restaurateurs ?

Non. En tous cas pas dans la version actuelle. L’appli a une réelle valeur ajoutée pour les restaurateurs mais on ne passera jamais du jour au lendemain sur une version payante pour eux. C’est gratuit pour que ce ne soit pas bloquant, il n’y a pas d’ambiguïté là dessus. Peut-être qu’un jour on aura un logiciel beaucoup plus complexe mais ce n’est pas du tout une priorité. En revanche, on est en train d’étudier d’autres pistes, complètement différentes de ce qu’on fait. On pourra en reparler dans quelques mois.

Est-ce que d’autres fonctionnalités vont arriver pour les fournisseurs ou pour les restaurateurs ?

On veut rester expert de notre sujet qui est la gestion de la commande. On a lancé un produit très simple au départ qu’on aurait pu complexifier au bout de quelques mois. Mais on préfère l’adapter petit à petit en gardant la même base pour garder cette flexibilité qui nous caractérise. Les 25 M€ sont d’ailleurs là pour ça. La commande, c’est un sujet très complexe. On doit affiner encore et encore pour couvrir de plus en plus de situations que rencontrent les fournisseurs. Par exemple, la question du nombre de références pour un même produit, qui peut être très très large. L’objectif, c’est d’arriver à zéro erreur de commande mais tout en gardant la simplicité d’utilisation pour tous les profils qui utilisent l’appli. Le but, c’est de leur donner le plus d’autonomie possible.

Qu’en est-il du paiement directement sur l’application ?

C’est une des pistes de développement sur lesquelles on va pouvoir apporter des solutions grâce au digital. Aujourd’hui, on n’a pas encore la solution pour ça, ça fonctionne de manière classique avec des factures entre restaurateurs et fournisseurs. Mais c’est un sujet. Notamment pour les factures impayées par exemple, on réfléchit à comment on pourrait mettre en place une sorte d’assurance. La question est seulement, est-ce que c’est la priorité du moment ? Non ça ne l’est pas.

Combien de fournisseurs ont opté pour l’option premium ?

On a plus d’une centaine de fournisseurs clients en mode premium et on tend vers 200 d’ici la fin de l’année, en France. Mais ça va très vite. Désormais on a une liste d’attente. On est très représenté parmi les fournisseurs de produits frais, parce qu’il y a de grosses fréquences de commande, des DLC courtes. Beaucoup y voient une opportunité énorme, mais nous sommes obligés de prioriser. Nous restons une start-up et on ne peut pas intégrer tout le monde d’un coup. On gère les gros fournisseurs dans un premier temps et ceux qui ont le plus d’engagement vis-à-vis de Choco. Pour autant, n’importe quel fournisseur peut recevoir gratuitement par mail des commandes passer sur Choco par des restaurateurs. Certains en reçoivent des dizaines par mois, d’autres une seule. Tout le monde s’y retrouve, c’est ce qui fait le succès de l’application.

Qu’en est-il de votre déploiement international ?

On s’est lancé en France et en Allemagne en même temps. On est en Belgique, aux Etat-Unis, en Angleterre, en Espagne et un peu en Autriche. Il n’y a pas de prévision d’expansion à court terme. Mais ça peut aller très vite, je n’ai pas envie de déguerpir de cet objectif mais le Covid est passé par là. A mon sens, notre victoire est déjà d’être implantés dans tous ces pays, ce qui représente déjà une bonne frange des métropoles mondiales les plus importantes. Aux Etats-Unis, on se développe sur les mêmes ordres de grandeur qu’en France, depuis 4 ans. Et la réponse est assez similaire, c’est aussi ça qui nous rend confiants sur le fait qu’on puisse aller à l’international dès qu’on se sentira prêts et dès qu’on en aura la capacité aussi. Mais ce n’est pas la priorité pour l’instant.

Le gaspillage alimentaire, c’est un sujet à développer davantage pour Choco ?

C’est la raison d’être de Choco. C’est une réalité, 40 % des denrées alimentaires produites dans le monde sont gaspillées, pour moitié par le consommateur qui ne termine pas son assiette, l’autre moitié c’est toute la supply chain de la food, dont la restauration. En permettant de digitaliser ce poste qui ne l’était pas, on évite les erreurs. Les restaurateurs, les fournisseurs et jusqu’aux agriculteurs-producteurs peuvent mieux gérer leur business et par la même occasion réduire le gaspillage alimentaire. Je trouve qu’il y a eu un basculement énorme avec le Covid sur la nécessité de se digitaliser. Par la data, on peut identifier où se situe le gaspillage et trouver des solutions. On espère qu’un jour le sujet de la commande digitalisée sera une évidence et qu’on pourra passer sur d’autres sujets. »

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