French food tech : des innovations perpétuelles

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Logiciels de paiement, gestion RH, poubelles connectées, traducteurs de menus… le microcosme de la french food tech regorge d’innovations. Nous avons effectué un tour d’horizon de plusieurs initiatives tricolores d’un marché mis en avant, ces derniers jours, au salon Food Hotel Tech.

French food tech
L'entreprise Sunday a digitalisé, via un QR code, la prise de commande ainsi que le paiement. Crédit Sunday.

« On a identifié des choses qui pouvaient être améliorées dans le milieu de la restauration et ça a commencé par la commande et le paiement », introduit Kévin Meert, CSO (responsable du développement R & D) de Sunday, cette start-up du groupe Big Mamma lancée il y a trois ans. L’entreprise a pour ambition de transformer ces deux phases du parcours client au sein des établissements de restauration. L’innovation, qui ne cesse de gagner du terrain dans les CHR, se fait par le biais d’un QR code apposé sur la table. « Le paiement via QR code est notre produit phare, celui par lequel on s’est fait connaître », présente-t-il.

Une année plus tard, Sunday introduit la possibilité de commander via QR code et produit également un TPE intelligent, connecté à la caisse qui met notamment à jour, et en temps réel, la comptabilité d’une enseigne. « On fluidifie les services car on s’occupe de toutes les étapes non essentielles. On rend ce temps aux serveurs pour qu’ils aient plus de temps pour s’occuper des clients. »

Pour lui, le secteur de la restauration commence à peine à embrasser la révolution digitale, et la french food tech a une part importante à prendre dans cette transition. « On a besoin de faire baisser la charge mentale ainsi que la charge administrative des restaurateurs. La french food tech est là pour simplifier la vie du staff et permettre d’attirer de nouveaux talents. On a tous besoin, ensemble, de donner les bons outils pour mieux travailler et que ce métier soit celui qu’on aime, accueillir », souligne Kévin Meert, avant de conclure : « L’avenir de la restauration sera digital ou ne sera pas. »

La French food tech pour faciliter l’embauche

Au rang des initiatives digitales, on retrouve aussi Extracadabra, qui intervient sur la phase de recrutement du personnel. Fondée en 2015, cette start-up a pour ambition de simplifier la gestion et le recrutement des extras. « On a beaucoup d’amis restaurateurs qui nous ont remonté les problèmes de staff, entre ceux qui ne viennent pas ou les pics d’activité durant lesquels ils ont besoin d’avoir du staff très rapidement », explique Rémi Boisson, le fondateur. « On essaye d’apporter des solutions pour répondre au problème de recrutement dans la restauration. Avec notre système, on offre une liberté inédite pour les extras. Les candidats ont la possibilité de travailler à la carte, ce qui est attractif pour eux », souligne-t-il.

iÉquipe Extracadabra
L’équipe d’Extracadabra cherche à révolutionner la question du recrutement en restauration. Crédit Extracadabra.

La start-up se présente comme une marketplace où s’établit la rencontre de l’offre et de la demande. Ainsi, Extracadabra permet la flexibilité autant pour les employeurs que pour les employés. « On essaye d’avoir un équilibre constant entre les besoins et les demandes, afin de satisfaire les deux côtés et de faire matcher les besoins de chacun. Dès qu’un restaurateur fait une demande d’extra, il a une réponse dans les trois minutes », expose Rémi Boisson.

Un secteur qui fonctionne

L’entreprise affiche une forte croissance. Avec un chiffre d’affaires de 4M€ en 2021, elle est passée à 18,5M€ en 2023. La start-up espère grimper à 28M€ de chiffre d’affaires cette année, avec en ligne de mire les Jeux olympiques et paralympiques (JOP). Présente pour l’instant à Lyon (Rhône) et à Paris, l’entreprise va lancer une levée de fonds et espère collecter entre 7 et 8M€, pour se développer dans d’autres villes françaises, parmi lesquelles Lille (Nord) et Bordeaux (Gironde) en priorité.

La french food tech est là pour simplifier la vie du staff et permettre d'attirer de nouveaux talents.
Kévin Meert, CSO (responsable du développement R & D) de Sunday

Par ailleurs, toujours au rang des entreprises du secteur qui espèrent surfer sur la vague des JOP, Teops a développé un logiciel permettant une traduction instantanée des menus en 65 langues. « Le client scanne le menu qui va s’afficher directement dans la langue de paramétrage du téléphone », expose Jean-Philippe Verger, président de Teops Foodtech. En parallèle de ce projet, l’entrepreneur à l’imagination débordante, implanté en Charente, a créé des emballages réutilisables haut de gamme pour la livraison. Une initiative qui n’est que la première pierre à l’édifice d’un autre projet : une nouvelle plateforme de livraison, éthique et écologique. « Les emballages seront récupérés et réutilisés, les livreurs se déplaceront à vélo électrique et seront embauchés sous un statut salarié », énumère le Charentais. Pour ce faire, l’entreprise va lancer une levée de fonds et espère récolter jusqu’à 2M€ pour ce nouveau concept.

La tech, de l’assiette à la poubelle

Autre innovation française en phase de croissance, la jeune entreprise Lafrane cherche à s’insérer dans les cuisines. Ici, c’est la gestion des déchets qui est au cœur de l’innovation, par le biais d’un broyeur/déshydrateur de biodéchets. « Nous sommes rentrés dans cette aventure un peu par hasard, par l’intermédiaire d’un ami spécialisé dans le secteur qui nous a fait part des lacunes concernant la gestion des biodéchets en hôtellerie-restauration », relate Rudy Bellaiche, cofondateur de Lafrane.

C’est à partir de ce constat que les trois associés ont développé leur machine qui vient se placer dans le local à poubelles de l’établissement. « Notre démarche est avant tout écoresponsable, on cherche à gérer les biodéchets à la source. Elle permet également de réduire les coûts de collecte pour les établissements et de les aider à se mettre en conformité avec la loi AGEC », expose-t-il, mettant en avant une réduction des déchets de l’ordre de 80%. Une fois passés à la machine, les biodéchets ressortent sous forme de séchât, et peuvent être utilisés comme terreau.

Toujours concernant les poubelles des restaurants, l’entreprise néerlandaise Orbisk, qui cherche à poursuivre son expansion en France, propose un système de balance connectée. Cette dernière vient se placer sous la poubelle et est associée à un appareil photo qui va prendre un cliché à chaque fois qu’un nouveau déchet est jeté. « Nous avons développé une intelligence artificielle qui va reconnaître chaque aliment jeté et présenter ces informations dans un tableau. Cela va permettre de mettre en lumière le contenu de la poubelle. L’idée est de connaître ses déchets pour s’adapter et réduire les quantités commandées, ainsi qu’ajuster l’ensemble des processus de la cuisine », explique Marion Vasselle, chargée du développement d’Orbisk en France, avançant que leur solution réduit entre 30 et 50% du gaspillage alimentaire.

L’innovation jusqu’aux tables étoilées

L’innovation à la française se retrouve aussi jusque dans l’assiette des consommateurs. L’entreprise Les Nouveaux Affineurs, située à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), commercialise des alternatives végétales au fromage. « L’histoire a commencé en 2017, notre fondateur, Nour Akbraly, est parti du constat que les produits présents sur le marché n’étaient pas satisfaisants, aussi bien gustativement que sur le plan nutritionnel », conte Camille Auger, directrice commerciale.

iLes Nouveaux Affineurs
L’entreprise Les Nouveaux Affineurs propose des alternatives aux fromages laitiers. Crédit Les Nouveaux Affineurs.

La start-up, d’abord incubée à Agro Paris Tech, développe alors une recette à base de noix de cajou, de soja, d’eau, de sel et de ferments, à laquelle elle allie le savoir-faire traditionnel des fromagers. « Il y a eu un gros travail de recherche aussi bien sur la recette que les phases de fermentation et d’affinage, afin d’avoir un goût et une texture qui se rapprochent le plus possible d’un fromage laitier. » L’entreprise propose deux types de produits : les affinés – proches des fromages à pâte molle – ainsi que les frais, des recettes tartinables. Distribuées dans les magasins bio sur tout le territoire, ces alternatives fromagères se sont également imposées sur les tables étoilées, notamment chez le chef Yannick Alléno. La french food tech semble s’installer aujourd’hui comme un vivier d’initiatives et d’idées, qui interviennent aux différentes phases clés de la vie d’un établissement de restauration.

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