La douceur bourguignonne

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Reconnaissable à sa pâte blanche et à sa petite forme, le chaource fait partie des fromages au lait de vache remarquables par leur douceur. Protégé par une AOP et fabriqué entre Bourgogne et Champagne, il incarne un procédé de fabrication à la fois simple et historique.

Son blanc immaculé interpelle sur les étals fromagers. Le chaource AOP, qui naît en pays d’Armance entre Bourgogne et Champagne, se singularise par son goût crémeux, mais aussi par sa technique particulière. « C’est une pâte molle lactique. Son mode de fabrication est tourné vers le développement des bactéries lactiques. On respecte toujours un temps de coagulation du lait pendant douze heures, l’un des plus longs avec l’époisse, qui dure seize heures », signale Didier Lincet, président de l’AOP chaource. Cette période de coagulation se déroule dans des bassines en plastique ou en inox de petites tailles, entre 40 et 100 litres, à l’intérieur desquelles on ajoute de la présure. « C’est une technique longue très ancienne et très traditionnelle, assure le directeur de la Fromagerie Lincet. Les premiers fromages auraient été créés avec cette méthode, qui ne nécessite pas vraiment d’équipement particulier, juste un récipient et un moule. Ensuite, on transfère le caillé dans des moules le lendemain du démarrage de la fabrication. » Le petit-lait s’évacue par des petits trous pendant vingt-quatre heures. Puis, on démoule, on sale et on met sur grille. Les fromages vont sécher pendant quarante-huit heures dans une pièce ventilée.

ARÔMES DE NOISETTE

L’affinage se fait ensuite dans des hâloirs. Pas de caves ; ici, la priorité est donnée à la ventilation. Pendant deux semaines minimum, les fromages vont sécher en surface, pour rester légèrement crémeux à l’intérieur. « On peut pousser l’affinage jusqu’à quatre semaines pour affirmer son caractère, avec une coloration plus jaune et une texture plus coulante à l’intérieur. À six semaines, il a toujours un cœur blanc, un peu friable. Il prend des arômes différents et se complexifie, avec des notes de noisette, de fruit sec ou de champignon », explique le président de l’AOP. Contrairement à son voisin l’époisse, son odeur ne sera jamais très forte, car c’est bien la douceur qui caractérise le chaource. Pour faire naître cette typicité lactique, les vaches de la zone de l’AOP sont nourries à 75 % de la production de l’exploitation, que ce soit pour les fourrages ou les céréales. « C’est très ambitieux, car sur d’autres appellations, ces mesures ne concernent que les fourrages. Mais l’avantage de notre région, c’est que la production est assez diversifiée. Les vaches doivent être nourries au minimum à 30 % d’herbes et les concentrés sont limités à 27 %. »

Comment valoriser le chaource dans l’assiette ? Dès l’apéritif, accompagné d’un vin blanc, mais aussi en tarte, une recette traditionnelle en Bourgogne. Sur un plateau de fromages, il sera apprécié pour son côté fraîcheur indéniable. S’il existe des fromages au lait pasteurisé, l’appellation fait un effort particulier pour privilégier le lait thermisé à 62 °C, « cela permet de sécuriser tout en gardant les arômes. On est proche du lait cru ». Et, bonne nouvelle, le chaource fermier a refait surface après avoir totalement disparu dans les années 1990. Ils sont désormais deux à produire cette belle expression du terroir bourguignon au lait cru, à la ferme.

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