La palette fromagère d’Olivier Nivesse

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Située sur la place du marché Saint-Pierre, en plein cœur de la cité volcanique de Clermont-Ferrand, la Fromagerie Nivesse met un point d’honneur à valoriser le travail des producteurs. Qu’ils soient auvergnats ou issus d’autres contrées, les fromages sont érigés au rang d’œuvres d’art.

Ses fromages s’invitent sur les plus belles tables de la région. Olivier Nivesse a réussi à hisser sa crémerie-fromagerie au rang d’adresse incontournable à Clermont-Ferrand. Pourtant, rien ne le prédestinait à embrasser une carrière au contact des trésors lactés de France et d’ailleurs. Originaire de la région parisienne, Olivier Nivesse a démarré sa vie active dans la restauration, côté salle, en tant que chef de rang dans des maisons étoilées. À L’Huîtrière de Lille, mais aussi chez Andrieux, à Durtol, dans le Puy-de-Dôme. Un passage en Auvergne qui ne sera pas anodin… Alors qu’il travaillait chez Michel Guérard aux Prés d’Eugénie, dans les Landes, il a eu envie de changement et de monter un bar à fromages. « Cela n’existait pas à l’époque, explique-t-il. La tendance des bars à vins commençait juste. Je connaissais les fromages grâce à mon métier, mais j’avais besoin d’en savoir plus. Je suis allé voir le fromager de Michel Guérard, à Pau, pour lui demander de me former », raconte Olivier Nivesse.

S’ensuivent des mois d’apprentissage dans les caves, sur les bancs de l’ENIL (École nationale d’industrie laitière), pour maîtriser non seulement la pratique, mais aussi la théorie. Au fil du temps, dans ses pensées, le bar à fromages se transforme en crémerie, « mais toujours avec des tables pour manger sur place, précise-t-il. Car c’est ce qui me plaît. J’avais vraiment envie de faire découvrir sur place la diversité des fromages ». Retour en Auvergne, avec la ferme intention d’ouvrir sa boutique : « J’ai toujours dit que je reviendrais ici », se souvient-il.

La Fromagerie Nivesse proposent des planches de fromages à déguster sur place.

La Fromagerie Nivesse proposent des planches de fromages à déguster sur place.

Montrer la diversité des fromages

Vendre du fromage en Auvergne, quoi de plus naturel ? Mais Olivier Nivesse s’installe en 2003, place du marché Saint-Pierre, avec la volonté d’ouvrir le champ des gour mandises des Auvergnats sur d’autres pâtes pressées, d’autres bleus et d’au tres horizons caprins. « J’ai bouleversé un peu les habitudes auvergnates, où l’on ne jure que par la fourme d’Ambert et le saint-nectaire », ironise-t-il, tout en gardant évidemment le souhait de valoriser les bons fromages du pays. « Chez moi, on ne trouve pas un, mais quatre producteurs de saint-nectaire différents, issus de quatre zones différentes de l’AOP, pour une lecture plus large du fromage », raconte-t-il. Et finalement, cette ouverture qui piquait au vif la curiosité du Clermontois fan de fromages va faire en partie le succès de la fromagerie Nivesse. Mais pas seulement. Ce lieu emblématique s’illustre non seulement par sa diversité de choix, mais aussi pour la disposition du magasin en vente avant, exposant les fromages comme de véritables pâtisseries, ainsi que pour la sélection minutieuse des produits.

Sur place, les fromages de moins de 5 kg terminent leur affinage, « parce que j’aime quand ils sont marqués en goût. L’idée de la diversité m’intéresse, mais ce que j’aime aussi, c’est montrer quand elle est la plus expressive », dit-il. Par la maîtrise de l’art fromager, Olivier Nivesse tente toujours d’aller chercher le meilleur de chacun des fromages. Une diversité qu’il ne quantifie pas pour autant: « Si vous me demandez combien j’ai de fromages, je n’en ai aucune idée ! Ils tournent selon les saisons, les arrivages, le bon moment de l’affinage. » Quant à la présentation en boutique et la valorisation des produits qui interpellent tout de suite en rentrant, pour Olivier Nivesse, c’est un véritable jeu, au sens noble du terme. « Je passe mon temps à faire ça, en réalité. J’aime trouver le meilleur angle, la meilleure découpe » , le meilleur dialogue entre un morceau de gruyère et un vacherin fribourgeois, entre un langres et un camembert de Normandie. En Auvergne, dans les Vosges jusqu’en Suisse, « j’ai rencontré tous mes producteurs au moins une fois », dit-il. Une rencontre indispensable pour comprendre le produit, voir ses conditions de fabrication et mettre un nom derrière un fromage, mais attention, « je ne vends que ce que j’aime, signale-t-il. Les conditions d’élevage m’interpellent depuis longtemps, ce qui est important, c’est le suivi du troupeau, de l’alimentation, la mise en pâturages… Avec ça, on sait qu’on aura un bon produit ou pas. Je n’ai pas de mérite, ce sont les producteurs qui l’ont. Je suis juste là pour les mettre en scène ». Une vision qui explique cette notion esthétique et créative de la présentation en boutique.

Le leitmotiv d’Olivier Nivesse: montrer la diversité fromagère.

Le leitmotiv d’Olivier Nivesse: montrer la diversité fromagère.

La valorisation du travail des producteurs

Des saint-nectaires récupérés à quatre semaines auprès des agriculteurs, puis affinés entre six et dix semaines supplémentaires sur place côtoient le cantal grand herbage de la Fromagerie des Monts du Cantal à Pierrefort. Le lait de salers est largement valorisé, avec les fromages de la Coopérative de Saint-Bonnet-de-Salers 100 % lait de salers, du Salat Tradition de Charlotte Salat, du salers tradition de Madeleine Serre. De la fourme de Valcivières, produite dans le Livradois-Forez, que s’arrachent les chefs sur leurs plateaux, de la tomme aux artisons de Haute-Loire, ou bien encore les derniers gaperons fabriqués avec de l’ail frais et égouttés au torchon, Olivier Nivesse garde l’excellence chevillée au cœur de son projet. Et le bar à fromages ? La maison le propose avec la possibilité de manger sur place un panachage de pâtes et de régions, selon l’humeur du patron.

« C’est comme un tableau, je pioche dans ma vitrine, comme on choisirait ses couleurs pour composer une toile. Deux heures après, la planche de fromages ne sera pas la même qu’à l’instant T », confie le fromager.

À la table de Jean-Claude Leclerc à Clermont-Ferrand ou de Jacques Decoret à Vichy, la Fromagerie Nivesse s’invite aussi au Plaza Athénée pour le brunch avec son saint-nectaire, sa fourme de Rochefort et son cantal. L’avenir du fromage ? Il est dans les mains des producteurs, « avec une montée en puissance de la qualité. Une réduction des cheptels, mais de meilleurs fromages ». De quoi nourrir encore la soif de découverte, de diversité et l’art fromager d’Olivier Nivesse.

Sur Internet

http://fromagerie-nivesse.fr

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