Si le fromage à raclette s’est largement démocratisé, en Savoie, il est protégé par une IGP, qui lui garantit son caractère ancestral. La raclette de Savoie puise sa singularité dans son lait cru issu des alpages.
Elle marque la saison hivernale, car ce plat convivial rime avec réconfort et partage. La raclette a largement été démocratisée, mais derrière ce mot devenu générique, on trouve la vraie raclette de Savoie, qui bénéficie d’une indication géographique protégée et incarne le savoir-faire local ancestral en la matière. Dans les Alpes, ce fromage date du Moyen Âge. « Dans les alpages, on faisait fondre une demi-meule au feu de bois et on la raclait », raconte Thomas Dantin, président de la filière et producteur de lait. Ainsi est née la raclette. Et contrairement aux croyances, le fromage était surtout consommé en été, avec du pain, pendant que les paysans occupaient leur chalet d’alpages. « La démocratisation a eu lieu lors du lancement du four à raclette inventé par un industriel dans les années 1980, mais il s’est toujours produit de la raclette dans la zone qui s’étend sur les deux Savoies et quelques communes de l’Ain », signale le président de la filière. Face à ce succès fromager national, les producteurs et acteurs de la filière ont œuvré pour protéger la raclette de Savoie et ont obtenu une IGP en 2017, après quinze ans de travail. Il se fabrique aujourd’hui 3 200 tonnes de fromages en IGP, contre 2 000 tonnes au démarrage du label trois ans auparavant. Une progression fulgurante qui représente une petite partie seulement du marché de la raclette qui voit passer chaque année près de 65 000 tonnes de fromages à raclette, produits un peu partout, notamment en Auvergne.
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Il se fabrique aujourd’hui 3 200 tonnes de fromages de raclette en IGP.
Une IGP depuis 2017
Ce qui fait la différence avec une vraie raclette de Savoie IGP ? Le goût, obligatoirement nature. « On ne fait pas de goût fumé, aux poivres ou aux oignons, comme on peut le voir dans les supermarchés. La vraie est au lait cru, et c’est tout. L’affinage doit avoir lieu sur des planches en bois d’épicéa pendant au moins cinquante-six jours », précise Thomas Dantin. La différence se trouve aussi dans la qualité de la pâte, qui ne va pas donner cet effet, parfois huileux, dans le poêlon, « c’est exactement ce que l’on ne veut pas ». Filante, fondante, onctueuse, telles sont les caractéristiques de cette spécialité savoyarde,
« que l’on peut très bien manger froide. C’est un fromage à part entière, qui a aussi toute sa place sur un plateau ». Pour garantir un maximum de caractère, le lait cru fait office de garant, optimisé par un cahier des charges précis, qui interdit les OGM, les aliments fermentescibles et impose 100 % de fourrages issus de la zone de production. Trois races seulement peuvent prétendre à faire naître cette vraie raclette : la tarine, l’abondance et la montbéliarde. Aujourd’hui, ils sont 650 producteurs de lait à faire perdurer ce savoir-faire fromager. Si sa singularité fait des adeptes toute l’année, le produit reste très saisonnier : 85 % des volumes sont vendus entre septembre et mars. Pour combler cette saisonnalité, les producteurs peuvent utiliser leur lait pour produire d’autres fromages locaux, comme la tomme de Savoie ou l’emmental de Savoie.
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