Et avec, je vous mets quoi ?

  • Temps de lecture : 4 min

Exit le fagot de haricots, la tomate provençale et le riz en dôme. Bienvenue dans une nouvelle ère où la notion même d’accompagnement est désuète et où le légume est roi.

L’assiette accompagnée de légumes est tranquillement en train de devenir obsolète. » La sentence de Rémy Lucas du cabinet Cate Marke ting est sans appel. « Cette notion de garniture, d’accompagnement, de légume qui va avec est en train de bouger. Jusqu’à maintenant, on pensait accompagnement végétal mais, aujourd’hui, il y a des plats uniques végétariens mariant légumes, graines, etc. et sans autre forme d’accompagnement. » Le légume revient donc en force sous le prisme de la gourmandise.

Acteur majeur du secteur, Bonduelle Food Service ne s’y est pas trompé. Lors du Sirha 2017, désireuse d’enclencher un nouveau « mouvement », l’entreprise lance son opération « Des légumes qui envoient ! » s’appuyant notamment sur ces données : 34 % des Français se disent flexitariens, 61 % des 18-24 ans envisagent de manger plus de légumes à l’avenir et un chef sur deux souhaite élargir son offre végétarienne. Après cette première étape visant à inspirer les cuisiniers, Bonduelle Food Service entre dans le vif du sujet avec « Le végétal qui envoie » en lançant une gamme – inédite sur le segment – de pépites mariant légumes et légumineuses, couplée à un service dédié aux chefs. Baptisé Greenologie, il propose sur le site inter net de la marque des vidéos tutos, des recettes, des conseils de vente, etc. Petit bonus, les huit conseillers culinaires de la brigade se déplacent dans les res taurants pour des rendez-vous pro à pro et organisent des masterclass en région afin d’aider les clients à construire leur offre végétale.

Quels sont les légumes « à la mode », vous demandez- vous ? « Les choux, répond Rémy Lucas. vert braisé, blanc en salade, fleur rôtie, kale, brocoli, romanesco, pak choï… Les exotiques : patate douce, manioc, igname, gombos, banane plantain…

« 46 % des Français souhaiteraient que les restaurants traditionnels proposent un ou deux plats vegan à la carte. »

Les champignons, les courges et les légumes oubliés : racine de persil, cerfeuil tubéreux, betterave, panais, rutabaga, topinambour… Mais aussi les légumineuses et les graines. » Si, indéniablement, la vague du cru (raw food) déferle sur la restauration, cuire son légume selon telle ou telle technique peut signer un plat. « Le légume va être proposé vapeur, rôti dans son intégra lité comme une viande, braisé, fumé, en coque d’argile. Ou décliné tel un chou-fleur en semoule, en chips et en purée. » Et le riz dans tout ça, a-t-il toujours sa place dans l’assiette ? « Oui, mais ni pilaf, ni créole ! » assène le spécialiste. Il se colore (safran, pesto), se cuit soufflé ou brûlé. Et le risotto reste dans la course. S’il y a bien un accompagnement immuable, sacralisé, en tête des mets préférés Français, à tel point que plusieurs restaurants lui dédient l’intégralité de leur carte, c’est la frite. « On n’en a jamais autant mangé, reconnaît Rémy Lucas. Les gens veulent se faire plaisir et la frite est un produit régressif. On en consomme dans la rue, à la fête foraine… Une barquette de plaisir. Aucun légume ne la concurrence à ce niveau-là ! » Elle réussit la prouesse de se diversifier sans se dénaturer. Certains troquent ainsi la pomme de terre pour de la patate douce, de la banane plantain ou de la carotte, en changent la forme ou l’aromatisent (au paprika ou à la fleur de thym), oublient le bain d’huile et optent pour de la graisse de canard, de bœuf ou du beurre. « Elle devient un plat à part entière. Il y a même une premiumisation de la frite. »

Et demain, qu’est-ce que les chefs vont cuisiner ? « Des algues, des salades d’herbes et jeunes pousses, des fruits et du pain, prédit Rémy Lucas. Le pain ne coûte pas cher, s’imbibe volontiers de sauce, peut être transformé en chapelure, en pain perdu… Il était à côté de l’assiette, il rentre dedans. Le hamburger ? C’est du pain. Le hot dog ? C’est du pain. Le croque-monsieur ? C’est du pain… »

Un peu moins de viande, un peu plus de légumes. L’assiette se métamorphose, les équilibres changent. Mais la gourmandise reste.*

PARTAGER