Garantie perte d’exploitation : Axa gagne du temps, et de l’argent

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Guillaume Aksil, avocat en charge de nombreux dossiers face à Axa, décrypte la stratégie de l’assureur. Après un changement de direction, l’assureur joue la montre et transige à tour de bras en attendant la décision de la cour de cassation en 2022. Plus que jamais pour Axa, le temps est devenu de l’argent.

Le temps, c’est de l’argent. L’adage représente bien l’essence de la stratégie d’Axa depuis le début de l’été. En conflit avec de nombreux restaurateurs pour le remboursement des pertes d’exploitation liées à la Covid, l’assureur joue la montre et blinde sa communication. Récemment, il s’est félicité que « 70 % [de nos clients] ont déjà initié avec nous une démarche de transaction amiable ». Le chiffre fait sourire Guillaume Aksil, avocat engagé sur de nombreux fronts face à l’assureur. « Je n’y crois pas », assène-t-il. « Il faudrait qu’ils nous donnent leur méthodologie, qu’on sache comment ils ont obtenu ce chiffre ». 

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Si ce pourcentage avancé par l’assureur n’est pas vérifiable en l’état, Guillaume Aksil reconnaît qu’une part importante des « petits contentieux » ont certainement été transigés, ou sont en voie de l’être. « Quand vous avez perdu 40.000 euros de chiffre d’affaires, il n’est pas inconscient d’accepter les 20.000 proposés, surtout si vous n’aviez rien demandé en premier lieu. » La stratégie actuelle et assumée d’Axa serait, d’après l’avocat, de proposer 50 % des pertes aux exploitants. Une stratégie à double tranchant. « Pour les plus gros contentieux qui peuvent se chiffrer à 200.000 euros de pertes, leur proposer 100.000, c’est se moquer du monde », déplore Guillaume Aksil, qui assure avoir récupéré « une quinzaine de nouveaux dossiers depuis l’été, des restaurateurs échaudés par la proposition d’Axa qui n’avaient pas nécessairement prévus d’assigner, mais qui ont trouvé la démarche particulièrement fourbe ». 

« Pas une négociation, un rapport de force »

L’avocat regrette également la méthode employée par l’assureur pour transiger. « Il n’y a aucune malléabilité. L’agent met une proposition sur la table, à prendre ou à laisser. On n’est pas dans la négociation, mais dans le rapport de force ». Le cabinet de Guillaume Aksil décompte 20 % des dossiers qui ont mené à un réglement à l’amiable. « Le reste les propositions n’étaient pas acceptables ».

« Si on était dans une partie d’échecs, force serait de reconnaître qu’on fait face à un sacré joueur », reconnaît l’avocat. Il explique qu’avec le changement de direction à la tête de la société, la presque totalité des têtes de la communication du groupe auraient changé. Aujourd’hui, Axa continue de perdre en majorité dans les tribunaux de commerce et les cours d’appel. Mais la véritable partie se jouera à la cour de cassation. Et là encore, l’assureur a joué la montre, attendant le tout dernier moment, le 18 août, pour déposer son argumentaire. « En estimant que la cour va prendre 12 mois pour étudier les dossiers, la décision finale tombera en décembre 2022. Or, le délai de prescription sera atteint en mars de la même année. Donc même si Axa perd en cassation, il sera trop tard pour tous ceux qui ne se sont pas réveillés avant. Finalement, pour chaque jour gagné, et pour chaque restaurateur qui ne bouge pas, c’est énormément d’argent économisé par Axa », conclut Guillaume Aksil.

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