2021, l’année charnière des terrasses de restaurants

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L’épidémie de Covid et la préservation de la planète vont bouleverser le paysage des terrasses d’ici à la fin de l’année. Bonne nouvelle : l’expérience d’extension sur le domaine public pourrait être partiellement prolongée. Mauvaise nouvelle : les mois du chauffage de terrasse semblent désormais comptés. Mais le prix des redevances baissera-t-il pour autant à Paris ?

Comme une éclaircie au milieu de l’orage, l’autorisation d’aménager gratuitement des terrasses éphémères avait ravi la majorité des Parisiens et des touristes, mais surtout les propriétaires de cafés, bars et restaurants de la capitale. Cette habile décision de la mairie de Paris – prise en mai 2020 entre les deux tours des élections municipales – avait permis de faciliter la distanciation physique entre les clients. Alors qu’Anne Hidalgo venait d’être réélue pour un second mandat, la Ville avait même établi une nouvelle charte, à la fin septembre, précisant que ces installations de terrasses seront autorisées (toujours gratuitement) « jusqu’au 30 juin 2021 inclus ». Malheureusement, l’augmentation des cas de Covid-19 a entraîné la fermeture au public de l’ensemble des établissements de restauration depuis le 30 octobre dernier. Un régime contraignant que les bars parisiens observent même depuis le 6 octobre. Alors que la pandémie de coronavirus est toujours au cœur de l’actualité, les extensions de terrasses seront-elles prolongées à nouveau ? Un règlement saisonnier de ces terrasses sera-t-il adopté ?

« Nous souhaitons garder ces terrasses éphémères »

« Olivia Polski, l’adjointe à la maire de Paris en charge du commerce, devait lancer à ce sujet une commission début 2021, mais celle-ci n’est toujours pas en place. Les conditions sanitaires n’aident pas et ont certainement retardé les choses, estime Frank Delvau, président de l’Umih Paris Île-de-France. Les terrasses éphémères devraient perdurer mais nous sommes en attente d’un nouveau règlement. Nous souhaitons conserver ces terrasses et trouver un consensus avec la mairie. » Environ 9 200 cafetiers et restaurateurs auraient bénéficié de ces extensions exceptionnelles installées sur les trottoirs, les places, les terre-pleins ou les emplacements de stationnement et livraison.

La charte des engagements éditée par la mairie de Paris précise que ces terrasses éphémères doivent être closes à 22 heures, afin de « limiter les nuisances sonores ». Par ailleurs, l’établissement qui propose une terrasse éphémère s’engage « à utiliser des dispositifs légers et esthétiques, facilement et rapidement démontables » . Les tables, parasols et autres écrans installés temporairement ne peuvent dépasser une hauteur maximale d’1,30 m. « À la fin de l’été, il y a eu beaucoup de problèmes avec les riverains, dont des plaintes concernant le manque de respect des horaires » , reconnaît Frank Delvau. Ce fut notamment le cas place Sainte-Catherine (Paris 4e ), où l’association Vivre le Marais ! avait pressé le maire de Paris Centre, Ariel Weil, de faire évacuer les terrasses ponctuelles des sept restaurateurs implantés sur cette place (cf. L’Auvergnat de Paris du 5 novembre 2020) . Néanmoins, tous les riverains ne sont pas excédés par ces terrasses éphémères qui ont égayé certains quartiers de la capitale après plusieurs semaines de confinement. D’ailleurs, « une concertation sur un nouveau règlement des étalages et terrasses va être menée dans les prochains mois » (voir encadré) , afin d’intégrer entre autres « cette nouvelle possibilité d’extension de terrasses sur l’espace public », assure la maire adjointe, Olivia Polski.

Le chauffage vit-il ses dernières heures en terrasse ?

Bien que les terrasses « régulières » ou « éphémères » soient toujours fermées au public, certains bars de la capitale proposent des consommations de saison (café, chocolat ou vin chaud) et allument le chauffage extérieur pour permettre à leurs clients de s’abriter du froid lorsqu’ils consomment sur le trottoir. Mais qu’en sera-t-il dans les prochains mois ? L’interdiction des terrasses chauffées semble se préciser sur l’ensemble du pays. Nommée ministre de la Transition écologique l’été dernier, Barbara Pompili n’a pas tardé à se prononcer sur leur sujet. « Pour que les choses soient claires : il n’y a AUCUN report dans l’application de l’interdiction du chauffage des terrasses. Nous avons toujours dit qu’au regard des difficultés du secteur dans un contexte de crise sanitaire, nous appliquerons la mesure après l’hiver 2020-2021 » , précisait le 3 août sur Twitter l’ancienne coprésidente du groupe écologiste à l’Assemblée nationale. La ministre s’était même prononcée sur ce thème, quelques jours plus tôt, dans un entretien au Courrier picard . Selon ses propos, « au-delà de la question écologique, c’est aussi une question de bon sens : c’est une aberration de chauffer l’air extérieur ». Étant donné que la mairie de Paris est « actuellement en attente de décisions nationales sur le sujet » , il est probable que de nombreux Parisiens et Parisiennes aient vécu, cet hiver, leurs derniers instants sur des terrasses chauffées… en buvant un verre débout, avant le couvre-feu.

« Nous souhaitons conserver ces terrasses et trouver un consensus avec la mairie. »

L’interdiction des radiateurs et parasols chauffants pourrait donc s’appliquer prochainement partout en France, comme cela est déjà le cas à Rennes (Ille-et-Vilaine) depuis le 1er janvier 2020. « L’interdiction des chauffages n’a eu aucun impact sur notre chiffre d’affaires. En hiver, on a toujours autant de clients qui choisissent la terrasse. Le bilan est très positif chez nous » , confiait à France Info Dylan Louvel, gérant d’un bistrot dans la ville bretonne. Mais si cette mesure s’applique à Paris, la mairie devrait alors revoir le montant des droits d’occupation des terrasses : le chauffage de celles-ci fait aujourd’hui l’objet d’une taxe. Avant les municipales de 2020, Anne Hidalgo s’était dit « sensible à la question des terrasses chauffées compte tenu de leur impact sur l’environnement » , ajoutant que « la proposition d’interdire les dispositifs de chauffage des terrasses ouvertes ne peut se faire brutalement ». Selon l’étude réalisée par l’institut YouGov il y a un an, 67 % des Français déclarent « fréquenter plus ou moins régulièrement les terrasses chauffées l’hiver » .

« Une concertation sur un nouveau règlement des étalages et terrasses va être menée dans les prochains mois. »

Malgré le confort qu’offrent ces terrasses, plus d’un tiers des Français est favorable à leur interdiction. Et la moitié d’entre eux affirment que « cette mesure devrait être étendue à l’échelle nationale ». Une majorité de la population considère même que « les terrasses chauffées représentent une importante déperdition d’énergie » (67 %) et qu’elles « contribuent à polluer la planète » (57 %). Les consommateurs semblent donc prêts à modifier ces habitudes parfois trop énergivores. Mais les professionnels du CHR attendront, eux, des contreparties à cette interdiction.

Un nouveau règlement cet été

ÉTALAGES ET TERRASSES

Le règlement des Étalages et Terrasses – qui permet « d’assurer un partage harmonieux de l’espace public entre ses différents usagers et les commerçants bénéficiaires d’autorisations d’occupations » – sera prochainement révisé, dix ans après son approbation par arrêté municipal (6 mai 2011). «Une concertation» autour de ce nouveau règlement sera menée « dans les prochains mois », nous a confirmé Olivia Polski, adjointe à la maire de Paris en charge du commerce et de l’artisanat. Les questions autour des terrasses éphémères, du chauffage extérieur et de l’aménagement des terrasses fermées (paravents, écrans de protection) seront notamment abordées durant cette concertation. « À ce jour, les objectifs fixés pour cette révision consistent à simplifier la tarification. Cette révision devrait aboutir cet été », précise Olivia Polski.

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