La tendance se met aux verres

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Transparents mais loin d’être invisibles, les verres prennent de plus en plus de place sur les tables françaises. Après une tendance marquée par le choix de la vaisselle, les professionnels de la restauration semblent à présent accorder une importance particulière à la verrerie qu’ils achètent.

verre
Image d'illustration. Crédits : DR.

Verre pressé ou verre soufflé, ce matériau recyclable à l’infini est inévitablement associé à l’art de la table. Que l’on parle de gobelets, de verres à pied ou encore de contenants pour boissons chaudes, la verrerie « a le vent en poupe », affirme Nicolas Bigot, directeur commercial chez La Rochère. Et pour cause, avec la mode du tout « instagrammable » les clients ne cherchent plus seulement à partager un verre ou un repas, ils recherchent une « expérience client ». C’est ce qu’avance Mathieu Franck, responsable produit et commercialisation chez Lusini : « Les restaurateurs et les hôteliers attachent de plus en plus d’importance à l’esthétique et à la présentation. Le client recherche quelque chose de bon mais également de beau et de bien présenté, pour flatter le regard ». Pour cela, les marques se sont mises au diapason et proposent aujourd’hui une offre très diversifiée d’éléments en verre. Ainsi, chaque restaurateur peut habiller ses tables avec des contenants qui jouent le rôle de « créateurs d’ambiances ».

De plus, comme dans beaucoup de secteurs, la premiumisation joue un rôle clé. Le « made in France » est alors scruté par les acheteurs, tandis que la solidité constitue un atout de taille pour certains restaurateurs. Achat indispensable dans un établissement CHR, les verres sont un secteur d’entrée important pour les verriers. « Nous nous sommes rendu compte que bien souvent nos nouveaux clients commencent par l’achat de verres dans leurs premières commandes. Ce sont des produits abordables et qui sont souvent réassortis », détaille selon Mathieu Franck. Les restaurateurs ont alors le choix entre différents tarifs et gammes, selon les fournisseurs. Cela passe par les plus solides (au design indémodable), les plus accessibles (aux lignes tendances) ou encore des formes vertigineuses, tout en finesse, mais qui risque la casse au moindre déséquilibre.

Un élément de décoration

Striés, ciselés, vintage, loin des célèbres gobelets de la marque Duralex, en 2023, les verres se parent de leurs plus beaux atouts. « Nous avons une forte demande de la part des professionnels qui recherchent des produits créatifs », explique Nicolas Bigot. Selon lui, les verres ne sont plus perçus comme de simples contenants mais bien comme des éléments qui apportent « de la richesse sur une table ». Tandis que les vaisselles colorées et teintées d’une âme artisanale se multiplient, les verres dépareillés colonisent les services. « On voit beaucoup de mélange de styles », argumente le directeur commercial de La Rochère. Des produits qui participent à l’identité d’un établissement et que le consommateur découvre dès son installation en salle. « Lorsque l’on arrive au restaurant, bien souvent il y a uniquement des verres sur la table. C’est un bon moyen de se différencier », explique Clémentine Camus, cheffe de produit verrerie pour le groupe Arc.

Alors pour susciter le fameux « effet waouh », les verres n’arborent pas seulement des formes différentes, ils se colorent. En effet, les professionnels de la verrerie parlent alors d’un regain d’intérêt pour la couleur, et plus particulièrement pour des coloris « nude », une variété de teintes allant du beige au rose pâle. D’autres éléments de verrerie comme les carafes ou encore les cloches et les bonbonnières connaissent un retour en grâce dans certains établissements. « Ce sont des produits que nous vendons très bien et qui apportent du cachet pour les présentations », témoigne Mathieu Franck. Un propos néanmoins nuancé par le mixologue Matthias Giroud : « Selon moi, on voit beaucoup moins cette tendance sur les carafes dans les CHR, car l’eau en carafe ne représente aucun intérêt financier ». Un avis que partage Clémentine Camus, qui évoque quant à elle un intérêt particulier des restaurateurs pour des contenants plus haut de gamme et ayant un atout gustatif comme les carafes à décanter.

Des caractéristiques techniques qui évoluent

À en croire les professionnels de la verrerie aujourd’hui, la mode est à la finesse. « Buvants fins » ou « verres élancés », Clémentine Camus ne manque pas de qualificatif pour évoquer les nouvelles caractéristiques des verres et plus spécifiquement de ceux destinés à la consommation de vin. « Tout cela apporte du confort et de l’élégance », argumente la cheffe de produit. Perchés sur de longues jambes, ces contenants se parent également de « cuvettes très étalées et plates », permettant ainsi au consommateur de se saisir du verre par le pied mais aussi au restaurateur de limiter les traces d’eau sur les tables. Beaux et design, ces éléments présentent également un intérêt pour la dégustation.

Le choix du contenant a plus d’importance sur des cocktails simples.
Matthias Giroud, Mixologue

Si certains restaurateurs utilisent des carafes à décanter pour leurs meilleurs cépages, bien souvent le vin passe directement de la bouteille au verre sans avoir eu le temps de s’aérer. Pour répondre à cette problématique, les verriers ont travaillé leurs produits pour ne pas nuire à la dégustation. « Notre gamme Open up a été pensée spécialement pour des vins jeunes », détaille-telle. Ce genre de verres disponibles chez différents fabricants offrent au client la possibilité de profiter du vin et de l’intégralité de ses arômes. Autre nouveauté, le poids des contenants. « Auparavant on préférait des verres lourds, aujourd’hui la légèreté est mise à l’honneur », avance Matthias Giroud. Plus fins, plus délicats et bien souvent plus chers, ces verres présentent un désavantage considérable, la casse. Néanmoins, ils se marient parfaitement à certains usages comme le service du vin ou encore des cocktails. Si la porcelaine était historiquement le matériau privilégié pour le service des boissons chaudes, depuis quelques années le verre tend à la remplacer. En effet, pour Nicolas Bigot, il participerait à l’expérience client, toujours dans un but de premiumisation : « Que ce soit pour le service du thé ou du café, la transparence est très agréable. C’est esthétique et plus vivant lorsque l’on voit, par exemple, les feuilles de thé infuser dans une tisanière ». Une valeur ajoutée qui conquiert les amateurs en quête de produits de qualité. Par ailleurs, la montée en gamme de certains verres permet aux professionnels d’augmenter le coût de leurs boissons. « Le choix du contenant a plus d’importance sur des cocktails simples », affirme Matthias Giroud.

En effet, si les clients recherchent des compositions avec peu d’ingrédients, comme le spritz, les décorations sont elles aussi réduites. Il faut alors que le contenant fasse toute la différence d’un établissement à un autre. « Avant les verres étaient très catégorisés selon les usages. Aujourd’hui, on les mélange et on marie les styles », poursuit le mixologue avant d’ajouter : « On voit également de moins en moins de verres publicitaires dans les établissements ». Chaque restaurateur choisit ainsi minutieusement sa verrerie. Elle participe de son image de marque et certains n’hésitent pas à faire graver ou accoler leur logo sur leurs produits. Une démarche qui reste le plus souvent réservée aux chaînes et gros groupes hôteliers, comme l’explique Clémentine Camus. « Concernant la personnalisation, il nous faut un minimum de 5.000 pièces commandées ». Un volume qui ne correspond pas à tous les établissements et à tous les budgets. Enfin, pour résumer les tendances, Matthias Giroud rappelle l’importance du choix des verres qui deviennent alors le pendant de « l’assiette pour chef ». Un objet permettant de mettre en scène sa création et de la sublimer.

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