Deauville/Trouville-sur-Mer, les Parisiens plus présents que jamais

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Le 21e arrondissement de Paris ? Il n’est pas à chercher en Île-de-France mais plutôt du côté du Calvados, avec Deauville et Trouville-sur-Mer. En effet, les Parisiens entretiennent depuis presque 200 ans une relation privilégiée avec ces deux stations balnéaires de la Côte fleurie. Une relation qui n’est d’ailleurs pas prête de s’éteindre.

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Deauville. Crédits : Aurélien Peyramaure

« Quand il y a un train qui arrive, il y a plein de Parisiens », lance d’emblée Maïlys Guillet, responsable de la salle du Central, brasserie trouvillaise . « Il n’y a quasiment que cela. Ils viennent les week-ends à Trouville-sur-Mer. C’était fait pour devenir le nouveau Saint-Tropez. Il s’agit de la station balnéaire des Parisiens », poursuit-elle. Ainsi, Trouville-sur-Mer, mais également Deauville, font partie des communes situées sur la Côte fleurie, au nord-est du Calvados. Si ce dernier représente « la huitième destination touristique départementale en France, il s’agit d’une destination de proximité », indique Karl Joly, directeur de Calvados Attractivité.

En effet, « 40% de la clientèle est étrangère et la majorité est française. La moitié de celle-ci est originaire d’Île-de France », précise-t-il, évoquant une clientèle « à la recherche de destinations littorales ». Stéphanie Sublemontier, attachée de presse de l’office de tourisme de Trouville-sur-Mer, confirme cette tendance. « La clientèle touristique est française à 85%, le restant venant du Benelux, de l’Allemagne et du nord de l’Europe. Parmi la clientèle française, 73 % arrivent d’Île-de-France, dont 38% de Paris », abonde-t-elle.

Et pour cause, la relation entre la capitale et les deux stations balnéaires du Calvados se trouve loin d’être récente. En effet, « Paris a fait Trouville-sur-Mer », estime même Stéphanie Sublemontier. L’histoire remonte alors à la première moitié du XIXe siècle et fait en particulier référence à un artiste. « Charles Mozin, peintre du XIXe siècle, a été l’un des premiers redécouvreurs de Trouville-sur-Mer. Il est arrivé en 1825, à l’époque où la commune ne constituait qu’un petit port de pêche. Il a exposé ses toiles dans les salons parisiens, ce qui a fait connaître la ville. On a alors commencé à avoir une clientèle parisienne. Au départ, il s’agissait surtout d’artistes qui logeaient dans de petites auberges. Puis le bouche-à-oreille a fait son travail », raconte ainsi l’attachée de presse de l’office de tourisme.

Le développement est alors rapide et sa notoriété acquise. « En l’espace de seulement 20 ans, Trouville-sur-Mer est devenue une station balnéaire prisée. Dès les années 1830-1840, la commune devient un lieu de villégiature très prisé de la haute société parisienne », précise-t-elle. Néanmoins, qu’en est-il de Deauville ? À cette époque, les marécages occupent les lieux. Il faut en effet attendre les années 1860 pour voir émerger la station balnéaire de Deauville, par le biais du duc Charles de Morny, demi-frère de Napoléon III. La ville lui a en outre rendu hommage en lui dédiant un lieu important, la place Morny. Le développement de Deauville a été tel que « la petite soeur a rattrapé la grande », admet Stéphanie Sublemontier.

Aux origines du groupe Barrière

De plus, l’essor du tourisme sur le littoral normand est aussi lié au développement du ferroviaire. La première gare de Trouville-sur-Mer date de 1865. Face à l’afflux de touristes, il a été décidé de l’agrandir pour donner lieu à la gare de Trouville-Deauville telle que nous la connaissons aujourd’hui, livrée en 1931. « Ce qui a développé ces deux stations balnéaires par rapport à la clientèle parisienne est la ligne ferroviaire créée entre Paris et Deauville, qui permettait au début du XXe siècle de circuler plus rapidement et plus facilement », confirme par ailleurs Frédéric Bessonneaud, directeur du pôle hôtelier du groupe Barrière à Deauville.

Le groupe spécialisé dans l’hôtellerie s’est d’ailleurs développé en parallèle de la croissance des deux communes, et en partie grâce au tourisme en provenance de Paris. Il compte désormais trois hôtels – Le Normandy (5 étoiles), Le Royal (5 étoiles) et L’Hôtel du Golfe (4 étoiles). Mais également deux casinos, un sur chacune des deux communes, ainsi qu’une vingtaine de restaurants. « Deauville et Trouville-sur-Mer, c’est là où tout a commencé, explique Frédéric Bessonneaud. Trouville-sur-Mer, et ensuite Deauville. Eugène Cornuché, à l’époque directeur du casino de Trouville, créé en 1912 le casino de Deauville, afin d’augmenter l’offre de jeu et de répondre à la demande. Mais surtout, fort du constat de cette clientèle parisienne qui vient sur Deauville, il souhaite les faire séjourner et crée donc l’hôtel Le Normandy. »

Paris a fait Trouville-sur-Mer.
Stéphanie Sublemontier, Office de tourisme de Trouville-sur-Mer

Bien que la relation entre Deauville, Trouville-sur-Mer et les Parisiens remonte à près de 200 ans, elle n’a pour autant aucunement été abîmée par les effets du temps. « Le weekend à Deauville fait écho pour les Parisiens. Cela a une notoriété très forte par rapport à d’autres lieux », insiste ainsi Frédéric Bessonneaud, avant d’ajouter : « Je pense que certains weekends, dans nos établissements, si je me réfère au Normandy, nous accueillons 90 % de Parisiens. Tous ces établissements peuvent devenir leur résidence secondaire. Certains clients sont venus avec leurs parents et grands-parents, ils viennent maintenant avec leurs enfants. »

Néanmoins, Philippe Augier, maire de Deauville, réfute le qualificatif de 21e arrondissement de la capitale. Il souhaite, en effet, montrer la manière dont la commune a évolué. « Les Parisiens sont nombreux à venir ici. Ils ne viennent pas parce qu’il s’agit du 21e arrondissement, ce n’est pas un bon slogan. C’est un lieu que les Parisiens apprécient parce que c’est un autre lieu. Le terme de station balnéaire ne veut plus dire grand-chose. Aujourd’hui, nous avons complètement dépassé cela. L’objectif a été de rendre la ville viable toute l’année », défend-il. Ce dernier avance en outre un chiffre de deux ou trois ouvertures de restaurant chaque année, en guise de preuve du dynamisme de Deauville.

Ainsi, la saison touristique ne se limite pas à l’été. Au contraire, elle se révèle extrêmement large, démarrant aux vacances de Pâques pour se terminer en octobre, avec même de belles performances lors des fêtes de fin d’année. Ce constat est dû notamment à la riche offre d’événements culturels, comme le Festival du cinéma américain de Deauville, qui se déroule traditionnellement en septembre. Il ne faut pas oublier non plus le monde équestre, avec les ventes de yearlings (ces chevaux pur-sang âgés d’un an) qui se tiennent durant l’été, ou encore de nombreux colloques. « Les séminaires importants nous font travailler hors période estivale, avec une centaine de congrès chaque année, précise Yann France, président de l’Umih Calvados. Nous avons la chance de travailler avec la clientèle locale davantage en semaine. Et le week-end, nous travaillons bien du fait de la proximité avec Paris. »

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