Hors norme est le qualificatif qui vient à l’esprit quand on parle du restaurant narbonnais Les Grands Buffets de Louis Privat. 460 places assises, près de 350 000 clients par an, 45 personnes en cuisine, 50 desserts maison, 70 vins au verre… et un gaspillage de seuls 5 g par couvert. Décryptage d’une réussite menée d’une main d’expert-comptable.
Le plus gros restaurant de France en termes de chiffre d’affaires ne se trouve pas à Paris, mais à Narbonne. Les plus importants opérateurs de la capitale observent d’ailleurs médusés l’aventure de Louis Privat, qui est parvenu à attirer 342 000 clients l’année passée dans cette sous-préfecture de l’Aude, en réalisant un chiffre d’affaires de 14,5 M€.
L’établissement a vu le jour en 1989 sous l’impulsion de Louis Privat. À l’époque, il s’agit d’une cafétéria, mais l’idée d’un généreux buffet est déjà d’actualité. L’ex-expert-comptable propose alors une formule à 48 francs (7,31 €) et parvient à attirer des foules largement constituées de groupes.
Trente ans plus tard, ceux-ci ne représentent plus que 10 % de la clientèle et Les Grands Buffets se sont embourgeoisés : fontaine à homards, neuf sortes de foie gras, 110 fromages composant l’un des plus beaux plateaux de France… La formule de ce buffet tout compris se négocie aujourd’hui à 37,90 €. N’étant pas homme à s’endormir sur ses lauriers, Louis Privat et son épouse Jane viennent d’investir 2,5 M€ dans l’extension de leur complexe de restauration, qui ne disposait que de 300 places assises. Le millier de clients accueilli chaque jour se trouvait un peu à l’étroit, surtout en haute saison.
Pendant des années, les responsables ont dû gérer du surbooking en essayant de renouveler les tables.« Mon équilibre économique repose sur ma liste d’attente »,concède l’entrepreneur. Mais cette pratique avait parfois du mal à passer. Car 60 % de la clientèle arrive de l’extérieur de la région, voire de l’étranger : difficile dans ces conditions d’essayer de précipiter le départ de convives qui ont parcouru plusieurs centaines de kilomètres pour s’attabler chez vous.
Pour pallier cette carence, Louis Privat a donc décidé d’augmenter la capacité d’accueil de 160 places. Et pas question pour ce visionnaire de mégoter sur la transformation en se contentant de repousser les cloisons. Le cahier des charges imposé aux architectes évoquait une tente dressée pour une partie de campagne du Roi-Soleil. Les grands noms des antiquaires français ont été appelés à la rescousse pour constituer le décor et le résultat est royal. Outre la paroi rocheuse où coule en permanence un filet d’eau, l’espace intègre également un système de chauffage et de climatisation sophistiqué qui permet d’assurer un confort permanent à la clientèle, hiver comme été.
Mais Louis Privat insiste avant tout sur sa volonté d’offrir une prestation à la hauteur des promesses des Grands Buffets, car tout ici repose sur un rapport qualité-prix millimétré.« Qu’est-ce qui fait que tous les restaurants fonctionnent avec des coefficients ? Il faut sortir de ce raisonnement,insiste Louis Privat.En étant généreux dans l’offre, j’ai fait le pari que le public répondrait présent. Ma rentabilité joue sur un ou deux points, quand les autres visent systématiquement une marge de 15 %. Pour ce faire, je me suis doté d’outils informatiques qui me permettent une gestion au cordeau. »Ceux-ci collectent et analysent chaque jour un nombre colossal de données. Louis Privat sait par exemple qu’en moyenne, chaque client consomme 49 g de foie gras ou 1,75 huître.
Cela lui permet de jauger précisément les quantités nécessaires pour chaque buffet, une projection d’autant plus facile à réaliser que le restaurant fonctionne quasi exclusivement sur réservation.« Ainsi, contrairement à ce que l’on peut croire, nos pertes sont très faibles et concernent essentiellement les plats cuisinés, qu’il est interdit de conserver,insiste le gestionnaire.Au maximum, elles représentent 5 kg par jour. Ramené au couvert, le gaspillage est de 5 g, soit beaucoup moins que dans un restaurant classique. »
Autre facteur de rentabilité, la puissance d’achat des Grands Buffets vis-à-vis des fournisseurs. Par exemple, les 55 tonnes d’huîtres consommées chaque année représentent grosso modo la production moyenne annuelle d’un ostréiculteur de la région.
Mais s’il maîtrise étroitement son coût matière, Louis Privat doit veiller à maintenir ses coûts de personnel à un niveau acceptable. Car le restaurant emploie 110 personnes en vitesse de croisière et jusqu’à 150 en période estivale. La formule buffet permet des économies par rapport à une prestation classique, car le service reste limité à l’accueil, au dressage et au débarrassage. Il mobilise en période normale 35 personnes en salle, quand la cuisine en requiert près de 45, dont sept pour la seule pâtisserie. L’équipe officie principalement de 8 h à 16 h et seuls quelques cuisiniers sont présents le soir pour animer les postes chauds, à l’instar de la rôtisserie.
Carte sur table
Chiffres d'affaires
14,5 M€
Places assises
460
Effectif
110 à 150 l’été
Ouverture
365 jours par an, de 12 h à 14 h 15 et de 19 h à 22 h
Ticket moyen
42 €
Formule
37,90 €, gratuit pour les moins de 6 ans, 18,90 € de 6 à 10 ans
Buffet
plateau royal avec homard, 9 variétés de foie gras, 9 jambons à la coupe, turbot entier, cochon de lait et agneau des Pyrénées à la broche, 50 desserts maison, etc.
Vins
87 000 bouteilles écoulées en 2018, vendues au prix producteur ; carte exclusive du Languedoc-Roussillon
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Activité
Buffet - Restaurant
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AdresseRond Point de la Liberté, 11100 Narbonne
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