Émilien Rouable, comme à la maison

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À Villecresnes, dans le Val-de-Marne, Émilien Rouable et sa femme Virginie y sont chez eux. Aussi, en juin 2022, ils ont décidé d’y ouvrir un établissement à leur image : simple et chaleureux. C’est donc dans une atmosphère détendue que le couple et son équipe proposent une cuisine recherchée et portée sur les légumes.

Emilien Rouable
Émilien Rouable. Crédit : DR.

Quand on rencontre Émilien Rouable, on est marqué par son côté expansif et son franc-parler. En réalité, il n’y a pas de barrière avec le chef : « Ici, je reçois les convives comme chez moi. Pour moi, ce n’est pas un restaurant mais une maison. » Se sentir comme chez soi… c’est aussi la raison pour laquelle Émilien Rouable a ouvert son établissement à Villecresnes (Val-de-Marne) précisément. « J’ai grandi ici, à Villecresnes. Je suis un fier banlieusard », s’amuse-t-il. De son enfance, il retient les plats que cuisinait sa mère. Celle qu’il qualifie d’« excellente cuisinière » l’a élevé toute seule. « Je me rappelle qu’elle détestait les cuissons régressives et préférait les préparations longues. Elle cuisinait des produits simples. Surtout, elle n’hésitait pas à prendre son temps. »

Elle lui a transmis cette passion pour le goût des bonnes choses, ce qui a été important dans son orientation professionnelle. Pourtant, la cuisine n’était pas son premier choix. « Au début, j’étais plus tenté par la boulangerie. J’adore ce contact avec la pâte, la matière. Mais l’idée de me lever à 3 h tous les matins m’a très vite découragé », confie-t-il en riant. À la suite de l’école hôtelière, Émilien Rouable a enchaîné les expériences dans des établissements prestigieux pendant près de 20 ans tels que Fauchon (Paris 8e ), Fouquet’s (Paris 8e ) et Maxim’s (Paris 8e). Avant de lancer son propre restaurant, le chef officiait à l’hôtel Saint James Albany (Paris 1er). Et c’est à la suite de désaccords avec la hiérarchie que la vision d’ouvrir son propre lieu s’est imposée. « J’avais envie de liberté et d’indépendance, donc je me suis lancé », commente-t-il. L’idée derrière ce projet est d’offrir aux habitants de banlieue une table que l’on ne trouve « habituellement que sur Paris ».

Mais le cuisinier n’a pas plongé tout seul dans cette nouvelle aventure. Son épouse, Virginie Rouable, l’a accompagné alors qu’elle travaillait dans une banque. Elle a en effet tout abandonné pour lui et ce restaurant. « C’est mon binôme et je la remercie de m’avoir suivi. » Non sans crainte, elle découvre le métier et finit par prendre ses marques. « Je sais qu’elle a beaucoup stressé, passé des nuits blanches. Mais maintenant, elle gère totalement. Son plus grand point fort, c’est son sens relationnel », reconnaît le chef de l’Inattendu. Des sueurs froides, Virginie Rouable en a eu plus d’une fois, et particulièrement le jour de l’ouverture. « Rien ne s’est passé comme prévu », raconte son mari. Un directeur de salle renvoyé une heure avant le début du premier service, un four en panne et l’angoisse qui monte… « En fait, ce métier, ce sont les montagnes russes. » Néanmoins, ce lancement ne les a pas abattus ; 18 mois plus tard, l’équipe est rodée et le succès au rendez-vous. À L’Inattendu, rien n’est dit d’avance. « Notre carte est évolutive donc on n’a pas de menu type. » Le menu Carte blanche (47 € en quatre temps, 89 € en six temps) est pensé et préparé au jour le jour, suivant les arrivages, la météo, l’ambiance… Quand vous arrivez, on vous « propose un menu sans vous l’imposer ».

« Mon épouse a tout laissé tomber pour moi et cette aventure folle.»
Emilien Rouable, L’Inattendu, à Villecresnes (Val-de-Marne)

L’équipe flexible s’adapte aux envies et goûts des convives. Cependant, le chef met un point d’honneur à mettre en avant les légumes : « On prépare des légumes braisés, glacés, cuisinés avec une touche surprenante. » Loin d’être un restaurant vegan ou végétarien, sublimer les végétaux relève avant tout de la « logique » pour Émilien Rouable : « C’est simple, on propose ce que la nature impose. Les légumes viennent de la terre, il est normal pour moi de les travailler. À part pour le plat principal, le reste du menu est presque tout le temps à base de végétaux. » Le prochain objectif du cuisinier est de collaborer uniquement avec des producteurs en circuit court. « On travaille déjà avec des fermes d’à côté, mais on voudrait faire plus. »

Un autre aspect caractérise L’Inattendu, c’est son côté convivial. En arrivant au restaurant, on entre dans une petite maison typique de campagne, comme si on pénétrait dans une intimité. L’ambiance y est décontractée. « Je pense qu’une des raisons pour lesquelles les convives reviennent, c’est parce qu’on les accueille bien. On les reçoit comme s’ils venaient à la maison. » D’ailleurs, Émilien Rouable ne dit pas « clients » mais « convives » : « Je trouve que le mot “client” met une distance. » Et que serait une maison sans ses hôtes ? En cuisine et en salle, le chef travaille avec une dizaine de collaborateurs. « Selon moi, la clé de la réussite, c’est d’être bien entouré. » L’équipe représente le cœur même du restaurant : « Quand on est le chef, on crée une équipe, certes, mais le plus important c’est de savoir fédérer. On peut avoir les meilleurs éléments du monde, mais si on ne sait pas les faire travailler ensemble, ça ne fonctionne pas. » À L’Inattendu, tout est une question d’équilibre. « Avec ma femme, on a conscience qu’on leur doit beaucoup et on est très fiers d’eux », conclut le restaurateur.

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