Emmanuel Planche : le défi de la restauration

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Après avoir passé l’essentiel de sa carrière de cuisinier chez des traiteurs, Emmanuel Planche s’est lancé cette année dans la restauration traditionnelle. Depuis avril, l’homme de 53 ans est à la tête de son premier établissement, l’Art-Kose, nouvelle enseigne où se trouvait jusqu’ici le Bistrot Zen, ouvert par le chef étoilé puydômois Cyrille Zen.

Emmanuel Planche
Emmanuel Planche, chef et propriétaire associé de l’Art-Koze, à Montpeyroux.

Pour ce Clermontois « issu d’une famille d’ouvriers », la cuisine est une passion qui résonne depuis l’enfance. En effet, cela fait près de 50 ans qu’Emmanuel Planche se plaît à être derrière les fourneaux. «Déjà tout petit, c’est moi qui cuisinait avec ma mère. À l’âge de 5 ans, je m’amusais déjà à remuer un peu de riz cru à côté d’elle », se souvient le chef du restaurant l’Art-Koze, installé dans la charmante commune escarpée de Montpeyroux. C’est donc tout naturellement qu’il entame un apprentissage de trois ans, en CAP cuisine, avant de rejoindre l’armée… comme cuisinier.

Durant son service militaire, Emmanuel Planche exerce « uniquement à quai » dans le sous-marin Flore, les frégates du Duquesne et du Suffren, ou encore le porte-avion Foch. Son entrée dans la vie active s’effectuera au sein d’une société de traiteur. Un secteur dans lequel il évolue pendant 32 ans, notamment chez Breuil et Henri Mazal, à Clermont-Ferrand.

Après cette longue expérience professionnelle, il est sollicité pour travailler en restauration collective. « Mais cela a été un échec total, j’ai fait sept mois. Je me suis demandé : “qu’est-ce que je fais là ?”, s’interroge-t-il encore. Faire 3 000 repas scolaires, voire 4 000, ce n’était pas moi. C’était de l’abattage ». Après cet épisode, Emmanuel Planche retrouve le goût de son métier dans une société à Volvic, où il intègre une cuisine centrale de 200 m2, entouré de cinq autres cuisiniers. « On faisait de l’export pour les magasins de la Maison Labonne, à Paris, on leur fournissait tous les plats cuisinés. C’était des fiches recettes carrées, j’aimais bien. Et après, j’ai rencontré Cyrille Zen, qui cherchait à vendre », résume l’intéressé.

« Je ne serai pas capable de passer derrière Cyrille Zen »
Emmanuel Planche, Chef et propriétaire associé de l'Art-Koze, à Montpeyroux

Depuis le mois d’avril, le Bistrot Zen (du célèbre chef puydômois) a donc laissé place à l’Art-Koze. Dans cette aventure entrepreneuriale, Emmanuel Planche s’est associé à deux autres personnes : Anne Rolley et Bernard Conche. Heureux de diriger les cuisines de son propre restaurant, cette transition n’a néanmoins pas été une évidence pour le nouveau chef du lieu. « Je me suis dit que je ne serai pas capable de passer derrière Cyrille Zen, c’est un ancien étoilé Michelin, finaliste de Top chef… ça va être très compliqué, confie Emmanuel Planche. J’ai laissé passer un délai de quatre mois, j’étais toujours à Volvic, et un matin je me suis dit : “on ne baisse pas les bras, on y va, on fonce”. J’ai donc repris contact avec Cyrille, on a refait un entretien, puis j’ai travaillé une semaine avec son personnel pour faire la passation. Et après, direction le notaire, la banque… tous les papiers. »

Le personnel d’Art-Koze est le même qu’au Bistrot Zen. Celui-ci s’affaire à offrir – tous les jours de la semaine – une cuisine bistronomique. L’ancien chef de la Bergerie de Sarpoil (étoilé en 2011) ne souhaitait pas céder son établissement au tout-venant. Cyrille Zen a même été un conseiller de choix pour le repreneur de son « Bistrot », ouvert en 2014 dans l’un des plus beaux villages de France. « Il m’a aidé un peu à travailler ma première carte, et je ne vais pas le cacher, il a soulevé deux-trois petits soucis que j’avais », ajoute Emmanuel Planche. Le finaliste de l’édition 2012 de Top Chef lui a d’ailleurs suggéré d’intégrer un mets qu’il n’aurait pas osé intégrer tout seul. « J’ai une spécialité qui est le pâté en croûte. On en a parlé un peu, et il m’a dit de le mettre à la carte », explique le chef d’Art-Kose, surpris du succès rencontré par ce produit incontournable des charcutiers-traiteurs.

Lors de l’ouverture au printemps, le cuisinier préparait chaque semaine jusqu’à trois pâtés en croûte – façon Richelieu, avec un insert foie gras, pistache et abricot. « Je vais le remettre à la carte au début de l’automne, sous une autre forme », prévoit-il déjà.Durant l’été, l’Art-Kose propose une carte composée de deux entrées, deux plats et trois desserts. Le menu entrée-plat ou plat-dessert est offert pour 24 €, tandis que le menu complet est au tarif de 35 €. L’enseigne de Montpeyroux a le luxe de bénéficier du travail d’une pâtissière (la seconde de cuisine), mais le problème du recrutement reste tenace. « Il me manque une personne à temps plein. Et vu le lieu, pour venir de Clermont ou d’Issoire il faut un véhicule. Et puis les horaires, on finit à 23 heures ou 23 h 30… », reconnaît Emmanuel Planche, à qui il est arrivé de dormir dans son véhicule après le service du soir. Mais ce passionné ne regrette rien, au contraire.

La clientèle de l’Art-kose a été au rendez-vous en avril comme en mai. Et après un mois de juin plus calme, celui de juillet est bien reparti. « Le midi nous faisons 35 couverts, et entre 60 et 70 couverts le soir », se satisfait le chef, assis sur sa terrasse. À l’écoute de son personnel – composé de six employés (trois en cuisine et trois en salle) – le jeune « patron » s’avère fier quand les gens s’arrêtent devant son restaurant : « Même s’ils ne rentrent pas, ils ont vu ma carte ».

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