Maxime Dethomas : il transforme l’étain en zinc 

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En 2019, Maxime Dethomas a racheté les Ateliers Nectoux, le leader français des zincs, ces comptoirs en étain qui reviennent en force depuis 30 ans dans les brasseries du monde entier. À 51 ans, cet ancien expert-comptable est animé par une ardente passion pour ce nouveau métier qui « crée du lien ».

Maxime Dethomas
Maxime Dethomas. Crédit : Jean-Michel Déhais.

Dans son showroom de Puteaux (Hauts-de-Seine), Maxime Dethomas charge dans une camionnette deux antiques comptoirs. «Ce mobilier a plus d’un siècle. On peut le constater en observant sur le bois du fond à l’intérieur, les traces de scie manuelle», indique-t-il. Quatre ans après avoir racheté les Ateliers Nectoux, il maîtrise pleinement son sujet. Pourtant, auparavant, cet ancien expert-comptable n’avait aucune idée précise de cette profession. Il passait son temps à conseiller les entreprises en difficulté.

Aujourd’hui, il est capable d’aller souder un comptoir en étain à l’autre bout du monde. Il met d’ailleurs un point d’honneur à se rendre chez chacun de ses clients lors des poses. «C’est toujours un événement pour l’acheteur, assuret-il. Nos fabrications sont réalisées sans obsolescence programmée. Quand je pose un comptoir dans un établissement d’Alain Ducasse, il est systématiquement présent. Lorsque nous avons installé celui de la nouvelle Samaritaine, Bernard Arnault s’est déplacé. Ainsi, ma présence est la moindre des choses.»

En 2019, il a poussé la porte des Ateliers Nectoux après avoir entendu que le patron, Thierry Nectoux, souhaitait passer la main. La transition s’est opérée en douceur. D’abord, Maxime Dethomas a travaillé six mois dans l’entreprise avant de la racheter. Puis, Thierry Nectoux l’a accompagné deux années durant, lui transmettant son savoir-faire. Les deux hommes ont d’ailleurs de nombreux points communs. Ils ont tous deux épousé une Dacquoise et peuvent se targuer d’avoir une grand-mère auvergnate. Un atout important lorsqu’on sait qu’une majorité de clients de l’entreprise est issue du Massif central.

Depuis l’arrivée de Maxime Dethomas, les effectifs de l’entreprise de Dax sont passés de cinq à huit personnes. Parlant couramment anglais et espagnol, il a conforté les positions de l’entreprise à l’étranger : 40% du chiffre d’affaires de sa société est en effet réalisé à l’export. L’entrepreneur a aussi dopé l’activité à destination des particuliers, qui représente désormais 15% des ventes. Maxime Dethomas, qui a passé la première partie de sa vie à conseiller des entrepreneurs en difficulté, n’a pas jeté son dévolu sur une société moribonde. Nectoux affiche une croissance régulière depuis une trentaine d’années. « J’en avais assez d’agir dans l’urgence pour éviter le pire, explique-t-il. Avec Nectoux, j’ai voulu construire dans le temps. »

« J’ai voulu construire dans le temps. »
Maxime Dethomas, Ateliers Nectoux, Dax

Dans les années 1980, Nectoux n’avait pourtant pas fière allure. Les brasseries s’étaient détournées de l’étain au profit de l’inox et du Formica. « Maurice Nectoux, le père de Thierry, maintenait l’entreprise à flot en faisant de l’entretien, rappelle Maxime Dethomas. Voyant son activité se réduire de jour en jour, il songeait sérieusement à fermer l’atelier de la rue de Charonne [Paris 11e ], pour se reconvertir en chauffeur de taxi. Deux facteurs sont venus tout relancer. Il a reçu une commande d’un architecte américain qui créait alors l’Express, un établissement à succès, rue de Charonne. Au même moment, André Camboulas, très en vue à l’époque, équipait le Cochon à l’oreille [Paris 1er] d’un comptoir en étain. La mode était relancée. » Aujourd’hui, l’étain se répand dans les établissements du monde entier, notamment aux États-Unis, à l’image de ce petit bar français, le Pastis, à New York, dont le comptoir signé Nectoux est apparu dans un épisode de Sex and the City, offrant ainsi à l’établissement une renommée considérable. À tel point que lorsque le quartier a été rasé, le patron a rebâti un Pastis beaucoup plus grand, arborant un comptoir de 16 m de long.

Depuis lors, deux autres Pastis ont vu le jour, l’un à Washington et l’autre à Miami. Avec à la clé des commandes de pistes d’étain de 18 m. Aidé par la passion, Maxime Dethomas a parfaitement endossé son costume d’étainier. Il est fier d’être artisan dans une société labellisée « Entreprise du patrimoine vivant », où les méthodes de travail ont peu changé depuis sa création en 1930. Il est aussi heureux de créer des objets vecteurs de convivialité, faisant sienne la devise d’Antoine Blondin : «Le zinc [surnom populaire du comptoir en étain, NDLR] est le seul métal conducteur d’amitié.» D’ailleurs, avant son arrivée chez Nectoux, Maxime Dethomas était déjà concerné depuis longtemps par cet univers des CHR.

En 1998, il rejoint son frère en poste à Phnom Penh, au Cambodge. «Dans l’hôtel, nous avons rencontré Philippe Gloaguen, le patron du Guide du routard, se rappelle-t-il. Il nous a conseillé d’accompagner le tourisme naissant en créant une école d’hôtellerie gratuite. Nous l’avons fait en 2002. Elle s’appelle Sala Bae, et chaque année 150 élèves en sortent diplômés. Je continue à veiller sur ce projet qui implique toute ma famille. D’ailleurs, après sa retraite, mon père a dirigé durant trois ans cette école.»

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