Sébastien Mayol, la communication mène à tout

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Sébastien Mayol recevra cette année la Bouteille d’or dans son restaurant Oh Vin Dieu ! Une consécration pour cet Auvergnat qui, après avoir occupé de hautes fonctions dans le secteur de la communication, a tout abandonné pour créer le bistrot dont il rêvait lorsqu’il était client.

Sébastien Mayol
Sébastien Mayol. Crédit : Jean-Michel Déhais.

Il a fallu moins de deux ans à Sébastien Mayol pour positionner son restaurant Oh Vin Dieu! (Paris 8e) parmi les incontournables de la bistronomie parisienne. Son carnet de réservations affiche complet en permanence et il est conseillé de s’y prendre plus d’une semaine à l’avance pour y trouver une place dans cette petite salle qui en contient 40, et où il règne une joyeuse convivialité. Déjà, l’établissement figure en bonne position dans le palmarès des meilleurs bistrots parisiens du guide Pudlowski, du Figaro ou du Lebey. Les Amis des bistrots parisiens ont, quant à eux, recommandé l’adresse, comme en témoigne un écriteau situé en évidence dans la salle. La Bouteille d’or a couronné cette réussite éclair. Tradition du vin vient en effet de lui décerner son célèbre trophée.

Habituellement, les nombreux patrons, anciens et nouveaux, de restaurants – qui constituent la cheville ouvrière de cette association – attendent quelques années d’antériorité avant de désigner un établissement méritant, de manière à s’assurer que les bases sont solides. Mais dans le cas d’Oh Vin Dieu !, l’évidence sautait aux yeux ; ne serait-ce qu’en matière de vins. Avec 700 références, Sébastien Mayol écrase à plate couture la concurrence. Les caves de son restaurant ne lui suffisent pas pour stocker les 6 000 flacons dont il dispose. Il a dû louer quelques caves dans le quartier et même une dans les crayères des Yvelines. Et il ne compte pas s’arrêter là.

Son objectif est de proposer un millier de références à la clientèle et de justifier ainsi pleinement son choix d’enseigne. Mais surtout, chaque vin est soigneusement sélectionné à travers de véritables propriétés. Les négociants n’ont pas le droit de cité. En outre, la carte des vins d’Oh Vin Dieu ! est remarquablement construite. Alors que les cartes riches en références sont souvent touffues, voire illisibles, Sébastien Mayol a conçu son livre de cave comme un modèle de concision avec un classement par régions, par appellations et par vignerons, ainsi qu’un coloris devant chaque vin pour indiquer la couleur de la bouteille. Plus étonnant, il fait venir les photos des producteurs afin de les transmettre à un dessinateur graphique, qui homogénéise les portraits de vignerons figurant à côté de chaque référence. Le patron du bistrot de la rue Treilhard maîtrise parfaitement la communication, et pour cause c’est son premier métier.

« Peu de restaurateurs peuvent se vanter de détenir trois CAP. »
Sébastien Mayol, Oh Vin Dieu !, Paris 8e

De Science Po au bistrot 

Ce Moulinois est d’abord passé sur les bancs de Sciences po, puis de Skema, une prestigieuse école de commerce niçoise, avant de travailler dans la communication. Un parcours qui l’a conduit à la direction commerciale de la régie publicitaire du groupe Lagardère. À 52 ans, il décide pourtant de tout abandonner pour se lancer dans la restauration. Ses ambitions sont modestes, il souhaite créer une seule adresse : le petit bistrot de ses rêves. « Ce n’est pas évident, explique-t-il, de quitter l’équipe de 30 personnes que je dirigeais pour aller dans un secteur où on travaille davantage et où on gagne moins.» Il faut croire que l’idée trottait dans sa tête depuis un moment. Il reconnaît avoir préparé et obtenu trois CAP (cuisine, pâtisserie et charcuterie) parallèlement à son ancien parcours professionnel. «Peu de restaurateurs peuvent se vanter de détenir trois CAP, précise-t-il. Je ne travaille pas en cuisine et je laisse le chef agir, car il est bien meilleur que moi. Mais ma formation me permet de discuter avec lui et d’affiner les recettes.» Sébastien Mayol est animé par un sens méticuleux du détail.

Dans son temple de la convivialité, le décor, l’accueil, le service sont organisés de façon millimétrée. Ce patron sait parfaitement se mettre à la place du client, car durant plus de 30 ans, il a fréquenté assidûment les restaurants au point de devenir inspecteur du guide Lebey. C’est d’ailleurs avec son directeur, Pierre-Yves Chupin, qu’il a relancé l’Association de sauvegarde de l’œuf mayonnaise (ASOM), rassemblant 1 500 membres et décernant un prix chaque année. «Depuis des années je me préparais à passer de l’autre côté du comptoir, confie-t-il, mais je ne savais pas à quel moment j’allais appuyer sur le bouton.»

Le jour où il a franchi le rubicon, il a défini son propre modèle marketing, avec d’abord un ticket assez élevé (70 €) qui lui donne les moyens de ses ambitions. Ensuite, par confort personnel, il a choisi de fermer le week-end et de ne réaliser que trois dîners par semaine. «Je mets un point d’honneur à être présent à chaque service. Mais dans mon ancien métier j’avais des week-ends. J’ai souhaité conserver ce rythme de vie», justifie-t-il. Il reconnaît aussi que ce choix lui a permis de fidéliser son équipe, constituée de sept employés. C’est la raison pour laquelle Sébastien Mayol s’est installé dans ce quartier du 8e arrondissement, qui abrite une large clientèle d’affaires.

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