VAE : miser sur le click & collect

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Passer commande par Internet, puis venir chercher son plat au restaurant. Conditions sanitaires obligent, les restaurateurs doivent s’adapter et proposer une nouvelle forme de restauration. La vente à emporter a une vraie carte à jouer…

Click & collect
Click & collect. Crédit : Alice Mariette.

« Les Français ne sont pas encore prêts à se rendre en masse dans les établissements », avertit d’emblée Rémi Ohayon, consultant en communication et président d’Api & You. Pour lui, plus que jamais, les professionnels de la restauration doivent se réinventer et proposer au plus vite une offre de vente à emporter, notamment grâce au click & collect. Objectifs : assurer la survie des établissements, mais aussi renouer avec les clients. « Je ne souhaite pas que les restaurants lancent uniquement des plats à emporter, car les traiteurs savent le faire, ce que je veux, c’est qu’ils importent la magie de leur table à l’intérieur des foyers », conseille Rémi Ohayon, ajoutant que le marché est en train de se structurer et que seuls les restaurateurs les plus agiles parviendront à sortir leur épingle du jeu.

Les restaurants étoilés se lancent dans la vente à emporter. Ici le PraiRial (Lyon), le restaurant gastronomique de Gaétan Gentil. Photo Ⓒ Alice Mariette


UN PRIX JUSTE

Pour les restaurateurs uniquement habitués au service à table, difficile de déterminer à quel prix proposer ses plats –  chauds ou froids –  en takeaway. « Il faut vendre à emporter dans un positionnement de tarifs cohérents, estime le consultant. Je pense que les gastros qui font des offres autour de 35 €, ce n’est pas assez cher. » Selon lui, il faut maintenir son tarif habituel pour rester dans son marché et éviter de perdre des clients. En outre, le restaurateur doit s’adapter aux différents besoins des clients. D’un côté, les repas du midi pour ceux qui travaillent, entre 10  € et 20  €, et de l’autre, les dîners et moments festifs, avec des budgets plus importants. « Les Français fêtent des anniversaires, ils vont se retrouver en famille, il faut leur apporter une prestation de plats cuisinés qui soient presque équivalent aux formules existantes, si un bistrot avait un menu à 35  € le week-end, il faut qu’il vende le même prix », note Rémi Ohayon.

Le click & collect : le nouvel outil incontournable des restaurants. Photo Ⓒ Lise Chastang


PROMOUVOIR SA NOUVELLE OFFRE

Dans ce contexte, la communication est essentielle. «  La première chose à faire est de poser la vision de son entreprise, en quelques lignes, car pour communiquer, il faut avoir des choses à dire », explique le consultant. Il s’agit ensuite d’activer des points de contact. « Il faut rentrer dans le télé- phone portable du client, avec des campagnes de SMS ou en créant des groupes WhatsApp par exemple », ajoute-t-il. L’objectif : nourrir sa communauté avec de nouvelles offres. Il est donc temps de récupérer tous les numéros des clients ayant déjà fait une réservation. « Avant de chercher des nouveaux clients, il faut communiquer avec les siens », précise le communicant. En outre, pour atteindre des prospects, les réseaux sociaux sont presque incontournables. Les publications sponsorisées, notamment par géolocalisation, qui permettent d’atteindre les habitants du secteur, peuvent s’avérer très efficaces. « Pour les restaurateurs, il est important de se former à l’utilisation des outils et des fonctions publicitaires des réseaux », pense Rémi Ohayon. Il ne faut donc pas hésiter à partager sa nouvelle offre sur Facebook ou Instagram. « Il faut comprendre que nous nous sommes bridés pendant des années à faire des prestations dans un lieu confiné et là, nous avons la capacité d’exporter le savoir-faire des maîtres d’hôtel et des cuisiniers dans une multitude de lieux de vente en même temps », estime le consultant. Pour lui, en plus des activités de ventes à emporter, les restaurants doivent proposer des prestations de chef et de maître d’hôtel à domicile. « Je pense qu’en la matière, la France sera un modèle pour demain », conclut-il. 


POINT DE VUE LÉGAL 

Si pour les restaurants qui proposaient déjà de la vente à emporter, la question ne se pose pas; pour les autres, il convient de vérifier si son bail le permet. « Si le restaurateur veut conserver une activité de vente à emporter et faire en sorte qu’elle devienne pérenne, alors qu’il reprend une activité de restaurant normal, il doit impérativement demander l’autorisation à son bailleur, car il développe une activité supplémentaire qui n’est pas prévue dans son bail », avertit maître Cédric Séguin, avocat en droit des affaires, du cabinet CS avocats associés. Il s’agit d’envoyer sa demande par lettre recommandée ou par huissier de justice auprès du bailleur, qui dispose d’un délai de deux mois pour donner ou non son accord. À noter : l’absence de réponse vaut pour accord.

Le PraiRial, un étoilé Michelin propose de la vente à emporter

Dans la presqu’île de Lyon, les clients sont nombreux à attendre leurs plats gourmets devant le PraiRial, le restaurant gastronomique de Gaëtan Gentil. Depuis la mi-avril, en pleine période de confinement, le chef a décidé de proposer des menus en click & collect. Les clients commandent et règlent en ligne 48 heures avant de récupérer leurs repas au restaurant. « On voulait avoir un semblant d’activité, faire tourner le matériel, mais aussi retrouver les clients », explique Gaëtan Gentil. Dans le restaurant, ils ne sont que deux. Lui-même en cuisine et sa femme Céline Boinon, habituellement en salle. « Cela fait du bien de renouer le contact avec les clients, c’est cela notre métier », glisse-t-elle. Après avoir proposé des menus à emporter les mercredis et samedis, le couple de restaurateurs a décidé de se concentrer uniquement sur les week-ends et de monter en gamme. « Nous faisions environ 60 clients les mercredis, et 80 les samedis, pour un chiffre d’affaires d’environ 4000 € par semaine », détaille le chef. Chaque semaine, il propose un nouveau menu, en fonction des arrivages. « On essaie de garder notre ADN, mais ce ne sont pas les plats habituels, explique-t-il. Je cherche avant tout à proposer un menu équilibré, bon et qui se réchauffe bien à la maison. » Le chef ne souhaite pas forcément continuer cette activité une fois le restaurant rouvert à sa capacité normale. Par manque de temps, de place pour stocker, mais aussi parce qu’il estime qu’il s’agit d’un autre métier. Il réfléchit toutefois à proposer des paniers contenant des produits et des fiches recettes, pour cuisiner à la maison. 

Le chef Gaétan Gentil. Photo Ⓒ Alice Mariette 

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