Les rosés persistent dans leur insolente croissance

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Faute de goût pour les uns, symbole de fraîcheur pour les autres, les rosés sont la deuxième couleur du marché et leur influence dépasse désormais largement le cadre estival. Le succès conjugué à une baisse de l’offre pourrait toutefois conduire cette année à une hausse plus sensible que de coutume.

L’engouement pour les vins rosés ne se dément pas d’année en année. En 2014, ils représentaient déjà 30 % de la consommation des vins tranquilles en France, largement devant les blancs. Le phénomène est certes accentué en France, où la consommation des rosés a progressé de 32 % en quinze ans, mais même au niveau mondial leurs ventes progressent beaucoup plus rapidement que la moyenne des ventes de vins. Actuellement, la forte demande permettrait une sérieuse montée en gamme de certains rosés, notamment en Provence, où les prix sont régulièrement revus à la hausse..

Des volumes moindres en 2017

L’AOP Côtes de Provence revendique le leader ship, avec 34 % de part du marché des rosés AOP en France. Des dernières vendanges en 2017 ont été issus 780 000 hl. Le filon est si prospère que des esprits malins racontent que certains vignerons de cette région ont oublié les recettes de vinification des rouges et des blancs qui faisaient autrefois leur fortune… Encore faut- il préciser néanmoins que 2017 s’affirme comme un millésime médiocre, notamment en termes de rendement. Un phénomène général en France. Le recul de la production par rapport à 2016 atteint 12 %. Il faut se référer aux 167 millions de cols de ces vins millésimés 2016 qui avaient été commercialisés en 2017 (+ 10,3 %). Alors que les volumes étaient au rendez- vous, les prix ont augmenté de 3,3 % en grande distribution cette année-là. Cette indication laisse à penser que les prix grimperont davantage cette année alors que l’offre de rosés est en baisse en Provence, première région en France productrice de vins rosés AOP, comme dans l’ensemble du vignoble français. Sans compter que la production française peine déjà, avec des récoltes satisfaisantes, à rassasier la consommation locale en pleine envolée, et doit alimenter en outre le marché mondial, car la France est le premier exportateur de rosés.

La Loire, deuxième région productrice

Les rosés du Val de Loire sont également très présents sur le marché. Avec 549 000 hl produits en 2016, ils occupent la deuxième place des régions productrices d’AOP en rosé.

Le Val de Loire bénéficie d’un éventail de 14 appellations et dénominations produites sur 9 500 hectares. Consommés le plus souvent dans l’ouest de la France et à Paris, on retrouve également ces rosés dans toutes les autres régions : 23 % des CHR proposent des rosés de Val de Loire. Le cabernet d’Anjou, en appellation d’origine con trôlée, est dans le peloton de tête : il représente 72 % des volumes. « Le rosé Val de Loire a une vraie place à se faire en restauration, appuie Bruno Prévot, directeur marketing et commercial de Loire Propriétés. Il répond non seulement au goût actuel des consommateurs du fait de sa sucrosité naturelle et de son accessibilité, mais il est aussi adapté aux accords avec des cuisines du monde. » Autre acteur de taille sur ce marché des AOP : les languedocs rosés, qui, avec 27 millions de cols chaque année et 38 % de croissance en sept ans, séduisent de plus en plus de consommateurs.

Il ne faut pas pour autant négliger le marché des rosés IGP.

L’une des principales appellations productrices, Pays d’Oc IGP, a vu ses volumes de rosés croître de 9,4 % entre les vendanges 2015 et 2016. Lancée avec le cinsault pendant la canicule de l’été 2003, cette saga des rosés d’Oc a pris une importance considérable.

Aujourd’hui, 26 cépages sont autorisés à la vinification et la production totale atteint 1,3 million d’hectolitres, ce qui positionne Pays d’Oc comme le premier producteur de vins rosés IGP en France. Le vin tranquille rosé n’est pas le seul à progresser, le champagne rosé gagne également du terrain.

Les vignes du domaines de l’Olivette à Bandol (Var), l’un des plus anciens de l’appéllation Bandol

La bulle rosée poursuit son ascension

Le champagne rosé bénéficie d’un réel engouement sur le marché français. En dix ans, ses ventes ont plus que doublé.

Il représente aujourd’hui 17 % des ventes de champagne et la quasi-totalité des producteurs élabore du rosé. Le marché international n’est pas en reste.

Avec un chiffre d’affaires une nouvelle fois record, le champagne rosé poursuit sa croissance en valeur en 2017 (+ 0,5 %). Il représente 11,5 % des exportations de champagne, avec un prix moyen qui progresse de 4,6 %.

Finalement, le seul endroit où les rosés ne sont pas les bienvenus demeure la restauration gastronomique. Si l’on en croit une étude de Sommit, premier assistant sommelier digital dédié aux restaurateurs, qui a passé à la loupe 100 établissements étoilés Michelin français, ils n’occuperaient que 1 % de la carte de ces restaurants.

Cela ne veut pas dire que la clientèle de ces établissements ne boit pas de rosé, mais que le choix qui leur est proposé est restreint. Il serait peut-être temps de coller aux attentes générales…

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