Jean-François Istin : le serial entrepreneur de la bière
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Après une première expérience concluante en dynamisant la brasserie Britt, Jean-François Istin dirige trois bars à bière connectés, baptisés La Baleine déshydratée. Ce concept fait la part belle à de grands établissements proposant en moyenne 30 becs où les clients se servent. Retour sur le parcours hors du commun d’un passionné de malt et de houblon.
Jean-François Istin a soufflé il y a peu ses 60 bougies, un anniversaire récompensé par la réussite de son parcours entrepreneurial. L’homme est à la tête de trois établissements baptisés La Baleine déshydratée ; un concept qui fait la part belle aux fontaines à bière en libre-service et qui a essaimé à Saint-Nazaire (44), Lorient (56) et Quimper (29).
Ce Breton, qui a introduit le KeyKeg (un fût recyclable n’utilisant pas de CO2) en France en 2011 et lancé ses tireuses connectées quelques années plus tard, ne manque pas d’idées pour mener à bien sa vision du CHR.« Nous utilisons un compresseur d’air pour remplacer le CO2 et nos fûts vides ne pèsent que 1 kg. Le KeyKeg permet à la bière de rester bonne pendant un mois grâce à un système de poche. Cela permet en plus d’avoir des gammes de bières sur 30 becs, sans aucun problème de tirage »,assure-t-il.
Ce dispositif complète le système de tireuses connectées « ND Mac » que Jean-François Istin a créé avec son équipe. Les clients remplissent ainsi leurs verres en parfaite autonomie sur les fontaines à bière, grâce à une carte à charger au comptoir. En salle, le personnel assure la promotion des bières du moment et présente une offre de snacking premium.
Un esprit d’innovation
Si la crise sanitaire a freiné le développement de ce restaurateur atypique, il n’en a pas toujours été ainsi. Jean-François Istin appartient en effet à l’univers desserialentrepreneurs dont l’esprit d’innovation force le respect. Après une école de commerce et une carrière dans l’informatique et le marketing, en Allemagne et en France, le Breton est revenu à ses premiers amours : la bière.« Combrit, mon village d’origine dans le Finistère, est jumelé avec Rothaus, une ville bien connue pour sa brasserie où j’ai d’ailleurs travaillé dans ma jeunesse »,explique-t-il.
« Nous étions des pionniers sur le marché des bières artisanales. »
En 2001, il rachète, aux côtés d’Hervé Corbel, la brasserie Britt à Trégunc (29), puis quelques années plus tard, les brasseries Dremwell et Celtika, pour donner naissance au groupe Brasserie de Bretagne qui produisait, lors de sa vente en 2012, pas moins de 25 000 hl de bières artisanales sous les marques Saint-Erwan, Britt ou encore Dremwell.« Nous étions des pionniers sur le marché des bières artisanales aux côtés de la brasserie du Mont-Blanc ou Pietra par exemple »,se félicite-t-il. Il a ainsi fallu jouer des coudes pour rivaliser sur un marché qui était alors dominé par des grands brasseurs ou des brasseries familiales régionales à l’instar de Duyck, dans le Nord, ou de Meteor, à l’Est.
La naissance de la Baleine déshydratée
Quand il se sépare de Brasserie de Bretagne, Jean-François Istin s’investit dans la promotion du KeyKeg, dispositif lancé en France :« Aujourd’hui, on trouve de nombreuses brasseries comme Brewdog qui l’utilisent à travers le monde. Ce produit a une grande vertu, c’est la durée de conservation de la bière (30 jours) et son côté écologique. »Par la suite, il ajoute au KeyKeg son concept de fontaines à bière en libre-service qu’il installe dans des bars créés pour l’occasion.« Nous avions du mal à convaincre le monde du CHR d’utiliser nos fontaines, alors nous avons créé un réseau d’établissements comme La Maison jaune à Quimper ou La Maison bleue à Brest. Enfin, nous avons lancé La Baleine déshydratée »,retrace Jean-François Istin. Un premier établissement ouvre à Saint-Nazaire en 2018, suivi par Quimper en 2019 et Lorient en 2020.
À Saint-Nazaire, sur la place du Commando, la Baleine déshydratée connaît un beau succès. Ouvert de 10 h à 2 h, l’établissement emploie jusqu’à 25 personnes en saison et une douzaine l’hiver. Cette « brasserie connectée » propose une trentaine de becs à bière et trois becs à vin où le client peut directement se servir en actionnant la manette de tirage pression. Une carte préalablement chargée permet de sélectionner les quantités désirées. La Baleine déshydratée bénéficie d’un catalogue de 600 références fournies par des brasseries partenaires, mais aussi par la BACK (Brasserie artisanale connectée de Kemper), une société appartenant à Jean-François Istin.
Des lieux de vie imposants
Pour rendre les trois affaires rentables, le Breton a misé sur d’imposants lieux de vie capables d’accueillir un important volume de clientèle (500 m² à Saint-Nazaire ou 800 m² à Lorient).« Nous nous inscrivons dans la tendance des lieux de vie où les gens souhaitent se retrouver mais sont aussi en quête d’une expérience », résume l’exploitant. Le ticket moyen s’établit à 20 €, le midi comme le soir, dans les trois brasseries connectées. Jean-François Istin a par ailleurs équipé l’unité de Quimper d’une microbrasserie qui fournit 20 % des volumes diffusés dans les trois établissements :« C’est un petit outil de production qui permet de brasser 500 l par 500 l, l’objectif est de laisser aller sa créativité. Toutes les semaines, nous réalisons une bière différente. »À l’avenir, le Breton entend consolider ses positions avant de développer son enseigne et de conquérir d’autres régions.