Accro au zinc !

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Patrick Gicquel vient d’obtenir la Coupe du meilleur pot. Cet ancien garçon de café qui s’est hissé à la tête d’un des entrepôts parisiens de France Boissons a repris du service, une fois la retraite venue, à la tête de Chez Antonin, un bistrot de quartier. Après avoir conseillé ses clients durant des décennies, ce patron démontre de belle manière de quoi il est capable.

En 2018, Patrick Gicquel s’est résolu à revêtir le tablier de garçon de café qu’il avait raccroché trente-trois ans plus tôt pour prendre en main Chez Antonin, un bistrot de quartier des environs de la place de la Nation. Il reconnaît qu’il est retourné derrière le comptoir « à reculons, pour ne pas rester sur un échec. Auparavant, j’avais toujours réussi ce que j’avais commencé ». Jeune retraité, il aurait pu avoir d’autres aspirations après une brillante carrière dans la distribution, qui l’a notamment amené à diriger pour France Boissons les 180 personnes de l’entrepôt de La Villette. Mais voilà, en 2016, sur un coup de cœur, il avait racheté le bistrot voisin de son bureau. Le patron partait à la retraite et, pour aider une serveuse à reprendre l’affaire, Patrick Gicquel a racheté le fonds. Deux ans plus tard, l’établissement est au bord de la liquidation financière. La gérante s’est laissé déborder par des problèmes qui la dépassaient et le propriétaire a alors fait face à ses responsabilités en reprenant les rênes de l’entreprise.

Au bout de quelques mois, il avait relancé Chez Antonin, qui est aujourd’hui devenue une adresse courue, à tel point que l’Académie Rabelais vient de lui attribuer la Coupe du meilleur pot. Avec beaucoup de modestie, Patrick Gicquel assure qu’il n’a pas modifié beaucoup de choses pour effectuer cette relance : « Dorin, le chef qui travaillait déjà dans les murs, est resté et nous donne satisfaction. Simplement, nous avons correctement accueilli nos clients et une ambiance assez familiale s’est instaurée. Ensuite, nous avons apporté beaucoup de soin dans la sélection des produits, en travaillant avec des produits frais ». Le patron a également mis en place une très belle sélection de vins issus directement de chez les vignerons. Comme en attestent les cartes des vignobles des villages du Beaujolais accrochées au mur, Patrick Gicquel fait la part belle à cette région.

Dans sa carrière de distributeur, Patrick Gicquel a souvent aidé, par ses conseils, certains clients à redresser la barre et il connaît parfaitement les recettes du succès. Il s’est donc efforcé de les appliquer Chez Antonin. Toutefois, il rappelle que les conseilleurs ne sont pas toujours les payeurs : « C’est un métier éreintant, insiste-t-il, où l’on travaille souvent plus de quatorze heures par jour, à raison de six jours par semaine. À la fin du service, rares sont ceux qui ont le courage de se remettre en question. » Patrick Gicquel a débuté sa carrière dans le CHR à l’âge de 17 ans. D’origine bretonne, Patrick Gicquel est arrivé enfant en région parisienne, à Orsay. Bon élève, il avait obtenu le bac avec un an d’avance et fréquentait la fille du patron du Tabac de la gare d’Orsay, qui deviendrait ensuite son épouse. « Je me préparais à entrer en BTS, se souvient-il, et mon futur beau-père m’a demandé si je savais combien gagnait un garçon de café. Quand il m’a annoncé la somme, je lui ai aussitôt proposé mes services. »

« À la fin du service, rares sont ceux qui ont le courage de se remettre en question »

Cette aventure a duré sept ans, mais lorsque le tabac est mis en vente, Patrick Gicquel décide de suivre une autre voie. Des semaines de soixante à quatre-vingts heures à travailler dans l’ambiance enfumée du tabac ont eu raison de ses bronches et, à 25 ans, sur la recommandation d’un représentant en boissons aveyronnais, André Boissier, il intègre l’entrepôt La Brasserie de Villeneuve-la-Garenne, sous les ordres d’Henri Cambon. « J’étais représentant multi-carte, je vendais de la bière Meteor, mon produit fétiche, mais je travaillais aussi avec France Boissons Nord, raconte-t-il. J’ai eu la chance d’apprendre le métier auprès d’André Boissier et d’Henri Cambon, deux grands professionnels. » Le jeune représentant est vite devenu incontournable dans le paysage de la distribution parisienne. Il a même créé sa propre structure avec quelques employés. Au début des années 2000, il se rapproche de plus en plus de France Boissons et, en 2004, José Pires-Gomez lui confie la direction commerciale de l’entrepôt Villette. Il endosse ces nouvelles responsabilités avec une relative aisance, mais quelques années plus tard, lorsqu’il devient directeur général de l’entrepôt, il doit relever un vrai défi dans la maîtrise des rouages de la logistique. Toujours capable de se remettre en question, il franchit sans problème cette nouvelle étape. Son air de bon vivant et sa nonchalance affichée cachent en effet une volonté de fer. Cycliste confirmé, il fut capable de rallier Bordeaux à Paris en deux jours et détient le fameux brevet des cent cols. Habitué du chemin de Saint-Jacques, il a rallié Compostelle à deux reprises. Pour un homme de ce calibre, le redressement de Chez Antonin constituait une formalité.

Chez Antonin – 4, rue Jaucourt, 75012 Paris

Tél. : 01 43 43 27 44

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