Chaîne des Puys : un joyau encore brut

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Classée au patrimoine mondial de l’Unesco en 2018, après deux refus successifs, la chaîne des Puys se dévoile et participe à la renommée de son département, le Puy-de-Dôme. Olivier Bianchi, maire de Clermont-Ferrand et président de la métropole, dresse le bilan des retombées quatre ans plus tard.

La chaîne des Puys a été classée au patrimoine mondial de l'Unesco en 2018. Image d'illustration.
La chaîne des Puys a été classée au patrimoine mondial de l'Unesco en 2018. Image d'illustration.

Le 8 juillet 2018, la chaîne des Puys entre au patrimoine mondial de l’Unesco. Cette inscription est le fruit d’un travail de longue haleine, mené par le département du Puy-de-Dôme et son ancien président Jean-Yves Gouttebel. Elle constitue une opportunité franche pour le tourisme sur le territoire. Un tourisme encore naturel,« sans forcer », selon les propres mots d’Olivier Bianchi, maire de Clermont-Ferrand et président de Clermont Auvergne Métropole. L’édile revient sur les raisons pour lesquelles il voit cette inscription comme un véritable tremplin pour son agglomération et l’Auvergne ; et comment cette dernière doit encore développer sa communication pour prendre définitivement la place qui lui revient.

iOlivier Bianchi, maire de Clermont-Ferrand et président de la métropole. Crédits : Vianney Loriquet.
Olivier Bianchi, maire de Clermont-Ferrand et président de la métropole. Crédits : Vianney Loriquet.

Quel a été votre rôle en tant que maire de Clermont-Ferrand et président de la CAM dans l’inscription au patrimoine mondial de la chaîne des Puys ?

Olivier Bianchi : Il faut rappeler que c’était une initiative de Jean-Yves Gouttebel, président du département à l’époque. C’est ce même département qui a été la cheville ouvrière de ce classement. Ayant une partie de ce paysage sur le territoire de la métropole, nous avons adhéré à la démarche, et nous avons été un partenaire institutionnel, en deuxième ligne et en appui.

Au-delà de la valeur symbolique, quel était l’intérêt de cette inscription ?

On peut dire qu’il y avait des intérêts économiques et notamment en matière de tourisme. Si on veut que les gens viennent faire un séjour plus long sur le territoire, il faut avoir une proposition touristique dense en plusieurs étapes. Cette inscription venait en complément d’autres initiatives, comme l’Aventure Michelin, Clermont capitale européenne de la culture ou Vulcania. On voulait créer une image positive et une attractivité importante. Outre le supplément d’âme apporté par cette inscription, cela a surtout permis de mettre en place des politiques publiques sur la gestion du patrimoine et de la nature sur le site, cette démarche n’était pas nécessairement de l’ordre de l’enrichissement économique.

Plus précisément, qu’est-ce que cela a débloqué ?

Cette inscription a des qualités sur beaucoup d’enjeux. À titre d’exemple, depuis une quinzaine d’années, il y avait une ancienne station-service qui voulait être remise en route pour implanter du commerce local, sur le rond-point d’Orcines, sur la route du Puy-de-Dôme. C’était une véritable verrue.

L’inscription de la chaîne des Puys a permis de mettre en action l’ensemble des collectivités concernées pour trouver une solution acceptable par tous, en respectant les enjeux de protection du site. Cela a permis une prise de conscience et de décision, menant à la destruction des bâtis et à l’implantation d’une zone naturelle préservée. Je sais qu’en outre, le département travaille beaucoup sur la biodiversité, cela permet une accélération sur les discussions avec la chambre d’agriculture. C’est un argument supplémentaire auquel on peut difficilement échapper. Ce label a un prix pour un certain nombre de gens, c’est un vrai outil levier pour faire avancer un certain nombre de choses.

En matière de tourisme, espériez-vous des retombées précises ?

Le tourisme à Clermont ne se résume pas au tourisme estival, nous avons beaucoup de tourisme d’affaires également, c’est un élément important pour la métropole. La deuxième chose concrète, à partir du moment où on est dans le Puy-de-Dôme, pas loin de la métropole, les vacanciers vont diversifier leur voyage, découvrir la ville et faire du tourisme plus urbain. C’est donc une carte supplémentaire. On n’a pas encore de chiffres sur cette saison, mais ce qu’on peut constater depuis deux ou trois ans, c’est une forte augmentation du tourisme à Clermont, notamment international. L’attrait du label Unesco a certainement contribué à cette augmentation. Par ailleurs, nous sommes à la mode avec nos destinations de nature, de proximité…

Pour la ville de Clermont-Ferrand et la métropole plus précisément, comment bonifie-t-on cette inscription pour en faire profiter le territoire ?

Il n’y a pas d’aides directes aux acteurs privés de notre part, nous ne sommes pas toujours concernés par les dispositifs mis en œuvre par le classement. Mais il y a un dispositif du département sur les côtes de Clermont en partenariat avec la métropole, qui concerne cinq communes. À cet endroit, un classement en espace naturel a été demandé, avec la création d’espaces de promenade préservés et dégagés ; un moteur du tourisme vert en quelque sorte. Il n’y a pas de schéma qui s’appellerait « plan de la métropole pour les conséquences du classement Puy-de-Dôme », nous attendons aussi un coup d’envoi de la nouvelle équipe du département.

Certains acteurs du tourisme constatent peu, voire pas de changement suite à l’inscription. Y a-t-il des manques sur la communication nationale et internationale ?

Ça fait partie des discussions qui ont lieu sur le territoire à tous les niveaux, entre tous les acteurs. C’est un peu lié à la transition politique. Il y avait eu un effet « wahou » lors de l’annonce de l’inscription, ça avait fait parler, il y avait eu un effet de communication naturel. Il faut maintenant lancer une communication perpétuelle, plus structurelle. C’est quelque chose qui va arriver. Nous essayons, pour la métropole, de ne pas être l’arrière-cour d’un fond d’écran naturel. L’Auvergne capitalise autour des valeurs du tourisme nature et du tourisme d’eau, mais nous sommes aussi une métropole universitaire, culturelle. Le projet « capitale européenne de la culture » est le volet européen et dynamique de cette stratégie globale.

Il faut avoir une proposition touristique dense en plusieurs étapes.
Olivier Bianchi, Maire de Clermont-Ferrand et président de Clermont Auvergne Métropole

Le directeur de Vulcania estime que la destination Puy-de-Dôme doit encore « apprendre à se vendre ». Êtes-vous d’accord ?

Oui, mais il y a un mais. C’est vrai que l’Auvergne en général, avec cette idée de « Vivons cachés, vivons heureux », a vécu avec un tourisme un peu naturel, sans forcer, avec des Auvergnats de Paris qui reviennent en vacances, du bouche-à-oreille, etc. Mais aujourd’hui, le monde est en grande compétition, et nous devons nous doter des outils pour ne pas passer à la trappe.

Où en est le projet « Clermont capitale européenne de la culture » ?

Ça approche. Le 1er décembre, nous devons remettre le premier dossier puisqu’il y a une première étape de sélection. Un peu avant cette échéance, nous allons rassembler l’ensemble des territoires du Massif central qui ont adhéré à la démarche. Ils se composent de quatre régions, 15 départements, ainsi qu’une vingtaine de villes ou Comcom (une soixantaine de collectivités en tout). C’est un peu le même processus que le département a mené pour le combat Unesco.

Neuf villes sont candidates, il ne restera que trois villes en finale en janvier prochain. Puis, un jury viendra visiter ces trois villes à l’été 2023, et à l’automne, on aura un candidat retenu pour la France qui devra préparer sa candidature pour 2028. C’est une étape supplémentaire et complémentaire au classement de la chaîne des Puys. L’Auvergne, le Massif central et Clermont-Ferrand doivent cesser d’être timides, affirmer leurs talents et leurs ressources et se montrer au monde entier en disant « Venez nous voir ! ».

Dates clés

2007 : Lancement du projet à l’initiative de Jean-Yves Gouttebel, président du conseil départemental du Puy-de-Dôme

2007-2011 : Études de faisabilité, concertations locale et nationale, accords institutionnels

2010-2012 : Rédaction des différents dossiers de candidature, élaboration du plan de gestion et mise en place d’une nouvelle gouvernance

Décembre 2012 : Création de la fondation chaîne des Puys-faille de Limagne à l’initiative de sept entreprises locales

Janvier 2013 : Sélection des dossiers de la Grotte Chauvet – Pont d’Arc et de la chaîne des Puys – faille de Limagne par l’État français et dépôt officiel à l’Unesco

2013 : Évaluation internationale par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN)

Juin 2014 : Premier passage devant le Comité du patrimoine mondial à Doha, Qatar

Septembre 2014 – fin 2015 : Dialogue approfondi avec l’UICN et accueil d’une mission d’expertise indépendante

Janvier 2016 : Dépôt officiel par l’État français d’un dossier complémentaire

17 juillet 2016 : Consensus du 40e Comité du patrimoine mondial pour reconnaître le potentiel de Valeur universelle exceptionnelle de la chaîne des Puys – faille de Limagne

2 juillet 2018 : Inscription au patrimoine mondial de l’Unesco

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