Le Restaurant de Chames est devenu en quelques années une véritable adresse gastronomique située à quelques coups de pagaie du pont d’Arc, en descendant l’Ardèche. Pourtant en 2013, personne n’aurait misé sur ce restaurant, fermé depuis dix ans. Mais après avoir racheté le lieu aux enchères, Joseph Gien l’a complètement transformé. Cette année, l’auberge de Chames est le seul restaurant de Vallon-Pont-d’Arc à figurer dans le Michelin, en obtenant pour la première fois une assiette.
Ce fils de forains, né à Tournon- sur-Rhône, dans le nord du département, a pourtant grandi loin des cercles gastronomiques. Après avoir, selon ses termes, « effectué le service minimum à l’école » (de 8 ans à 16 ans), il devient plongeur pour une saison en Ardèche. Pas rebuté par ce métier, il estime aujourd’hui « qu’un bon restaurateur doit avoir occupé tous les postes ». Il se prend au jeu, reprend du service l’année suivante et entame une carrière dans la restauration. Sa débrouillardise, son sens aigu de la communication et sa volonté de travailler pallient son manque de formation. En 2003, non seulement il convainc son père, totalement novice dans ce métier, de le suivre dans l’aventure, mais, de surcroît, il persuade un camping des gorges de leur confier la gestion de son restaurant. L’expérience positive sera ensuite renouvelée de saison en saison. L’hiver, néanmoins, le jeune homme part faire des saisons. « J’ai connu un vrai déclic en 2007 en étant embauché dans un restaurant étoilé, le Bois fleuri, à Corrençon-en-Vercors, où le propriétaire, Richard Sauvageon, m’a pris en main, raconte-t-il. Je suis alors entré dans une sphère qui m’était totalement étrangère. J’ai eu la révélation des produits, du vin, du service. Au départ, je me suis senti mal à l’aise, puis j’ai retourné la situation à mon avantage. Je me suis mis à lire quotidiennement le journal pour pouvoir soutenir une conversation avec les clients et je me suis intéressé à tout ce qui concernait le vin et la gastronomie. »
De retour dans le restaurant de camping Les Trois Eaux, Joseph supprime des pizzas de la carte et les remplace par des recettes plus sophistiquées, avec des produits comme du foie gras ou des coquilles Saint-Jacques. Contre toute attente, le restaurant effectue une saison extraordinaire. Deux ans plus tard, pour conforter leur situation dans les gorges de l’Ardèche, Joseph et son père ont acquis le restaurant du village, où ils ont mis en place la même politique qualitative. Ce fut là un bon tremplin, avant la relance du Restaurant de Chames.
Le Restaurant de Chames dispose d’une superbe terrasse au bord de l’Ardèche.
La montée en puissance de cette adresse a été progressive. Autodidacte revendiqué, Joseph reconnaît que les chefs qui se sont succédé aux fourneaux chaque saison l’ont inspiré et ont encouragé cette montée en gamme progressive. Ainsi, depuis trois ans, il a installé un potager à côté de la terrasse, où il cultive herbes, fleurs comestibles et légumes qui ponctuent les recettes. Il s’apprête à décupler cette surface de culture. Aujourd’hui, le succès est au rendez-vous. En saison, l’adresse affiche le plus souvent complet. Le ticket moyen oscille entre 47 € au déjeuner et 70 € au dîner. Le restaurant fonctionne le soir avec trois menus, où le restaurateur décline une cuisine d’humeur et de saison proposant d’adroites combinaisons de produits locaux.
Un jardin potager jouxte le restaurant.
Neuf salariés et un apprenti sont employés en saison. Mais cette année, encouragé par l’assiette et voulant stabiliser un noyau dur, Joseph a décidé d’ouvrir le restaurant durant la quasi-totalité de l’année. Cela permettrait notamment à l’actuel chef de poser durablement son sac dans son coin de l’Ardèche et à Joseph de conserver les meilleurs éléments de l’équipe. « Cela nous aidera à avancer l’esprit libre », estime le restaurateur.