La Bouteille d’or 2018 est arrivée

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Le jury de Tradition du vin a rendu son verdict. C’est Éric Mauboussin, patron créateur d’Au P’tit Zinc, qui hébergera en 2019 la fameuse Bouteille d’or qui distingue chaque année un authentique bistrot parisien.

Dans quelques mois, les cérémonies de remise officielle de la Bouteille d’or auront lieu face à la mairie du 14 arrondissement, au P’tit Zinc.

Ce jour-là, le fameux trophée restera rive gauche. Il voyagera de la rue de l’École-Polytechnique où se situent Les Pipos, le précédent récipiendaire et parcourra les trois kilomètres qui séparent l’adresse de la rue des Plantes où le trophée sera exposé durant un an. Éric Mauboussin, patron fondateur du P’tit Zinc et lauréat 2018, peut faire profiter ses clients de la présence rayonnante de la Bouteille d’or qui trône sur un meuble.

Beaux joueurs, Jean-Michel Asfaux et Jean-François Goubert, lauréats 2017, ont apporté officieusement le précieux trophée avant l’heure.

Depuis près de trente ans, l’association Tradition du vin désigne un bistrot parisien particulièrement accueillant où elle décide d’exposer sa Bouteille d’or. D’année en année, le trophée voyage ainsi de bistrot en bistrot donnant lieu à une belle fête bachique. Ce trophée permet de mettre en lumière des établissements parisiens qui perpétuent la tradition populaire du bistrot avec des prix abordables, des vins de propriétaire et une cuisine simple, mais réalisée avec des produits frais. Miraculeusement, ces établissements qui perpétuent la tradition et l’esprit du bistrot parisien, perdurent dans une capitale où les enseignes de restauration créées par le marketing se succèdent au gré des modes. C’est bien l’expression de cet art de vivre à la française que défend Éric Mauboussin au P’tit Zinc.

Éric Mauboussin et son équipe : Nathalie, Mohamed et John

Débuts au Petit Bougnat

Ce fils de paysan sarthois est arrivé dans la capitale il y a près de trente ans. Il a d’abord caressé l’idée de prendre la succession de son père, éleveur de volailles. Après avoir obtenu un Bepa et un BTA d’agriculture, il a finalement renoncé à cette carrière.

Benjamin de la fratrie, la reprise du flambeau lui paraissait de plus en plus périlleuse à assurer alors que les volailles label Rouge qu’élevait sa famille ne faisaient pas recette.

Instinctivement, il sentait que cette aventure n’était pas faite pour lui : « C’était un univers qui devenait trop normé, trop contraignant, reconnaît-il. Je sentais un besoin de contacts, de m’ouvrir aux autres. C’est pourquoi j’ai préféré tenter l’aventure à Paris à 19 ans. » Il n’y a pas que des Auvergnats qui montent à Paris. L’arrivée de ce Sarthois dans la capitale évoque irrésistiblement le parcours type des ressortissants du Massif central. Répondant à une petite annonce d’ Ouest France, il monte en train à Paris pour être embauché au Petit Bougnat, près de la place des Ternes. « Je ne connaissais rien au métier, avoue-t-il, mais ma bonne volonté, ma ponctualité paysanne ont séduit le patron. » Le Petit Bougnat était encore un vrai bougnat il y a trente ans. L’hiver, Éric livrait les sacs de bois et de charbon le matin, avant de passer en salle pour le service du déjeuner et de travailler souvent jusqu’à 2 heures du matin. Logé et blanchi, il doit alors se contenter d’un salaire maigre malgré le nombre d’heures impressionnant qu’il effectuait quotidiennement six jours par semaine. Dans l’insouciance de la jeunesse, ces interminables journées de labeur ne lui pesaient guère. Il est même resté huit ans au service de cet établissement. « Cela m’a permis d’apprendre le métier », confie-t-il sans regret.

« Je veux prochainement transformer l’établissement pour qu’il soit encore plus accueillant. »

Un bosseur

Ce petit homme noueux aux impressionnants tatouages, biker revendiqué et vêtu à la manière d’un titi parisien, se définit simplement comme « un bosseur ». Sa puissance de travail lui a permis de surmonter tous les obstacles qui se sont dressés devant lui. Il s’est révélé en devenant maître d’hôtel puis directeur du Café Varenne, alors propriété de Francis et Caroline Tafanel.

Son sens des relations publiques fait merveille. Il a l’art de créer une ambiance familiale dans l’établissement qui séduit les clients et de nombreuses personnalités, comme François Fillon.

L’ancien Premier ministre était un fidèle du Café Varenne et on le retrouve parfois au P’tit Zinc. Entre les deux Sarthois, le courant passe d’autant mieux que le père de François Fillon fut le notaire du père d’Éric Mauboussin.

Éric Mauboussin est resté au Varenne quand celui-ci a été racheté par Sylvain Didier. Ce dernier a d’ailleurs aidé Éric à créer le P’tit Zinc en 2012 en rachetant un vieux bar de quartier au bord du dépôt de bilan. Depuis ses débuts, le Sarthois rêvait de diriger son propre bistrot, un endroit à lui qui lui ressemblerait. Mais faute de moyens financiers suffisants, il n’avait jamais pu concrétiser cette ambition. Il n’est pas non plus parvenu à se lancer dans une gérance libre pour deux raisons : « D’abord, je ne suis pas auvergnat, explique-t-il. La confiance est donc plus difficile à obtenir. Ensuite, mon épouse travaille dans un tout autre domaine et les propriétaires qui mettent un fonds en gérance privilégient les couples. »

Le coin cuisine au bout du comptoir

Un authentique bistrot

En arrivant dans les murs du P’tit Zinc, Éric Mauboussin a tout transformé. Dans un souci d’authenticité, il a conservé la pierre et la brique brutes. Il a réalisé un décor personnel composé de plaques publicitaires émaillées mais aussi d’objets personnels, comme une énorme tête de porc qui vient de son village sarthois.

Mais, surtout, il a voulu mettre le client en confiance en plaçant le fourneau à l’extrémité du comptoir. De la sorte, le chef, Mohamed, ancien de la Ferme Saint Simon, cuisine devant la salle. Les convives peuvent constater qu’il pratique une véritable cuisine exclusivement réalisée à partir de produits frais. Entrecôtes, tartares, andouillettes et confits de canard constituent l’épine dorsale de la carte.

Les plats du jour en sauce, bourguignon ou blanquette, rencontrent beaucoup de succès. Éric est très fier lorsque les chefs de brigades étoilés qui viennent chez lui le félicitent après le service de l’excellence de ses plats Mais, c’est avant tout la carte des vins du P’tit Zinc qui a séduit le jury de Tradition du vin. Éric décline une trentaine de vins issus de domaines dont le patron connaît personnellement chaque propriétaire. On y trouve peu de bordeaux en dehors du Château Jules, domaine d’un ami. Les beaujolais sont en revanche bien représentés avec le morgon et le brouilly de chez Laurent Thévenet ou le saint-amour et le chenas du château Belleverne.

Au P’tit Zinc, 2 rue des Plantes 75014 Paris 

Tel : 01.45.40.45.50

Une équipe

Depuis quatre ans, Éric peut miser sur une solide équipe de trois employés soudés, motivés et fidèles. En chef d’orchestre, il assure l’ambiance. De nombreuses personnalités, issues d’horizons divers, comme Nicole Garcia, Hervé Morin, Augustin Romanet ou Anna Gavalda, apprécient ce bistrot de 40 places toujours bondé. Ils sont attirés par la table, mais aussi une atmosphère familiale et joyeuse, savamment entretenue par la gouaille d’Éric. Cet homme, empreint d’une véritable gentillesse et d’une sensibilité à fleur de peau, ne joue pas un rôle.

Il aime vraiment ses clients. Il n’a pas volé sa Bouteille d’or même si, perfectionniste jusqu’au bout, il assure : « Je suis ravi de l’avoir eue.

Mais, au départ, je ne la voulais pas cette année car je ne me sentais pas encore prêt. Je veux prochainement transformer l’établissement pour qu’il soit encore plus accueillant. »

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