Ludovic Perraudin : la cuisine sans cuisine
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Ludovic Perraudin, fils de Claude Perraudin -créateur et animateur du célèbre Père Claude -, vient de créer Madame Claude. Sous cette enseigne en forme de clin d’œil, il pallie l’absence de cuisine grâce à des préparations sous vide réalisées à partir de produits d’exception.
On connaît le Père Claude, avenue de la Motte-Piquet, institution de la rôtisserie et de la plancha où officie Claude Perraudin. Il faudra désormais compter avec Madame Claude, nouveau restaurant ouvert à quelques mètres de là par son fils Ludovic. Le nouvel établissement s’est installé dans l’ancienne Épicerie du Père Claude. Avec malice, Ludovic Perraudin a choisi pour enseigne le nom de la célèbre entremetteuse parisienne des années 1960. On peut d’ailleurs lire au dos de sa veste de chef une phrase brodée, extraite de mémoires de celle qui s’appelait en réalité Fernande Grudet : « Deux choses marchent dans la vie : la bouffe et le sexe. Je n’étais pas douée pour la cuisine… » Cette devise annonce la couleur : cuisinier passé par quelques-uns des plus grands restaurants français, Ludovic Perraudin vient d’imaginer un restaurant sans cuisine.
En effet, chez Madame Claude, on ne trouve ni four mixte ni fourneau, mais un simple four statique, qui permet de remettre en température les plats sous vide préparés à l’avance par le chef. Il s’agit avant tout pour Ludovic Perraudin de s’adapter à une situation compliquée. Il y a une dizaine d’années, associé avec son père, il décide ainsi de créer une annexe baptisée Les Cocottes du Père Claude, avec le projet de servir des plats mijotés. Les deux hommes avaient alors repéré et investi un local proche du Père Claude, fermé depuis l’après-guerre. Mais quand il s’est agi d’installer une extraction, ils se sont heurtés à un refus ferme de la copropriété. Le père et le fils ont donc été contraints de modifier leur projet et de créer une épicerie. Malgré les assauts d’amabilité répétés de la famille Perraudin, les copropriétaires ne se sont pas laissés fléchir depuis lors. « Durant une dizaine d’années, nous sommes parvenus à faire en sorte que l’épicerie ne perde pas d’argent, explique Ludovic Perraudin, mais il fallait sortir de cette situation et mettre en place un concept. » Installé derrière le comptoir, le chef officie dans une sorte de cuisine ouverte. Son expertise acquise dans l’épicerie lui permet de proposer de très beaux produits faciles à mettre en œuvre, comme les huîtres de la maison Quintin. Son équipement de cuisine et sa hotte à charbon lui suffi sent pour décliner des plats comme les quenelles de brochet Colette Sibilia à la crème d’écrevisses. Grâce à la cuisson sous vide, il peut aussi mettre en avant une selle d’agneau base température. L’ambiance est décontractée chez Madame Claude. Les convives prennent place au coude à coude autour de grande tables au milieu desquelles sont disposées des bouteilles de vin. Dans ce restaurant de 36 places, le ticket moyen oscille entre 35 et 40 €, un niveau inférieur à celui du Père Claude (55 €).
« Deux choses marchent dans la vie : la bouffe et le sexe ! »
SUR LES TRACES DE SON PÈRE
Les trois enfants de Claude Perraudin travaillent dans le secteur de la restauration. Le frère et la sœur de Ludovic sont installés à Miami, mais ce cuisinier, aujourd’hui âgé de 42 ans, a préféré rester en France, où il marche aujourd’hui sur les traces de son père. Cette carrière s’est présentée pour lui comme une évidence. Dans les années 1990, il a appris le métier à l’école Ferrandi, en alternance, durant deux ans, dans le restaurant de Jean-Pierre Morot-Gaudry. Il a peaufiné sa formation dans des adresses réputées : L’Épi Dupin, à Paris, le restaurant Troisgros, à Roanne, les cuisines de l’Élysée ou encore Taillevent. En 2001, il rejoint le Père Claude avant de s’employer au développement de l’entreprise familiale, d’abord avec la création de l’épicerie, puis avec l’ouverture d’un autre restaurant voisin, où il propose de la viande wagyu cuite en direct devant les clients. Le restaurant ne comptait alors que 16 places.
Pourtant, malgré un ticket moyen très élevé et une fréquentation soutenue, le restaurant affiche une faible rentabilité, en raison notamment du coût de la viande et de pertes dues aux longues maturations pratiquées. Astucieusement, Ludovic Perraudin fait évoluer le concept, en proposant progressivement des burgers haut de gamme. « Le succès a été immédiat, assure-t-il. Nous sommes très vite passés de 10 à 150 burgers/ jour. Comme il était difficile de faire cohabiter les deux propositions, j’ai changé l’enseigne en Wagy, les Burgers du Père Claude. » Aujourd’hui, l’établissement est en vente, car Ludovic Perraudin ne croit plus en l’avenir du burger, trop galvaudé. Ce restaurateur qui s’adapte en permanence se prépare désormais à prendre la relève de son géniteur. Si Madame Claude fonctionne bien, il sera, à terme, en mesure de racheter le Père Claude et de poursuivre l’aventure.
Madame Claude – 4, rue du Général-de-Castelnau, 75015 Paris – téléphone : 01 47 34 04 04