Le plâtrier propriétaire d’hôtels de luxe

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Jean-Claude Delion, 76 ans, possède deux hôtels cinq étoiles, la Réserve de Beaulieu, à Beaulieu-sur-Mer, et le Château Saint-Jean, à Montluçon. En quelques décennies, l’homme originaire de l’Allier a débuté comme plâtrier-peintre, avant d’acquérir ensuite de manière successive plusieurs établissements hôteliers.

« J’ai peur que la rentrée soit compliquée. » Malgré cette appréhension, et alors que ses deux établissements hôteliers classés cinq étoiles, la Réserve de Beaulieu, à Beaulieu-sur-Mer, et le Château Saint-Jean, à Montluçon, sont fermés, Jean-Claude Delion ne souhaite pas subir cette période et préfère même la mettre à profit. « On a effectué des ajustements », indique-t-il. Les quelques travaux se sont portés sur des endroits qui doivent rester accessibles aux clients dans le cadre du fonctionnement habituel de l’hôtel. La réception de son établissement des Alpes-Maritimes a, par exemple, été revue. Les restaurants de chacun de ses hôtels gardent également leurs portes closes.

Chasseur d’hôtels 

« On a fait de la vente à emporter lors du premier confinement, mais c’est trop compliqué. Au prix où sont payés les chefs, il vaut mieux mettre en place le chômage technique », se justifie-t-il ainsi. Celui qui est originaire de l’Allier, en Auvergne, pose un regard plein de lucidité sur le contexte sanitaire et la situation à venir : « C’est triste, mais il va y avoir beaucoup d’opportunités. Je dépense entre 350 000 et 400 000 euros par an. Donc soit vous êtes économe comme moi, soit vous ne l’êtes pas et vous disparaissez », n’hésite-t-il pas à lancer, comme un avertissement. Si dévastatrice soit-elle, la crise liée à la Covid-19 n’est pas de nature à mettre en péril ce qu’a construit tout au long de sa vie Jean-Claude Delion.

À 14 ans, par manque de place dans la formation de mécanicien qu’il souhaite initialement suivre, il se résout à apprendre le métier de plâtrier-peintre. « J’ai beaucoup travaillé, sept jours sur sept et j’ai gagné beaucoup d’argent, lâche-t-il. J’avais mon entreprise à Saint-Éloy-les-Mines et des agences à Clermont-Ferrand, avec au total 150-170 salariés. » Et au bout de quelques années, il choisit de poursuivre son « idéal », « faire comme mon oncle à Oran [en Algérie, NDLR], posséder des établissements hôteliers ». Il acquiert alors l’hôtel L’Orée des pistes, situé au sein de la station de sports d’hiver des Deux-Alpes, en Isère. Établissement qu’il revend à la Caisse des dépôts pour s’offrir en 1985 la Pinède, à Saint-Tropez, dans le Var. En 1997, Jean-Claude Delion décide de racheter au Crédit Lyonnais la Réserve de Beaulieu, établissement de légende qu’il détient toujours et qui dispose de 39 chambres, suites et villas.

« J’ai toujours des projets, c’est ce qui fait vivre »

« En face, il y a la résidence hôtelière, avec 25 appartements, pour avoir toute la panoplie », précise-t-il. Après la vente de la Pinède en 2016, l’hôtelier se tourne vers son département natal et rachète le Château Saint-Jean, ancienne commanderie des Templiers. Les clients doivent néanmoins attendre avril 2019 pour découvrir les 19 chambres et suites. « Le château était un squat. On a mis deux ans pour le rénover. Les entreprises n’ont pas été de premier ordre. J’ai voulu faire travailler les entreprises auvergnates, mais elles ne savent pas faire le luxe, elles n’ont pas été à la hauteur », se désole-t-il. Pour la décoration Jean-Claude Delion a fait appel à Patrick Jouin, « qui s’est occupé du restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée », aime-t-il souligner. Le prestige ne se limite pas aux différents lieux, mais se retrouve également dans les assiettes des divers restaurants gastronomiques : le Restaurant des rois, pour la Réserve, et le restaurant La Chapelle, pour le Château Saint-Jean. « Nous avons eu trois étoiles Michelin à la Pinède », se rappelle Jean-Claude Delion. L’occasion pour lui de démontrer une nouvelle fois son ambition : « On a obtenu au restaurant La Chapelle la première étoile au bout de huit mois. L’objectif est d’en avoir une deuxième », affirme-t-il. Il nourrit également cet objectif pour le restaurant des Rois. Une pression supplémentaire sur les épaules des chefs Julien Roucheteau et Olivier Valade.

Malgré sa réussite, l’Auvergnat ne semble pas vouloir s’arrêter. « J’ai 76 ans, je suis présent sept jours sur sept dans mes maisons. J’ai un problème de passion, reconnaît-il, avant d’ajouter, j’ai toujours des projets, c’est ce qui fait vivre. » Cette ascension professionnelle a cependant induit des sacrifices, traditionnels dans le secteur de l’hôtellerie. « Ma vie a été une vie de travail. J’ai sans doute été un mauvais père, mais je suis un bon patron, qui motive ses employés. J’ai cette exigence », assume-t-il ainsi sans détour. Jean-Claude Delion en profite d’ailleurs pour passer un message aux nouvelles générations : « Ce qui manque à nos jeunes, c’est d’être passionnés ! ».

www.reservebeaulieu.fr

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