Olivier Robert, président du Sneg & Co : l’empathique

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À la tête du Syndicat national des entreprises gays (Sneg & Co), Olivier Robert a connu une brillante ascension dans le groupe Barrière avant de diriger plusieurs établissements, puis de lancer Eagle, une franchise d’établissements de nuit dédiés à la communauté LGBT.

Olivier Robert
Olivier Robert, président du Sneg & Co. Crédit L'Auvergnat de Paris.

Olivier Robert, 51 ans, préside le Sneg & Co depuis octobre 2017. Il en assurait la vice-présidence depuis vingt-cinq ans et, après le départ de Gérard Siad (son dernier président), a été élu à tête de l’organisation syndicale. C’est Bernard Bousset, initiateur du Sneg il y a trente ans, qui a fait venir Olivier Robert à Paris. Ce dernier évoluait alors au sein du groupe Barrière, où il avait débuté comme portier au Casino des sports des Sables-d’Olonne, avant d’en assurer la direction quelques années plus tard. Son parcours est remarquable: ayant gagné la confiance du groupe Barrière, on lui confiera jusqu’à la direction régionale du Grand Ouest. « Puis, Bernard Bousset m’a demandé de le seconder pour l’ouverture de l’Open Café », se souvient Olivier Robert. Grâce à sa terrasse, aux antipodes du « camouflage » autrefois pratiqué par la communauté gay, l’Open Café devient alors le premier bar gay ouvert au grand public. De fil en aiguille, Olivier Robert assure la direction de plusieurs établissements lancés par Bernard Bousset. « Par la suite, j’ai eu la chance d’obtenir en gérance IDM (un sauna parisien, NDLR), explique-t-il. Puis, j’ai acheté différentes affaires. » L’exploitant est maintenant à la tête d’une franchise baptisée Eagle, qui comporte 17 unités dans le monde (Nice, Vienne, Miami, Berlin, etc.), ainsi qu’un établissement à Paris, le Labo. En parallèle, avec ORC, sa société de formation professionnelle à destination des directeurs d’hôtels et des chefs de réception, il travaille aux côtés des groupes Partouche, Accor, etc. Si Eagle ne compte plus d’affaire à Paris, Olivier Robert a bien l’intention de relancer la franchise dans la capitale, où le concept est né. Chaque franchisé est indépendant, mais cotise pour mettre en place des publications et des achats groupés. À son arrivée à la tête du Sneg & Co, le créateur d’Eagle a souhaité modifier les habitudes de travail. Il a donc créé un poste de directeur exécutif, occupé par Rémi Calmon. Ce dernier a le pouvoir de prendre des décisions en l’absence d’Olivier Robert, qui se définit lui-même comme « un homme occupé ». Le syndicat a ainsi gagné en efficacité et en réactivité. « Mon leitmotiv, c’est d’aider les entreprises de notre organisation. Quand un adhérent a un problème, je le prends pour moi », assure Olivier Robert. Et d’ajouter: « Je veux donner de mon temps aux autres. »

Naissance dans la douleur

Le Sneg & Co a vu le jour il y a trente ans pour assurer de la prévention dans les établissements gays de France et de Navarre. À l’époque, les ravages causés par le sida étaient à leur paroxysme. « Nos clients disparaissaient petit à petit, car il n’y avait pas de prévention au sein de nos entreprises », se souvient avec amertume Olivier Robert. Pour contrer la maladie et protéger la communauté gay, une poignée de militants emmenée par Bernard Bousset distribue alors des préservatifs dans les CHRD concernés. En 1989, il est encore interdit en France de proposer des préservatifs et de diffuser des documents de prévention dans les commerces gays. C’est ainsi que le bar Le Central, dans le Marais, empilait les contraventions distribuées par la préfecture de Police. « Personne ne voulait admettre qu’en portant le préservatif, on pouvait endiguer la contagion », soupire-t-il. Une délégation, notamment constituée de Bernard Bousset et de David Girard (groupe David Girard), sera finalement reçue au ministère de la Santé. C’est à l’issue d’une réunion houleuse qu’est née l’idée de créer un syndicat regroupant les commerces gays: le Syndicat national des entreprises gays (Sneg) était né. « Cette politique de prévention qu’a menée le Sneg il y a trente ans, tous les pays européens l’ont ensuite adoptée », assure Olivier Robert. Par la suite, l’organisation s’est structurée, développant des aides juridiques, fiscales et prud’homales, ou mettant en place une centrale d’achats pour les préservatifs. En 1995, la préfecture de Police de Paris décide de fermer six établissements (dont un bar) bien connus de la communauté homosexuelle, comme le Boy, le Queen et le Café Cox. Les autorités invoquent alors les stupéfiants et infligent aux différents patrons trois mois de fermeture administrative chacun. « À ce moment, il y a eu une montée en puissance du Sneg, qui était encore très discret. Le syndicat est monté au créneau et a fait valoir que les entre- prises qui n’avaient pas de pouvoir de police ne pouvaient pas être considérées comme les seules responsables des problématiques liées à la drogue », détaille-t-il. Le Sneg (qui réunissait alors des entreprises du CHR, comme différents commerçants) s’est finalement divisé en deux entités en 2013 pour donner naissance au Sneg & Co, aujourd’hui rattaché à l’Umih, et Enipse, qui continue à aborder le volet prévention et donc à disposer de subventions de l’État. Aujourd’hui, le Sneg & Co ne réunit que des lieux disposant de licences, des lieux d’exploitation appartenant au secteur du CHRD: « Fatalement, nous avons perdu des adhérents. Le seul Sneg réunissait 600 entreprises, le Sneg & Co en agrège 300. » Quand, en 2015, la question de la représentativité des organisations professionnelles s’est posée, le Sneg & Co a souhaité s’adosser à un syndicat fort. « En tant que petite structure, nous ne pouvions pas rester isolés. Avec le temps, une bonne osmose s’est créée », glisse Olivier Robert.

Évolution de la clientèle

L’organisation syndicale est présente partout en France, en partie car elle est la seule entité accueillant des établissements de type sauna et établissements de bain auxquels sont rattachées des licences. À Clermont-Ferrand, par exemple, le Viaduc est ainsi adhérent du syndicat. En régions, les établissements uniquement dédiés à la clientèle LGBT se font de plus en plus rares. « Le premier slogan qu’on avait créé à l’époque avec Bernard Bousset, c’était “consommez gay” ». Aujourd’hui, cela ne veut plus rien dire, grâce notamment à l’ouverture d’esprit et à l’avènement du mariage gay. On peut se balader main dans la main et nous ne sommes plus contraints de nous rendre exclusivement dans des établissements gays », rappelle le président. Ainsi, la clientèle homosexuelle s’est quelque peu diluée dans la masse et, de nos jours, on trouve des lieux de vie où toutes les orientations et affinités sont confondues. Le syndicat gère donc, aujourd’hui, des problématiques inhérentes au monde de la nuit en général. Les établissements de nuit, au sein de l’Umih, représentaient autrefois une portion congrue. « Depuis notre alliance, il y a une vision sur les sujets juridiques, réglementaires et fiscaux propres aux lieux de nuit. C’est un mariage gagnant-gagnant, qui nous permet de mettre en commun des expertises. Auparavant, nous travaillions avec des avocats spécialisés externes, mais cela ne vaudra jamais des permanents comme l’on peut en trouver rue d’Anjou », se félicite Olivier Robert.

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