Les Auvergnats de Montpellier : Pierre Morel et Éric Cellier, la Maison de la Lozère

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La Maison de la Lozère, créée il y a trente ans par le département éponyme, vient d’opter pour une formule bistronomique.

Patio
Patio

Aveyronnais, Cantaliens et Lozériens sont assez nombreux dans la restauration montpelliéraine. Même si cette présence n’est pas comparable à celle enregistrée à Paris, des professionnels du Massif central tentent régulièrement leur chance dans la préfecture de l’Hérault, qui a connu un très fort développement ces dernières années. Deux enseignes, L’Aveyronnais et le Bistrot de l’Aveyronnais, bien placées dans le centre-ville, donnent un premier aperçu de cette présence. On trouve aussi dans la cité une Maison de la Lozère, nichée dans la ville. Elle a été créée en 1989, dans un immeuble datant de l’époque médiévale. Janine Bardoux, son instigatrice, présidait alors le conseil général de Lozère et Jacques Blanc, l’homme fort du département, occupait le fauteuil de président du conseil régional. Tous deux souhaitaient installer une ambassade lozérienne à Montpellier, comme ils l’avaient également fait à Paris, rue Hautefeuille.

Pour exploiter la Maison de Lozère montpelliéraine, Janine Bardoux a fait confiance à deux jeunes. Pierre Morel, le directeur de salle, avait alors 27 ans et le chef Éric Cellier était âgé de seulement 22 ans. Au départ, les deux professionnels étaient salariés par la Selo, la société d’économie mixte du département de la Lozère, pour veiller sur le restaurant, qui partageait l’espace avec une agence touristique. Tous deux étaient passés par le lycée hôtelier de Saint-Chély-d’Apcher et le directeur de cet établissement le Père Gibelin, les avait chaudement recommandés auprès de la présidente du conseil général. Ils ont aussi pu compter sur l’appui de Guy Prouhèze, ancien chef étoilé du département. Tous deux bénéficiaient en outre d’un CV prometteur. Pierre Morel, fils d’agriculteurs de Massiac (Cantal), avait officié durant neuf ans dans le restaurant de Michel Bras, côté salle et sommellerie.

Pierre Morel, grand spécialiste des vins du Languedoc, à la Maison de la Lozère.

Pierre Morel, grand spécialiste des vins du Languedoc, à la Maison de la Lozère

Éric Cellier, fils de restaurateurs d’Altier (Lozère), avait de son côté travaillé dans les restaurants étoilés respectifs de Patrick Pages, Claude Girault et Michel Rochedy.

Éric Cellier à L’Arbre

Éric Cellier à L’Arbre

Trente ans après

Trente ans après, les deux hommes sont toujours aux commandes, mais la situation a changé. En 1996, ils sont devenus gérants d’une société exploitant le fonds de commerce détenu par la Selo. Lorsque le département a décidé de fermer son antenne touristique, les deux associés ont occupé l’espace en créant un cave à vin, où ils vendent également de l’huile d’olive. Depuis lors, faute d’avoir pu racheter le fonds de commerce, ils sont devenus propriétaires des murs du restaurant, qui occupe une surface totale de 320 m². Dans cette situation paradoxale, ils perçoivent donc un loyer de la Selo et lui versent une redevance.

Cette année pourtant, les deux associés ont décidé de faire évoluer la donne. Après avoir couru très longtemps après une étoile Michelin et évolué à un niveau gastronomique élevé sur la base d’un ticket moyen de 100€ , Pierre Morel et Éric Cellier ont décidé de se remettre en question. Ils ont simplifié la carte, pour proposer une prestation bistronomique. « Nous proposons toujours les mêmes produits haut de gamme comme le porc, le veau de Lozère ou le jambon des Cévennes, mais les recettes sont simplifiées et nous mettons en avant des tapas pour accompagner la dégustation de verres de vin », souligne Pierre Morel. Dans ces conditions, le ticket moyen oscille actuellement autour de 48€ , voire 30€ côté bar à vins. Pierre Morel explique qu’il était temps de s’adapter à l’évolution locale : « Depuis notre arrivée, la population de l’agglomération a été multipliée par quatre, pour atteindre 500 000 habitants, et aujourd’hui, il n’y a plus vraiment de place en centre-ville pour une prestation gastronomique. Les événements liés aux Gilets jaunes ont mis en évidence cette situation. Il était temps de réagir. La formule que nous avons mise en place au mois de mars nous permet de travailler avec un effectif réduit à 12 personnes. La masse salariale a été divisée par deux et nous compensons partiellement la baisse du ticket moyen par une fréquentation accrue. »

« La masse salariale a été divisée par deux. »

L’Arbre

Cette remise en question a eu un effet collatéral : le départ d’Éric Cellier. S’il reste toujours actionnaire de la Maison de Lozère et continue à superviser les cuisines, le chef n’est plus présent physiquement au quotidien, rue de l’Aiguille-rie. Il a décidé de relever, à 52 ans, un nouveau défi, en prenant en main le restaurant L’Arbre. Ce tout nouvel établissement vient d’ouvrir ses portes au bord du Lez, au pied d’une tour d’habitation, L’Arbre blanc, de 17 étages, conçue par l’architecte japonais Sou Fujimito et hérissée de 200 balcons installés à la manière de plongeoirs en porte-à-faux.

Pour l’occasion, Éric Cellier s’est associé avec le restaurateur étoilé Charles Fontès (La Réserve Rimbaud) et le frère de ce dernier, François Fontès, antiquaire. Les trois hommes ont acquis les 800 m² qui constituent l’établissement. Un bar et la cuisine sont installés au rez-de-chaussée, alors qu’une salle conçue par l’architecte parisienne, Pauline Percheron offre 70 places assises. À l’extérieur, une vaste terrasse domine le Lez, mais surtout, L’Arbre dispose d’une autre terrasse flanquée d’un qui occupe la moitié du toit de L’Arbre blanc et domine toute la ville. Le lieu est vite devenu le nouveau spot montpelliérain. Côté restauration, L’Arbre, ouvert depuis mai, fonctionne déjà sur une moyenne de 120 couverts/jour. Éric Cellier a mis en place une carte classique, qui fait la part belle aux abats (museau vinaigrette, tête de veau, rognons de veau, foie de veau), mais aussi des spécialités, comme le poulet écrevisse ou la bourride de lotte. Le ticket moyen se situe autour de 50€. L’établissement emploie une vingtaine de salariés.

Dans cet établissement marqué au sceau de la modernité, Éric Cellier a trouvé une nouvelle motivation. « Cela me donne une bouffée d’oxygène. Cela représente pour moi un appréciable tremplin en vue de la retraite. »

Éric Cellier à L’Arbre

Éric Cellier à L’Arbre

Pour plus d’information :

La Maison de la Lozère Cellier Morel :
27, rue de l’Aiguillerie
34000 Montpellier
Tél.: 0467664636
L’Arbre :
10, parvis Oscar-Niemeyer
34000 Montpellier
Tél.: 0434769696

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