Vincent Hoareau, des Beaux-arts aux fourneaux

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Le chef moulinois fêtait la première année de son nouveau restaurant la Bulle d’Air, le 1er août dernier. Situé au cœur du centre-ville, place d’Allier, il associe le goût du chef pour l’esthétisme et une cuisine simple mais efficace, fondée sur la fraîcheur et la saveur des produits.

« Je n’ai plus besoin de la reconnaissance d’autrui pour me sentir bien. » Assis à une des tables de son établissement la Bulle d’Air, ouvert au début août 2019, le chef Vincent Hoareau semble avoir trouvé l’équilibre. Ancien propriétaire de trois restaurants de la ville de Moulins, il s’en est défait pour créer ce restaurant qui lui ressemble : décoration épurée, belles matières et cuisine au plus près du terroir. Titulaire d’un bac scientifique, rien ne le prédestinait à passer en cuisine. « J’ai d’abord fait quelques mois de médecine. Comme je n’ai pas du tout aimé, je me suis orienté vers quelque chose qui me plaisait vraiment : c’est comme ça que j’ai passé cinq ans aux beaux-arts de Clermont-Ferrand. » Il se spécialise dans l’architecture d’intérieur et crée des meubles pour la maison Roche Bobois.



Ces cinq années d’études sont difficiles financièrement : sans bourse de scolarité, il se met à travailler dans plusieurs petits restaurants pour s’assurer un minimum de revenus. Jusqu’au jour de sa rencontre avec Jean-Yves Bath, alors chef du restaurant étoilé le Clos Saint-Pierre (devenu par la suite le Bath’s).

 

« Il a alors fallu que je fasse un choix pour ma carrière : c’était vite vu, car j’avais besoin de me tourner vers quelque chose de manuel, en adéquation avec mon état d’esprit. »


Il décide alors de devenir cuisinier. « Quand je l’ai annoncé à mère, qui avait alors deux restaurants à Paris, elle a ri : c’était un peu une revanche pour elle. » En quatre ans dans la maison, il gravit petit à petit les échelons dans la cuisine et devient second, puis chef pâtissier. Et en profite pour passer les diplômes correspondants : « Comme j’avais déjà un bac plus cinq, je n’ai passé que les épreuves techniques, au Lycée des métiers de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme de Chamalières. » BTH en poche, il devient compagnon du devoir et du tour de France et prépare le concours des meilleurs ouvriers de France. Il voyage ensuite de maison en maison, dont « plusieurs trois macarons bien connus », avant de poser ses valises à Moulins.



CHANGEMENT DE CAP ET CUISINE D’INTERPRÉTATION



En 2016, il se sépare de ses trois établissements, dont le restaurant qui l’a fait connaître dans la ville, le Trait d’union. « Il y a parfois en cuisine une forme de passion destructive , affirme le chef. Je garde un goût très amer de cette période, durant laquelle je me suis aussi séparé de ma compagne. » Il repare alors de zéro, décidant de se concentrer sur un seul et nouvel établissement. « J’avais besoin d’une bulle d’oxygène, d’où le nom de mon nouveau restaurant. » La cuisine de Vincent Hoareau se rapproche, elle aussi, de l’essentiel, mettant à l’honneur les produits saisonniers. « Je vais au plus proche de la saison et du produit, je compose avec ce que m’offrent les producteurs. » Son passé artistique se ressent dans ses assiettes, où les couleurs prennent une place essentielle. « Aujourd’hui, mon maraîcher avait du chou rouge : je vais le travailler en monochrome avec du radis rouge japonais, de l’oignon rouge et du basilic pourpre, auxquels j’ajouterai une pièce de viande grillée et un jus de veau bien clair. »

Restaurant La Bulle d’AirRestaurant La Bulle d’air, Moulins



Le cuisinier voit son restaurant comme un tout, où la nourriture, le vin et le lieu lui correspondent. Pendant la fermeture obligatoire due à la crise du Covid-19, il s’est rapidement orienté vers la vente à emporter, repositionnant son off re en proposant un menu à emporter à 23 €. «J’ai très mal vécu la crise : les quinze premiers jours, j’étais en vacances, mais ensuite j’ai vu mes économies fondre comme neige au soleil. » Il lui fallait donc compenser rapidement le manque à gagner, les investissements pour son nouveau restaurant commençant à peser sur sa trésorerie. Il lance le service de vente à emporter le 20 avril, et sert jusqu’à 120 repas par jour. « Je me suis adapté à la crise sanitaire et économique : il fallait des plats avec une réchauffe simple et efficace et des goûts bien présents, avec moins d’argent. » Un positionnement qu’il a conservé à la réouverture, en s’appuyant sur le principe de la vente additionnelle : le menu entrée-plat-dessert reste à 23 € du lundi au vendredi, avec possibilité d’ajouter un supplément pour chaque plat, ce qui amène l’addition à 45 € en les prenant tous. « Ainsi, on part sur un très bon menu de base, qui permet plus de gourmandise si on en a les moyens et l’envie. »

La Bulle d’air – 22, place d’Allier, 03000 Moulins

Tél. : 04 70 34 24 61

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