Botulisme alimentaire, les sanctions encourues

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Suite au cas de botulisme alimentaire qui s’est déclaré dans un restaurant bordelais mi-septembre et causé la mort d’une jeune femme et dix hospitalisations, Au Coeur du CHR a souhaité en savoir davantage sur les sanctions encourues par les restaurateurs.

botulisme alimentaire
Les aliments en conserve peuvent être responsables du botulisme en cas de mauvaise cuisson avant la mise en conserve. Crédit : Unsplash.

En septembre dernier, un cas de botulisme alimentaire déclaré dans un restaurant à Bordeaux a causé la mort d’une femme âgée de 32 ans ainsi que dix hospitalisations. Une grave intoxication qui engendre inévitablement des sanctions pénales. Maître Baptiste Robelin, associé du cabinet NovLaw, a répondu aux questions d’Au Coeur du CHR.

Suite au cas de botulisme alimentaire qui a causé la mort d’une femme âgée de 32 ans ans et 10 hospitalisations, que peut aujourd’hui encourir le propriétaire du restaurant ?  

En cas de décès d’un client, un restaurateur pourra être condamné pour homicide involontaire et pourra encourir jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende s’il y a une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement (article 221-6 du code pénal). Par ailleurs, en cas de non-décès des victimes, le restaurateur peut être condamné pour des blessures involontaires et risque alors jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende (article 222-19 du code pénal). Les peines sur le plan pénal sont aggravées lorsqu’il y a une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité. Or, le restaurateur a une obligation en matière d’hygiène alimentaire envers ses clients. C’est pourquoi il se verra sanctionné par les sanctions les plus lourdes. En plus de ces peines pénales, l’auteur devra des dommages-intérêts aux victimes sur le plan de la responsabilité civile pour les préjudices causés. D’autres peines du code de la consommation ou des textes applicables aux restaurateurs pourront lui être confrontés. Il pourra également lui être interdit d’exercer son activité professionnelle et de gérer un restaurant.

Une enquête pour homicide et blessures involontaires a été ouverte. Elle porte notamment sur la mise sur le marché de denrées préjudiciables à la santé et sur la vente de denrées corrompues ou toxiques. Dans ces conditions, les restaurateurs ferment-ils définitivement leur établissement ? 

En cas de manquement aux règles d’hygiène alimentaire, les sanctions peuvent aller d’un simple avertissement à la fermeture temporaire de l’établissement jusqu’à sa mise en conformité avec la réglementation (article L3332-15 du code de la santé publique). Ce dernier cas sera mis en place en cas de réelle mise en danger de la santé des consommateurs. Une fermeture définitive peut être prononcée mais cela reste rare et réservé aux cas graves et répétés de non-conformité. La fermeture temporaire de l’établissement doit rester proportionnelle avec la situation. C’est généralement à la DDPP (Direction Départementale de Protection des Populations) d’en prendre l’initiative puisque c’est elle qui procède au contrôle du respect des règles en la matière. Ainsi, si une enquête révèle la mise sur le marché de denrées préjudiciables à la santé, ou la vente de denrées corrompues ou toxiques par un restaurant, et qu’il s’avère également que le restaurant est directement responsable du décès d’un client en raison de négligence grave ou de violations flagrantes des lois et réglementations en matière de sécurité alimentaire, la fermeture temporaire de l’établissement pourra probablement être prononcée. Cependant, en l’espèce, seul un «nettoyage approfondi» de l’établissement a été ordonné par la préfecture à ce stade.

La Direction Départementale de Protection des Populations (DDPP) a constaté « un vrai défaut de maîtrise du processus de conservation » ainsi qu’un  « mode opératoire très artisanal qui doit être amélioré », sachant cela, que peut-il se passer ?

Dans le cas où la DDPP a réellement constaté un défaut de maitrise du processus de conservation, elle dispose de pouvoirs de sanctions administratives, comme des rappels réglementaires, et en cas de grave infraction, une amende conséquente est administrée au professionnel. Cela peut aller jusqu’à une peine d’emprisonnement voire la fermeture administrative si l’établissement est non conforme à la santé publique. L’enquête réalisée par la DDPP pourra servir de preuve lors du procès.

Comment les restaurateurs peuvent-ils se prémunir de ces sanctions pénales ou administratives ?

Il y a des règles d’hygiène strictes en matière de denrées alimentaires. Afin d’éviter des sanctions pénales ou administratives, les restaurateurs ont des obligations en matière de déclaration sanitaire (pour faire l’objet de contrôles) et ont également l’obligation de suivre la formation du HACCP. Cette dernière fournit aux restaurateurs toutes les mesures nécessaires pour identifier un risque sanitaire, les moyens de contrôle et de prévention de ces risques.

Enfin, est-ce que l’erreur humaine peut être prise en considération dans cette enquête ?

L’erreur humaine peut être qualifiée en droit pénal d’erreur de fait. L’erreur porte alors sur une des circonstances de l’infraction. Elle peut permettre une irresponsabilité pénale de la personne concernée. Cependant, dans les infractions non intentionnelles, comme l’homicide ou les blessures involontaires, elle n’a pas d’incidence car elle sera qualifiée d’imprudence, or c’est ce qu’on reproche à l’individu lors d’une infraction non intentionnelle. D’autant plus qu’un restaurateur a des obligations spécifiques liées à l’hygiène alimentaire et la santé de ses clients. C’est donc un manquement à ses obligations qui pourront lui être reprochées.

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