Les Montagnes de Pierre : une approche moderne de l’agriculture

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Pour rentabiliser leur activité laitière, Pierre et Amandine Lespine ont remis en question leur modèle agricole, en choisissant une race de vaches inédite dans la région et en misant tout sur la transformation du lait et la commercialisation directe.

Pierre et Amandine Lespine au milieu de leur troupeau de brunes des Alpes.
Pierre et Amandine Lespine au milieu de leur troupeau de brunes des Alpes. Crédit : Jean-Michel Déhais.

Pierre Lespine rêvait d’être agriculteur depuis sa plus tendre enfance. Sa famille n’était pas issue de ce métier. Son père est l’un des deux fondateurs d’Europe Service, une des plus importantes entreprises d’Aurillac. Le jeune homme a ainsi débuté sa carrière comme technicien dans la société familiale avant de pouvoir concrétiser ses ambitions, en 2012, en rachetant 140 ha de terre sur les hauteurs de Saint-Martin-Valmeroux. Il convainc son épouse, Amandine, fille du sénateur (LR) Stéphane Sautarel, d’abandonner son emploi de comptable pour le rejoindre dans son aventure.

En créant l’Earl de Malgorce, détentrice de l’exploitation et de la marque Les Montagnes de Pierre, le couple a choisi d’appliquer à la gestion de la ferme des méthodes d’entrepreneurs. «À terme, nous souhaitons vivre correctement de notre métier, explique Pierre. Nous avons aménagé l’exploitation pour qu’elle soit moderne et peu consommatrice en main d’œuvre.» Pour rentabiliser la ferme qui emploie cinq personnes, le néo-agriculteur privilégie la vente directe, représentant aujourd’hui 92 % de son activité. Pour en arriver là, il s’est donné du temps. Alors que la première traite a eu lieu en 2013, il a attendu quatre ans, «le temps d’obtenir un lait de qualité suffisante», avant de fabriquer des fromages.

Une approche inédite

À ses débuts, il a mis trois ans à constituer un troupeau de brunes des Alpes. Ces vaches sont peu courantes dans la région, mais elles sont bien adaptées au relief montagneux. Même si leur productivité est de 30% inférieure à celle des prim’holsteins, elles sont tout de même capables de donner en moyenne 5 500 litres de lait par an hautement fromageable. Car, pour assurer la vente directe, Pierre et Amandine ont besoin de pouvoir proposer des fromages (cantal AOP et salers AOP) de très haute qualité. «C’est le goût de mes produits qui fait la différence», assure Pierre.

Son salers (seule AOP exclusivement fermière) a raflé l’or au concours international de Lyon, en 2021. Le couple s’impose des contraintes rigoureuses. Toute la nourriture des vaches est hors colza et produite sur l’exploitation. Les animaux sont en pâture du 15 avril au 11 novembre. Les fromages sont ensuite commercialisés en direction de revendeurs locaux, à la ferme, sur le marché d’Aurillac où le couple possède un emplacement, mais aussi sur quelques marchés du territoire. Les fermiers disposent également d’un site marchand très efficace. Leur viande est abattue et transformée par l’ENILV, à Aurillac.

Depuis 2022, leur ferme s’est équipée d’un laboratoire qui permet de commercialiser des crèmes glacées, à côté des 50 tonnes de fromage produites annuellement. Enfin, Amandine joue la carte de l’agrotourisme et loue un gîte situé sur l’exploitation agricole, pouvant accueillir jusqu’à 5 personnes. Ces agriculteurs tiennent à ce que leur ferme s’inscrive dans la modernité, tant dans l’équipement que dans l’apparence. Amandine est par exemple très fière de faire remarquer aux visiteurs qu’il est possible de se promener en chaussures de ville dans le corps de ferme. Pas la moindre trace de boue n’y est perceptible. Dix ans après le démarrage de leur activité, Pierre et Amandine Lespine estiment avoir gagné leur pari, même si la dernière année d’exercice a été plus compliquée que les autres. L’inflation touche de plein fouet l’exploitation et fait flamber les prix de revient de 30%.

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